Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 31 août 2020 et le 19 avril 2021, M. B..., représenté par Me Giudicelli, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 29 juin 2020 du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler la décision du 9 octobre 2018 du directeur de l'AP-HM ;
3°) de mettre à la charge de l'AP-HM le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision du 9 octobre 2018 est entachée d'une insuffisance de motivation ;
- elle est fondée sur des faits de " faux et usage de faux " dont la matérialité n'est pas établie alors qu'il incombe à l'AP-HM d'en apporter la preuve ;
- la sanction d'exclusion pour une durée de deux ans prononcée par la décision du 9 octobre 2018 présente un caractère disproportionné.
Par des mémoires en défense enregistrés les 16 mars et 10 mai 2021, l'AP-HM, représentée par Me Pichon, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B... le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 11 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juin 2021.
Un mémoire produit pour M. B... le 1er juin 2021, postérieurement à la clôture de l'instruction, n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Massé-Degois, rapporteure,
- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public,
- et les observations de Me Giudicelli représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. A la suite d'une procédure disciplinaire diligentée à son encontre le 7 décembre 2017 par la direction des ressources humaines de l'hôpital de la Timone à Marseille, M. B..., qui exerce ses fonctions d'infirmier depuis 2011 au sein de cet établissement, s'est vu infliger une sanction d'exclusion temporaire de fonction pour une durée de deux ans à compter du 1er novembre 2018 par une décision du 9 octobre 2018. M. B... relève appel du jugement du 29 juin 2020 par lequel tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de cette dernière décision.
2. En premier lieu, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 2 et 3 de leur jugement, dès lors que l'appelant reprend, sans apporter d'élément nouveau ou déterminant, l'argumentation soumise à ceux-ci et que ces motifs sont suffisants et n'appellent aucune précision.
3. En deuxième lieu, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, à laquelle il incombe d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public, peut apporter la preuve de ces faits devant le juge administratif par tout moyen.
4. M. B..., qui a été admis le 10 mai 2017 sur la liste principale des candidats au concours d'entrée à l'école d'infirmier anesthésiste diplômé d'Etat, a vu ses demandes de prise en charge d'un congé de formation professionnelle (CFP) refusées par le comité de gestion régional du congé de formation professionnelles de l'association nationale pour la formation du personnel hospitalier (A.N.F.H) à deux reprises, le 7 juillet 2017 puis le 22 septembre 2017, sa formation n'étant pas prioritaire et les crédits disponibles étant insuffisants. Le 24 juillet 2017, la directrice adjointe des ressources humaines de l'AP-HM l'a informé que la commission d'attribution des financements de promotion professionnelle hospitalière (PPH) au titre de l'année 2017 avait émis un avis défavorable à sa demande de financement de sa scolarité et l'a invité à se rapprocher de la direction des écoles afin de conserver le bénéfice de sa scolarité. En outre, le directeur des soins de l'hôpital de la Timone a émis, le 14 novembre 2017, un avis défavorable à la demande d'autorisation d'absence pour un congé de formation professionnelle présentée par M. B....
5. A la suite des informations qui lui ont ainsi été délivrées, et bien qu'il lui ait été expressément rappelé par un courriel du 10 novembre 2017 de la directrice adjointe des ressources humaines de l'AP-HM que la transmission de son dossier à l'A.N.F.H. devait se faire sous couvert du service de formation de l'établissement, M. B... a adressé directement à l'A.N.F.H. un courrier daté du 29 septembre 2017 revêtu de la signature et du tampon de M. C..., directeur adjoint du groupe hospitalier la Timone, lui accordant une autorisation d'absence pour congé de formation professionnelle du 2 octobre 2017 au 30 septembre 2019. Le 21 novembre 2017, M. C... a informé la direction des ressources humaines que, bien que ce courrier comportât son nom, son cachet et sa signature, il n'en était pas l'auteur. M. C... a déposé une plainte pour faux et usage de faux le 29 novembre suivant.
6. La sanction contestée du directeur général de l'AP-HM est fondée sur le motif tiré de ce que le courrier du 29 septembre 2017 portant la signature et le tampon de M. C..., adressé à l'ANFH constituait un faux confectionné par M. B... en vue de solliciter à nouveau le financement de sa scolarité auprès du comité de gestion régional du congé de formation professionnelle.
7. S'il conteste formellement être l'auteur des faits qui lui sont reprochés, d'une part, M. B... admet dans ses écritures d'appel ne pas avoir respecté la procédure applicable aux demandes de congé de formation professionnelle, qui lui avait pourtant été expressément rappelée, sans toutefois apporter la moindre explication sur les raisons qui l'ont conduit à s'affranchir de cette procédure, et à s'abstenir d'y joindre l'avis défavorable du directeur des soins de l'hôpital de la Timone.
8. D'autre part, ce courrier du 29 septembre 2017, qui se présente comme un courrier sur papier libre de M. B... lui-même sollicitant le renouvellement d'une autorisation d'absence pour formation professionnelle, s'il porte le nom et la signature de M. C..., que ce dernier a reconnu comme pouvant être la sienne au cours de l'enquête diligentée à la suite de la plainte qu'il a déposée, ne correspond pas au formulaire utilisé pour ce type de demande, est revêtu d'un tampon qui ne correspond à aucun de ceux utilisés par l'administration hospitalière et ne précise pas le sens de l'avis, favorable ou défavorable, que son auteur doit donner à la demande qui lui a été soumise.
9. Eu égard à l'ensemble des éléments concordants qui viennent d'être rappelés, qui ne sont utilement contredits ni par le témoignage d'une représentante syndicale qui s'est bornée à attester qu'elle avait entendu M. C... donner son accord à une demande d'entrevue que lui avait faite M. B... pour " un autre document qui nécessite un accord ", ni par le classement sans suite de la plainte de M. C... au motif que les faits n'avaient pu être clairement établis par l'enquête, c'est sans renverser la charge de la preuve que les premiers juges ont retenu que les faits reprochés à M. B... devaient être regardés comme établis et revêtaient la nature d'une faute justifiant que lui soit infligée une sanction disciplinaire.
10. En dernier lieu, il appartient à l'autorité investie du pouvoir disciplinaire, pour apprécier la gravité des faits reprochés à un agent et déterminer en conséquence le choix d'une sanction, de tenir compte des éléments et des circonstances de l'époque à laquelle ces faits ont pris place et qui en constituent le contexte.
11. La falsification de documents administratifs et leur utilisation à des fins personnelles contraires aux décisions de l'autorité hiérarchique constituent un manquement particulièrement grave aux obligations d'intégrité et de probité qui s'imposent à l'ensemble des fonctionnaires et agents publics. Bien qu'ayant revêtu un caractère isolé de la part d'un agent n'ayant aucun antécédent disciplinaire et bénéficiant d'évaluations professionnelles correctes, une telle faute présente un caractère de gravité suffisante pour justifier, sans erreur d'appréciation, la sanction de l'exclusion temporaire pour une durée de deux ans, le requérant ne pouvant utilement se prévaloir, à cet égard, des pièces médicales des 8 juin et 12 juillet 2017 selon lesquelles il présentait un " état anxieux réactionnel avec une composante dépressive réactionnelle " en cours de chronicisation avec un sentiment de " mise au banc " en lien avec son milieu professionnel.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'AP-HM, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. B... le versement de la somme de 1 500 euros à l'AP-HM.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera la somme de 1 500 euros à l'AP-HM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à l'Assistance Publique - Hôpitaux de Marseille (AP-HM).
Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021, où siégeaient :
- M. Alfonsi, président de chambre,
- Mme Massé-Degois, présidente assesseure,
- M. Sanson, conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 octobre 2021.
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N° 20MA03267
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