Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 23 janvier 2018 et le 13 février 2019, M. D..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 novembre 2017 ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Perpignan à lui verser la somme totale de 96 000 euros assortie des intérêts de retard à compter du 11 octobre 2015 et de leur capitalisation ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Perpignan la somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier à défaut de signature ;
- les faits de harcèlement réitérés et avérés dont il fait l'objet doivent être appréciés dans leur ensemble et sans prise en considération de l'absence d'une volonté de nuire ;
- ces faits ouvrent droit au bénéfice de la protection fonctionnelle ;
- il subit un préjudice moral et matériel.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 janvier 2019, le centre hospitalier de Perpignan, représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. D... d'une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., représentant le centre hospitalier de Perpignan.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... relève appel du jugement du 30 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de cet établissement à lui verser la somme de 60 000 euros en réparation du préjudice moral résultant des faits de harcèlement dont il s'estime victime et du refus de protection fonctionnelle qui lui a été opposé. Il porte sa demande indemnitaire à la somme de 96 000 euros assortie des intérêts de retard à compter du 11 octobre 2015 et de leur capitalisation.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Contrairement à ce que soutient M. D..., la minute du jugement contesté du 30 novembre 2017 comporte la signature du rapporteur, du président de la formation de jugement et du greffier d'audience. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. / Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus. (...) ".
4. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
5. M. D... a été employé par le centre hospitalier de Perpignan en qualité de médecin ophtalmologiste faisant fonction d'interne à compter du 10 juin 2003 puis de praticien hospitalier attaché associé à temps plein à compter du 3 octobre 2005. Il a été affecté à compter du 14 avril 2014 au centre hospitalier de Narbonne par mise à disposition dans le cadre d'une convention de coopération entre les deux établissements. Il soutient avoir fait l'objet de critiques systématiques de son travail, d'insultes à caractère raciste, de propos humiliants, de surcharges de travail et de consignes confuses et contradictoires de la part de son chef de service arrivé en 2006. Il explique encore, en particulier, que celui-ci aurait demandé de plus en plus fréquemment un second avis sur les diagnostics qu'il avait portés, aurait ordonné un examen complémentaire afin de vérifier l'un de ses diagnostic, se serait opposé à lui sur une technique opératoire, ne l'aurait pas associé à la procédure de passation d'un marché public pour des implants intraoculaires et aurait refusé d'inclure son activité à temps partiel exercée depuis 2013 au centre hospitalier de Narbonne dans les statistiques ayant pour objet de rendre compte de l'activité du centre hospitalier de Perpignan. Par ailleurs, il ajoute que son affectation en avril 2014 au centre hospitalier de Narbonne est intervenue contre sa volonté, alors qu'il est sous contrat avec le centre hospitalier de Perpignan jusqu'en 2020 et qu'il a été privé, au sein du centre hospitalier de Perpignan, de son bureau, que son nom a été retiré des ordonnances du service d'ophtalmologie et sa boite mail fermée et ne plus s'être vu confier d'astreintes. Toutefois, il résulte de l'instruction, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges qui ont bien apprécié dans leur ensemble les faits et situations dont M. D... fait état, que ceux-ci soit ne peuvent être tenus pour établis, soit relèvent de comportements de la part de ses supérieurs n'excédant pas les limites normales de l'exercice du pouvoir hiérarchique. Les premiers juges ont pu en outre justement relever l'absence d'une volonté de nuire en dépit de la circonstance que l'existence d'une telle volonté ne constitue pas une condition de la reconnaissance d'une situation de harcèlement moral. Pris isolément ou ensemble, les faits et situations relatés par M. D... ne permettent pas de laisser raisonnablement supposer que, ainsi qu'il l'affirme, il a été victime d'une situation de harcèlement moral au sens des dispositions précitées de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983.
6. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions indemnitaires. Ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le centre hospitalier de Perpignan et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : M. D... versera au centre hospitalier de Perpignan une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au centre hospitalier de Perpignan.
Délibéré après l'audience du 21 novembre 2019, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme E..., présidente assesseure,
- M. Sanson, conseiller.
Lu en audience publique, le 5 décembre 2019.
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N° 18MA00326