Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée le 5 juin 2020 sous le n° 20MA01951, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 3 avril 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 31 octobre 2019 par lequel le préfet du Var a refusé son admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de six mois suivant l'arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son avocat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le préfet du Var a examiné une demande de titre de séjour portant la mention " salarié " et non celle d'un titre portant la mention " vie privée et familiale " ;
- l'arrêté contesté est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle peut bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'arrêté méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît son droit au recours, son exécution l'empêchant d'assister aux audiences dans le cadre de la procédure de divorce en cours ;
- il méconnaît le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- il méconnaît l'article 16 de cette même convention.
Par ordonnance du 3 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 24 novembre 2020.
La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 juillet 2020.
II. Par une requête, enregistrée le 5 juin 2020 sous le n° 20MA01952, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2°) de prononcer le sursis à exécution de ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 3 avril 2020 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement du 3 avril 2020 du tribunal administratif de Toulon a des conséquences difficilement réparables ;
- elle justifie de moyens sérieux en l'état de l'instruction à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de ce jugement et de l'arrêté du 31 octobre 2019 du préfet du Var.
Par ordonnance du 3 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 24 novembre 2020.
La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 juillet 2020.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par une requête enregistrée sous le n° 20MA01951, Mme D..., ressortissante biélorusse née le 29 janvier 1978, fait appel du jugement du 3 avril 2020 par lequel le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 31 octobre 2019 du préfet du Var rejetant sa demande de renouvellement de titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination. Elle demande également à la Cour, par une requête enregistrée sous le n° 20MA01952 de prononcer le sursis à exécution de ce jugement.
2. Les deux requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions de la requête n° 20MA01951 à fin d'annulation :
3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme D..., titulaire d'un visa portant la mention " conjoint de Français " valable à compter du 15 décembre 2018, a déposé le 14 octobre 2019 une demande de renouvellement avec changement de statut afin d'obtenir la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié ". En tout état de cause, les allégations de Mme D... selon lesquelles elle aurait présenté une telle demande à la suite de mauvais conseils des services administratifs ne sont pas établies. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Var n'aurait pas examiné la demande dont il était saisi.
4. En deuxième lieu, il ressort de la motivation de l'arrêté du 31 octobre 2019 que le préfet du Var a procédé à un examen particulier de la demande de titre de séjour présentée par Mme D... et de sa situation au regard du séjour.
5. En troisième lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé. Il en résulte qu'un étranger ne peut pas utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre d'un refus opposé à une demande de titre de séjour qui n'a pas été présentée sur le fondement de cet article.
6. Mme D... a demandé à bénéficier d'un titre de séjour portant la mention " salarié " et le préfet du Var n'a pas examiné à titre gracieux son droit à bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la délivrance d'une carte de séjour temporaire au conjoint étranger victime de violence commise après son arrivée en France. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
8. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... réside habituellement en France depuis le 15 décembre 2018, soit une présence d'une durée de dix mois et demi à la date de l'arrêté contesté. La communauté de vie avec son époux est rompue et son fils, issu d'une précédente union, est biélorusse et ne bénéficie pas d'un droit au séjour en France. Par suite, et nonobstant les efforts d'intégration sociale et professionnelle de Mme D..., l'arrêté contesté n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit donc être écarté.
9. En cinquième lieu, Mme D... a la possibilité d'être représentée pendant la procédure de divorce en cours. Par suite, l'arrêté contesté ne porte pas atteinte au droit au recours effectif dont bénéficie Mme D....
10. En sixième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces dispositions que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
11. Le fils de Mme D... est scolarisé en France dans une classe pour élèves " allophones ". Toutefois, la durée de sa présence habituelle s'élève à dix mois et demi et il a vécu jusqu'à l'âge de seize ans et demi dans son pays d'origine où la vie familiale peut se reconstituer. Le moyen tiré de la méconnaissance du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit donc être écarté.
12. En dernier lieu, aux termes de l'article 16 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " 1. Nul enfant ne fera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes illégales à son honneur et à sa réputation. / 2. L'enfant a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes ". Pour les motifs mentionnés au point 10, l'arrêté n'a pas porté au droit du fils de Mme D... au respect de la vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit donc être écarté.
13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions de la requête n° 20MA01952 :
14. Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 juillet 2020. Par suite, les conclusions de sa requête tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire sont devenues sans objet. Il n'y a donc plus lieu d'y statuer.
15. Le présent arrêt statue sur la demande d'annulation du jugement attaqué. Les conclusions tendant au sursis à exécution de ce jugement n° 1904223 sont ainsi devenues sans objet. Il n'y a donc plus lieu d'y statuer.
Sur les frais liés au litige :
16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante de la présente instance, une somme à verser au conseil de Mme D... ou, en tout état de cause, à elle-même au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 20MA01952 tendant à l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle.
Article 2 : La requête n° 20MA01951 est rejetée.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Toulon du 3 avril 2020 présentées dans la requête n° 20MA01952.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête n° 20MA01952 est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Var.
Délibéré après l'audience du 2 février 2021, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- M. B..., président assesseur,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 février 2021.
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N° 20MA01951, 20MA01952
nc