2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les rémunérations perçues dans le cadre des opérations d'aménagement qui lui sont confiées par voie de concession sont exonérées de l'impôt sur les sociétés en application du 6° bis du 1 de l'article 207 du code général des impôts et de l'article 46 bis de l'annexe III à ce code, dès lors qu'elles ne créent pas un produit détachable de l'opération ;
- à titre subsidiaire, le produit de ces rémunérations doit être rattaché à l'exercice au cours duquel l'opération d'aménagement prend fin en application du règlement CRC 99-05 du 23 juin 1999 auquel renvoie l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts et la doctrine administrative référencée BOI-BIC-DECLA-30-10-20-20 n° 80 du 27 octobre 2014 et non à son résultat fiscal annuel ;
- à titre encore subsidiaire, les rémunérations dont le montant est négatif doivent être prises en compte dans le calcul des rectifications opérées par l'administration ;
- sa rémunération en qualité de mandataire aménageur doit être rattachée à l'exercice au cours duquel s'achève la prestation, en application du 2 bis de l'article 38 du code général des impôts, s'agissant d'une prestation continue et diffuse dans le temps :
- à titre subsidiaire, le résultat déficitaire des mandats doit être pris en compte au titre des années d'imposition concernées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 février 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.
Le ministre de l'action et des comptes publics a produit un nouveau mémoire le 6 juin 2018, qui n'a pas été communiqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Courbon,
- les conclusions de M. Ouillon, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant la SEMEPA.
Considérant ce qui suit :
1. La société d'économie mixte d'équipement du Pays d'Aix (SEMEPA) a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale lui a notifié des redressements en matière d'impôt sur les sociétés et de contributions sur l'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007. La SEMEPA relève appel du jugement du 20 septembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a refusé de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de ces compléments d'imposition.
Sur les conclusions à fin de décharge :
En ce qui concerne les rémunérations tirées des conventions d'aménagement :
2. D'une part, aux termes de l'article 207 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " 1. Sont exonérés de l'impôt sur les sociétés : / (...) 6° bis. Dans les conditions fixées par décret, les établissements publics et sociétés d'économie mixte chargés de l'aménagement par une convention contractée, en application du deuxième alinéa de l'article L. 300-4 du code de l'urbanisme ainsi que les organismes d'habitations à loyer modéré régis par l'article L. 411-2 du code de la construction et de l'habitation et les sociétés anonymes de coordination d'organismes d'habitations à loyer modéré régies par l'article L. 423-1-1 du même code, pour les résultats provenant des opérations réalisées dans le cadre des procédures suivantes :/ a.- zone d'aménagement concerté (...) ". Aux termes de l'article 46 bis de l'annexe III au même code : " Les établissements publics et sociétés d'économie mixte chargés de l'aménagement par une convention contractée en application du deuxième alinéa de l'article L 300-4 du code de l'urbanisme, sont exonérés de l'impôt sur les sociétés, sous les conditions énoncées à l'article 46 ter, pour la fraction de leurs bénéfices nets provenant soit de l'exécution des travaux d'aménagement, d'équipement général ou des ouvrages qu'ils effectuent sur des terrains dont ils ne sont pas propriétaires, soit des cessions ou locations portant sur des terrains ou immeubles qu'ils ont préalablement pourvus des aménagements, équipements généraux ou ouvrages nécessaires à leur utilisation. ". L'article 46 ter de l'annexe III au code général des impôts dispose : " L'exonération prévue à l'article 46 bis est subordonnée à la condition : / (...) 2° En ce qui concerne les sociétés d'économie mixte, qu'elles fonctionnent conformément aux dispositions de l'article R.321-21 du code de l'urbanisme et que les bénéfices dont l'exonération est demandée proviennent d'opérations effectuées par elles dans le cadre d'une convention publique d'aménagement prévue à l'article L 300-4 du même code. " ;
3. D'autre part, aux termes de la première phrase du premier alinéa du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés ". Aux termes de l'article R. 321-21 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Les établissements publics et les sociétés d'économie mixte doivent tenir leur comptabilité conformément à un plan comptable particulier établi sur les bases du plan comptable général et approuvé par le ministre de l'économie et des finances ". Il résulte de l'annexe du règlement du 23 juin 1999 du Comité de la réglementation comptable relatif au traitement comptable des concessions d'aménagement dans les sociétés d'économie mixte locales, homologué par un arrêté du ministre des finances du 14 décembre 1999, que les sommes que le concessionnaire est habilité à imputer sur chaque opération en vue de couvrir ses frais de fonctionnement, dont le cahier des charges précise les modalités d'assiette et de taux qui sont qualifiées de " rémunérations ", ont la nature d'un remboursement forfaitaire de frais à inscrire à un compte de transfert de charges. Il en résulte également qu'au cours de l'exécution d'une convention d'aménagement, le résultat intermédiaire provisoire de l'opération est neutralisé par le mouvement d'un compte de régularisation et qu'à l'issue de la concession, pour ce qui concerne les opérations d'aménagement concédées aux risques et profits du concédant, le solde de ce compte de régularisation est, s'il traduit un excédent des produits sur les charges, reversé à la collectivité territoriale concédante, le déficit étant, dans le cas contraire, comblé par une participation de cette collectivité.
4. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que les sommes ainsi inscrites dans des comptes de transferts de charges d'exploitation d'une société d'économie mixte, attributaire d'une concession d'aménagement, même si elles sont qualifiées de " rémunérations " par les conventions, ont pour seul objet de permettre l'affectation à l'opération d'une fraction, évaluée le cas échéant de manière forfaitaire, des frais de fonctionnement de la société et ne constituent pas, pour celle-ci, un produit définitivement acquis. Elles ne sauraient, par suite, être regardées comme constitutives d'un élément de bénéfice étranger aux opérations dont le résultat est exonéré d'impôt sur les sociétés en vertu du 6° bis du 1 de l'article 207 du code général des impôts et des articles 46 bis et 46 ter de l'annexe III à ce code.
5. La SEMEPA a conclu avec la ville d'Aix-en-Provence plusieurs conventions publiques d'aménagement en application de l'article L. 300-4 du code de l'urbanisme. La convention de concession de l'aménagement urbain de Sextius-Mirabeau, conclue en 1991, prévoit, en son article 3.4, intitulé " coût des frais de fonctionnement de la société " et que l'on retrouve dans des termes similaires dans les clauses des autres conventions de concession conclues par cette société, que : " Pour couvrir les frais généraux engendrés par sa mission définie à l'article 1.2, la SEMEVA aura droit à une rémunération fixée à un pourcentage, en exonération de taxe, de 4,5 % du montant cumulé de la somme des dépenses et recettes, TTC ". L'article 3.5 de cette convention, qui traite des " conséquences financières de l'expiration ou de l'interruption du contrat de concession ", dispose, dans la rubrique relative au " règlement final " : " Si le solde d'exploitation est positif après acquittement par la société de toute charge d'impôt éventuelle, la société est débitrice de son montant ; s'il est négatif, la Ville verse une participation. Si le solde de financement est positif, la société doit à la ville le remboursement de ses avances et le montant du capital non amorti des emprunts repris par la Ville, à due concurrence. ".
6. Dans le cadre de l'exécution de ces contrats de concession, par des écritures comptables retranscrites dans les propositions de rectification des 17 décembre 2008 et 7 avril 2009 et non remises en cause par l'administration fiscale, la SEMEPA a procédé, au titre des exercices en litige, à l'imputation forfaitaire de ses frais de fonctionnement en les inscrivant au compte " 791 transferts de charges " dans la comptabilité analytique des programmes concernés, et dont elle constitue un élément du prix de revient. Ainsi, la rémunération forfaitaire prévue par les stipulations précitées de la convention de concession a pour seul objet de permettre, par l'affectation d'une fraction des frais de fonctionnement de la société à chacune des opérations en cause, d'en déterminer le résultat. Ces " rémunérations forfaitaires " correspondent ainsi à des écritures de transfert de charges telles que celles mentionnées au point 4 ci-dessus et ne peuvent, dès lors être regardées comme un élément de bénéfice étranger aux opérations dont le résultat est exonéré d'impôts sur les sociétés tel que prévu au 6° bis du 1 de l'article 207 du code général des impôts. Par suite, la SEMEPA est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a considéré ces rémunérations comme imposables et à obtenir la décharge de la fraction des suppléments d'impôt sur les sociétés qui lui ont été réclamés au titre des années 2005 à 2007, correspondant à la taxation des sommes en cause.
En ce qui concerne les rémunérations tirées des conventions de mandat :
7. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " (...) L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. / 2 bis. Pour l'application des 1 et 2, les produits correspondant à des créances sur la clientèle ou à des versements reçus à l'avance en paiement du prix sont rattachés à l'exercice au cours duquel intervient la livraison des biens pour les ventes ou opérations assimilées et l'achèvement des prestations pour les fournitures de services. / Toutefois, ces produits doivent être pris en compte :/ a. Pour les prestations continues rémunérées notamment par des intérêts ou des loyers et pour les prestations discontinues mais à échéances successives échelonnées sur plusieurs exercices, au fur et à mesure de l'exécution ; (...) ". Aux termes de l'article 3 de la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée, alors en vigueur : " Dans la limite du programme et de l'enveloppe financière prévisionnelle qu'il a arrêtés, le maître de l'ouvrage peut confier à un mandataire, dans les conditions définies par la convention mentionnée à l'article 5, l'exercice, en son nom et pour son compte, de tout ou partie des attributions suivantes de la maîtrise d'ouvrage : / 1° Définition des conditions administratives et techniques selon lesquelles l'ouvrage sera étudié et exécuté ; / 2° Préparation du choix du maître d'oeuvre, signature du contrat de maîtrise d'oeuvre, après approbation du choix du maître d'oeuvre par le maître de l'ouvrage, et gestion du contrat de maîtrise d'oeuvre ; / 3° Approbation des avant-projets et accord sur le projet ; / 4° Préparation du choix de l'entrepreneur, signature du contrat de travaux, après approbation du choix de l'entrepreneur par le maître de l'ouvrage, et gestion du contrat de travaux ; / 5° Versement de la rémunération de la mission de maîtrise d'oeuvre et des travaux ; / 6° Réception de l'ouvrage, / et l'accomplissement de tous actes afférents aux attributions mentionnées ci-dessus. (...) ".
8. La SEMEPA a conclu avec des collectivités territoriales plusieurs conventions de mandats, dont les stipulations sont, selon les écritures des parties, rédigées dans les mêmes termes, et par lesquelles ces collectivités lui ont délégué la maitrise d'ouvrage d'opérations d'équipement, la société agissant pour leur compte et en leur nom. Il ressort en particulier du contrat de mandat relatif à la construction d'une auberge de jeunesse du 12 juillet 1996 dont il est constant que les stipulations sont similaires à celles des autres conventions de mandat conclues par la société, que " la SEMEPA percevra une rémunération s'élevant à 7,5 % HT (TVA en sus) sur le montant des dépenses HT " et que " le règlement de cette rémunération interviendra par acomptes périodiques à l'occasion de chaque demande d'avances, et au prorata des dépenses effectuées par rapport au total prévisionnel des dépenses figurant au bilan prévisionnel ", au vu d'un décompte périodique établi à chaque mise à jour de l'échéancier prévisionnel.
9. La SEMEPA soutient que le produit de cette rémunération doit être rattaché à l'exercice d'achèvement de sa prestation, lors de la remise de l'ouvrage à la collectivité, s'agissant d'une prestation simultanée et continue, certaines tâches, notamment le suivi et la gestion des marchés de maîtrise d'oeuvre, la gestion technique, comptable et financière de l'opération, ainsi que la gestion administrative, étant exécutées sur toute la durée du contrat. Il est toutefois constant que ces rémunérations font l'objet de paiements fractionnés, en fonction de l'avancement des travaux, ce qui constitue un indice en faveur de la qualification de prestation discontinue à échéances successives retenue par l'administration fiscale. Par ailleurs, les dispositions précitées de l'article 3 de la loi du 12 juillet 1985 permettent d'identifier différentes phases dans la mission confiée au mandataire, qui se succèdent ou se recoupent partiellement sur plusieurs exercices, à savoir celle qui se déroule avant l'exécution des travaux, comme la phase d'études ou le choix du maitre d'oeuvre et des entrepreneurs, celle qui recouvre l'exécution des travaux et leur suivi et celle qui intervient après la réalisation des travaux. Aucun élément du dossier ne permet d'établir que les conventions de mandat ici en litige, compte tenu de leurs stipulations, auraient été conçues par les parties comme portant sur des prestations indissociables et s'analysant comme une prestation unique. Dans ces conditions, la SEMEPA doit être regardée comme réalisant des prestations discontinues à échéances successives échelonnées sur plusieurs exercices, imposables au fur et à mesure de leur exécution. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a rattaché les acomptes versés par les collectivités aux résultats des exercices au cours desquels ils ont été perçus.
10. Si la SEMEPA demande, à titre subsidiaire, la prise en compte des résultats déficitaires des conventions de mandat au titre des années d'imposition en litige, elle ne justifie pas, en tout état de cause, des pertes qu'elle allègue.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la SEMEPA est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Marseille, par le jugement attaqué, a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contributions sociales sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007, correspondant aux rectifications afférentes aux rémunérations tirées des convention publiques d'aménagement.
Sur les frais liés à l'instance :
12. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".
13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SEMEPA et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La base d'imposition de la SEMEPA à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sur cet impôt au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007, est réduite à concurrence des rectifications en base afférentes aux rémunérations des conventions d'aménagement.
Article 2 : La SEMEPA est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2005, 2006 et 2007, ainsi que des intérêts de retard correspondants, en conséquence de la réduction en base prononcée à l'article 1er.
Article 3 : Le jugement n° 1401317, 1401320 du tribunal administratif de Marseille du 20 septembre 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à la SEMEPA la somme de 1 500 euros (mille-cinq-cents euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de la SEMEPA est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la Société d'économie mixte d'équipement du Pays d'Aix et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 16 mai 2019, où siégeaient :
- Mme Mosser, présidente,
- Mme Paix, présidente assesseure,
- Mme Courbon, premier conseiller.
Lu en audience publique le 29 mai 2019.
2
N° 17MA04482