Par un arrêt n° 17MA00672 du 9 juillet 2019, la cour administrative de Marseille a annulé ce jugement, condamné le centre hospitalier du pays d'Apt à verser à M. A... B... la somme de 6 770 euros, le groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon à lui verser la somme de 37 000 euros et, solidairement, le centre hospitalier du pays d'Apt et le centre hospitalier d'Avignon à lui verser la somme de 15 000 euros.
Par une décision n° 434425 du 8 juin 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt et a renvoyé l'affaire devant la cour, où elle a été de nouveau enregistrée sous le numéro 21MA02323.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 février 2017 et le 4 octobre 2021, M. A... B..., représenté par Me Suissa, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 19 décembre 2016 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) de condamner solidairement le centre hospitalier d'Avignon, le centre hospitalier du pays d'Apt et le groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon à lui verser la somme totale de 54 171,56 euros ;
3°) de condamner :
- le centre hospitalier d'Avignon à lui verser la somme de 10 932 euros ;
- le centre hospitalier du pays d'Apt à lui payer la somme de 7 934,86 euros ;
- le groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon Chirurgie à lui payer la somme de 41 490,40 euros ;
4°) d'assortir ces sommes des intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2014 ;
5°) de mettre à la charge du centre hospitalier d'Avignon, du centre hospitalier du pays d'Apt et du groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon Chirurgie la somme de
2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le centre hospitalier d'Avignon, le centre hospitalier du pays d'Apt et le groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon ont commis des fautes dans la gestion de sa carrière et de ses conditions d'exercice professionnel ; ces comportements ont mis en jeu la sécurité des patients et l'ont conduit au surmenage ;
- l'engagement de publier un poste de praticien hospitalier n'a pas été tenu alors qu'il a rempli ses objectifs d'activité ;
- ses astreintes ont été indemnisées à un taux moindre que celui prévu par la réglementation ; en outre, les indemnités forfaitaires pour temps de travail additionnel ne lui ont pas été versées et 4 jours ont été prélevés à tort sur son compte épargne temps ;
- il est en droit d'obtenir, à la charge du centre hospitalier d'Avignon, du centre hospitalier du pays d'Apt et du groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon, la somme de 50 000 euros en réparation de son préjudice moral ainsi que la somme de 4 171,56 euros au titre des troubles subis dans ses conditions d'existence en raison de la nécessité de rechercher en urgence un autre poste ;
- il est également en droit d'obtenir, à la charge du centre hospitalier d'Avignon, la somme de 10 932 euros au titre des pertes de rémunération subies les 2 premières années d'exercice faute de publication du poste ;
- il est en droit d'obtenir, à la charge du centre hospitalier d'Apt, la somme de
7 934,86 euros au titre des astreintes, du temps de travail additionnel et des jours pris sur son compte épargne temps ;
- il est enfin en droit d'obtenir, à la charge du groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon, la somme de 41 490,40 euros au titre des astreintes et du temps de travail additionnel.
Par un mémoire, enregistré le 5 décembre 2017, le centre hospitalier d'Avignon, représenté par Me Coque, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... B... la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... B... ne sont pas fondés.
Par des mémoires enregistrés les 2 septembre et 18 octobre 2021, le centre hospitalier d'Avignon, le centre hospitalier du pays d'Apt et le groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon, représentés par Me Marc, concluent au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... B... la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils font valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- l'arrêté du 30 avril 2003 relatif à l'organisation et à l'indemnisation de la continuité des soins et de la permanence pharmaceutique dans les établissements publics de santé et dans les établissements publics d'hébergement pour personnes âgées dépendantes ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sanson,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Sorano, représentant le centre hospitalier d'Avignon, le centre hospitalier du pays d'Apt et le groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., chirurgien spécialisé en orthopédie et traumatologie recruté comme praticien contractuel pour une durée de deux ans à compter du 1er juin 2011 par le centre hospitalier d'Avignon, a été mis à disposition du centre hospitalier du pays d'Apt puis, à la suite d'un avenant du 10 octobre 2011, du groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon Chirurgie. Il relève appel du jugement du 19 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de ces établissements à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de ses conditions d'exercice professionnel, du travail supplémentaire réalisé et du non-respect d'un engagement de publier un poste de praticien hospitalier dans sa discipline.
2. En premier lieu, l'ensemble des faits et situations invoqués par le requérant, tenant notamment à une prétendue insuffisance des dispositifs d'astreinte de chirurgiens, à la circonstance que les emplois du temps seraient élaborés sans qu'il soit consulté, à des manquements aux règles de désinfection et d'asepsie, à une insuffisance de personnel et aux refus allégués des médecins orthopédistes de s'insérer dans une organisation permettant d'assurer la continuité des soins, sont insuffisamment étayés ou insusceptibles, dès lors qu'ils ne caractérisent que de simples difficultés d'ordre organisationnel, d'ouvrir à M. A... B... un droit à la réparation des préjudices qu'il invoque.
3. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, notamment du courriel du 18 avril 2011 de la directrice du centre hospitalier du Pays d'Apt et du courrier du directeur du centre hospitalier d'Avignon du 30 mai 2011, que les promesses faites à M. A... B..., d'une part, d'engager des démarches afin de publier un avis de vacance de poste de praticien hospitalier titulaire à l'issue de sa première année d'exercice et, d'autre part, de le recruter sur ce poste au terme de la seconde année, étaient conditionnées par les objectifs d'atteindre, respectivement, 300 et 500 séjours avec acte classant en chirurgie orthopédique. S'il est constant que l'objectif de la première année d'exercice a été atteint, M. A... B... n'établit pas, ni même n'allègue, que plus de 500 séjours avec acte classant ont été enregistrés entre les 1er juin 2012 et 30 mai 2013 alors, en outre, qu'il ne résulte pas de l'instruction que cet objectif aurait été atteint si le centre hospitalier du Pays d'Apt avait tenu son engagement d'assurer la permanence des soins pendant les congés de M. A... B.... En tout état de cause, le requérant n'apporte pas la preuve que les propositions de recrutement qu'il a reçues de deux autres centres hospitaliers étaient relatives à un poste de titulaire. Dans ces conditions, M. A... B... n'est pas fondé à obtenir la réparation du préjudice résultant du manquement des centres hospitaliers d'Avignon et du Pays d'Apt à leur engagement de le titulariser au terme de son contrat à durée déterminée.
4. En troisième lieu, d'une part, l'article D. 6152-417 du code de la santé publique dispose que la rémunération du praticien contractuel comprend, outre ses émoluments, " 2° Des indemnités de sujétion correspondant au temps de travail effectué, dans le cadre des obligations de service hebdomadaires, la nuit, le samedi après-midi, le dimanche et les jours fériés ; / 3° Des indemnités forfaitaires pour tout temps de travail additionnel accompli, sur la base du volontariat, au-delà des obligations de service ; / 4° Des indemnités correspondant aux astreintes et aux déplacements auxquels elles peuvent donner lieu. (...) Les montants et modalités de versement des indemnités mentionnées aux 2°, 3° et 4° sont fixés par arrêté des ministres chargés du budget, de la sécurité sociale et de la santé. "
5. D'autre part, en vertu des articles 13 et 14 de l'arrêté susvisé du 30 avril 2003 pris pour l'application de cet article D. 6152-417, dans leur version alors en vigueur, la permanence des soins est indemnisée à hauteur de 264,63 euros pour une nuit, un dimanche ou un jour férié, et de 132,31 euros pour une demi-nuit ou un samedi après-midi, tandis que le montant forfaitaire de l'indemnisation des astreintes varie, en fonction de leur caractère " opérationnel " ou " de sécurité ", de 42,13 euros à 30,54 euros pour une nuit ou deux demi-journées, ou de 21,05 euros 15,29 euros pour une demi-astreinte le samedi après-midi. En outre, en vertu de ces mêmes dispositions, l'indemnité forfaitaire pour toute période de temps de travail additionnel accompli sur la base du volontariat, au-delà des obligations de service hebdomadaires, s'élève, pour un praticien contractuel, à 317,55 euros pour une période de temps de travail accomplie de jour du lundi matin au samedi après-midi inclus, et à 473,94 euros pour une période de temps de travail additionnel accompli la nuit, le dimanche ou jour férié.
6. En se bornant à soutenir, d'une part, que le montant de ses gardes et astreintes aurait dû être rémunéré au montant forfaitaire de 187 euros et, d'autre part, que plusieurs de ces gardes et astreintes, outre des périodes de temps de travail additionnel volontaires, ne lui ont pas été rémunérées, M. A... B..., qui ne produit qu'un état récapitulatif imprécis de ses astreintes, d'ailleurs contesté par les établissements défendeurs, et des bulletins de salaires revêtus de mentions manuscrites imprécises, ne démontre pas la réalité du préjudice financier qu'il invoque.
7. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction, notamment des courriers des 14 et 17 mai 2013 adressés par M. A... B... à sa hiérarchie, que quatre jours de son compte épargne-temps ont été prélevés sans son accord par la directrice du centre hospitalier du pays d'Apt pour le placer en congé entre les 21 et 24 mai 2013. Toutefois, alors qu'il a pu effectivement bénéficier de ces congés, M. A... B... ne saurait obtenir la réparation du préjudice financier résultant de ce qu'il n'a pu monétiser ces quatre journées. En outre, il ne démontre pas que ce prélèvement d'office sur son compte-épargne temps serait à l'origine d'un préjudice moral susceptible de lui ouvrir droit à réparation.
8. En dernier lieu, M. A... B... fait valoir, sans être contredit, qu'une demande de récupération de temps de travail (RTT) pour la journée du 31 mai 2013 lui a été accordée avant de lui être refusée le 10 mai 2013. Toutefois, l'intéressé, qui a accepté de prolonger jusqu'au 30 juin la durée de son engagement, n'aurait quoi qu'il en soit pas pu effectuer le voyage qu'il prévoyait entre les 31 mai et 8 juin 2013. Le préjudice financier tiré de ce qu'il a exposé des frais pour annuler ce voyage est donc sans lien avec le refus tardif de sa hiérarchie.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté ses conclusions indemnitaires.
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à chacune des parties la charge de ses propres frais d'instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier d'Avignon, le centre hospitalier du pays d'Apt et le groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B..., aux centres hospitaliers d'Avignon et d'Apt et au groupement de coopération sanitaire Apt-Avignon Chirurgie.
Délibéré après l'audience du 24 février 2022, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président.
- Mme Massé-Degois, présidente assesseure,
- M. Sanson, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2022.
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