Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 octobre 2015, Mme B... épouseD..., représentée par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er octobre 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 30 juin 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer sa situation et de lui délivrer un titre de séjour.
Elle soutient que le refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
Mme B... épouse D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 29 février 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laso ;
- et les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique.
1. Considérant que Mme B..., de nationalité algérienne, s'est mariée en Algérie avec M. D..., ressortissant français, le 20 juin 2013 ; qu'elle est entrée en France le 14 décembre 2013 et s'est vue délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " valable du 4 mars 2014 au 3 mars 2015 ; que, le 26 février 2015, elle a présenté une demande de renouvellement de son titre de séjour en sollicitant un changement de son statut de " conjoint de français " en celui de " salarié " ; que, par arrêté du 30 juin 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté cette demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que, par un jugement du 1er octobre 2015, dont l'intéressée relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
2. Considérant que l'accord franco-algérien régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité ; qu'il suit de là que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance, ne sont, à l'exception de certaines dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers qui n'ont pas été écartées par une disposition contraire expresse contenue dans cet accord, pas applicables aux ressortissants algériens, lesquels relèvent des règles fixées par ledit accord ; que si une ressortissante algérienne ne peut utilement invoquer les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives au renouvellement du titre de séjour lorsque l'étranger a subi des violences conjugales et que la communauté de vie a été rompue, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressée, et notamment des violences conjugales alléguées, l'opportunité d'une mesure de régularisation ; qu'il appartient seulement au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressée ;
3. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point précédent, dès lors que les dispositions de l'accord franco-algérien régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis au séjour, la requérante ne peut se prévaloir utilement, pour contester la légalité du refus de renouvellement d'un certificat de résidence, des dispositions des articles L. 313-12, L. 431-2 et L. 316-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoyant la possibilité d'un renouvellement de la carte de séjour lorsque la communauté de vie a été rompue à l'initiative de l'étranger en raison des violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint ; qu'elle ne peut pas plus utilement invoquer le bénéfice de la circulaire du 30 octobre 2004 du ministre de l'intérieur qui est dépourvue de valeur réglementaire ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
5. Considérant que, pour établir qu'elle a subi des violences conjugales de la part de son époux et qu'elle a été contrainte de quitter le domicile conjugal, Mme B... épouse D...produit un jugement d'un tribunal algérien du 7 janvier 2015 reconnaissant que le divorce, sollicité par son époux, est abusif dès lors que celui-ci n'a pas présenté de motif valable,
deux mains courantes qu'elle a déposées les 5 septembre et 20 octobre 2014 où elle a déclaré que son époux " ne voulait plus d'elle ", " a tenu des propos très durs ", " la dénigrait sans cesse " et " l'a abattue psychologiquement " et deux attestations relatant la façon dont son époux " l'a mise à la porte " ; que, toutefois, la dissolution du mariage par la volonté unilatérale de son époux, si elle doit être regardée comme une répudiation de l'intéressée, ne relève pas d'un cas de violences conjugales au sens des dispositions mentionnées au point 3 ; que, par ailleurs, les pièces produites n'établissent pas à elles seules les violences conjugales alléguées ni que la communauté de vie a été rompue pour cette raison ; qu'enfin, l'intéressée qui, à la date de la décision contestée, était divorcée de son époux de nationalité française, n'a pas d'enfant et ne justifie pas avoir d'autres liens en France alors qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-sept ans ; que, dans ces conditions, eu égard notamment au caractère très récent de son séjour en France à la date de la décision contestée et alors même qu'elle dispose d'un contrat de travail à durée déterminée, d'un projet de formation et qu'elle bénéficie du soutien d'une association, le refus de titre de séjour en cause n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été prise cette décision ; que le préfet de Bouches-du-Rhône n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressée en refusant de régulariser sa situation administrative et de lui délivrer un certificat de résidence ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... épouse D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction ne peuvent qu'être rejetées par voie de conséquence ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... épouse D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2016 où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président de chambre,
- M. Laso, président-assesseur,
- M. Lafay, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 décembre 2016.
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15MA04075