Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2020 sous le n° 20MA02294, M. C..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 janvier 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour d'un an portant la mention " vie privée et familiale " et, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de l'admettre à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle si le bureau d'aide juridictionnelle n'a pas encore statué et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, le cas échéant, de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige n'est pas suffisamment motivé, ce qui révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- en ce qui concerne le refus d'admission au séjour, les conclusions dirigées contre cette décision sont recevables, le préfet s'étant prononcé sur son droit au séjour dans le 3ème considérant de l'arrêté contesté ; cette décision méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est également entachée d'erreur manifeste au regard de sa situation personnelle ;
- en ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français, elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus d'admission au séjour ; elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste au regard de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2020, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il renvoie à ses écritures de première instance en faisant valoir que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
II. Par une requête, enregistrée le 16 juillet 2020 sous le n° 20MA02295, M. C..., représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner le sursis à exécution de ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille ;
2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de l'arrêt de la Cour au fond, dans le délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir ;
3°) de l'admettre à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle si le bureau d'aide juridictionnelle n'a pas encore statué et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, le cas échéant, de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- l'exécution du jugement risque d'entraîner pour lui des conséquences difficilement réparables, en rendant possible son éloignement ;
- les moyens d'annulation développés dans sa requête au fond présentent un caractère sérieux.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2020, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 23 octobre 2020.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par arrêté du 23 janvier 2020, le préfet des Bouches-du-Rhône a fait obligation à M. C..., ressortissant marocain né en 1979, de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné. M. C... fait appel du jugement rendu le 29 mai 2020 par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Il présente également une requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement. Il y a lieu de joindre ces deux requêtes, qui sont dirigées contre le même jugement, pour statuer par un seul arrêt.
Sur l'admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle :
2. L'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. C... par deux décisions du 23 octobre 2020. Par suite, ses conclusions tendant à ce que lui soit accordée l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont sans objet. Il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions.
Sur la légalité de l'arrêté du 23 janvier 2020 et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions dirigées contre le refus d'admission au séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".
4. M. C... fait valoir qu'il est entré en France pour la première fois en avril 2008, qu'il s'est marié en mars 2011 à Marseille avec une ressortissante française et qu'il est retourné au Maroc en 2011 pour obtenir la délivrance d'un visa de long séjour en qualité de conjoint de français valant titre de séjour. Il indique qu'après avoir obtenu ce document, il est revenu en France en septembre 2012 et s'est vu délivrer consécutivement deux titres de séjour portant la mention vie privée et familiale valables du 19 septembre 2013 au 25 septembre 2015. Il explique s'être ensuite vu délivrer, jusqu'au 7 novembre 2017, plusieurs récépissés de demande de renouvellement de titre de séjour et qu'il s'est séparé de son épouse en janvier 2017. Toutefois, M. C... est célibataire et sans enfant. Il ne justifie pas de sa présence en France entre 2008 et 2012. Les attestations de proches et de commerçants produites, rédigées en des termes très généraux, ne suffisent pas à démontrer que M. C... aurait transféré en France le centre de ses intérêts privés et familiaux, en dépit de la présence sur le territoire national de son frère et de sa soeur. Il n'établit pas, ni même n'allègue, être dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-neuf ans et où son père réside ainsi qu'il l'a déclaré devant les services de la police aux frontières. La circonstance qu'il a exercé un emploi de pizzaiolo dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée au cours de la période d'octobre 2012 à août 2017 ne permet pas de caractériser une insertion professionnelle notable en France à la date du refus de séjour contesté. Dans ces conditions, l'arrêté en litige, qui n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, l'arrêté critiqué n'est pas plus entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation personnelle de M. C....
5. En second lieu, les moyens tendant à l'annulation de la décision refusant d'admettre au séjour M. C... ayant été écartés, il n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de cette décision au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte.
Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :
7. Le présent arrêt statue sur l'appel de M. C... tendant à l'annulation du jugement attaqué. Dès lors, il n'y a pas lieu de statuer sur sa requête tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution du même jugement.
Sur les frais liés aux litiges :
8. Il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. C... tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions tendant à la suspension de l'exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 mai 2020 et sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire de M. C....
Article 2 : La requête n° 20MA02294 de M. C... et ses conclusions présentées dans la requête n° 20MA02295 au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à Me E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Lascar, président,
- Mme D... et Mme B..., premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 19 novembre 2020.
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N° 20MA02294, 20MA02295
mtr