Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires enregistrés respectivement le 9 avril et le 25 juillet 2020 et le 25 juin 2021, M. A... B..., représenté par Me Hosseini Nassab, dans le dernier état de ses écritures, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 décembre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 20 août 2019 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les articles L. 313-14 et L. 313-11 4° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont méconnus ;
- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est méconnu ;
- l'article L. 611-3 5° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est méconnu ;
- l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant est méconnu.
Par décision du 21 février 2020, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. B....
Par deux mémoires en défense enregistrés le 26 juin 2020 et le 8 juillet 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens du requérant ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 25 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 23 juillet 2021 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Ury,
- et les observations de Me Hosseini Nassab représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain, né le 13 juin 1989 à Ain Sebaa, qui déclare être entré en France le 10 mars 2016, a sollicité le 16 juillet 2019 la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en sa qualité de conjoint de française. M. B... relève appel du jugement du 30 décembre 2019 du tribunal administratif de Montpellier qui rejette sa requête contre l'arrêté du 20 août 2019 par lequel le préfet de l'Hérault lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours.
2. Premièrement, au titre de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...). ". Aux termes de l'article L. 313-2 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle (...) sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1 (...) ".
3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la production d'un visa de long séjour est au nombre des conditions auxquelles est subordonnée la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du même code. Par suite, le préfet n'a pas méconnu ces dispositions en lui refusant le titre sollicité en se fondant sur le défaut de production par M. B... d'un visa de long séjour.
4. Deuxièmement, en vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Pour l'application des stipulations et dispositions précitées, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
5. La légalité d'une décision administrative qui fait l'objet d'un recours pour excès de pouvoir s'apprécie à la date à laquelle elle a été prise. Ainsi, il appartient au préfet d'apprécier si les conditions posées par les dispositions législatives et réglementaires applicables à la délivrance ou au renouvellement d'un titre de séjour sont remplies à la date à laquelle il se prononce sur la demande.
6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... est entré irrégulièrement en France le 10 mars 2016 selon ses déclarations. Il s'est marié le 2 mai 2018 en France avec une ressortissante française. Le requérant soutient que le couple vit maritalement à l'adresse de son épouse depuis la date de leur mariage, qu'ils ont souscrit en juillet 2019 une déclaration des revenus commune et qu'il n'a jamais troublé l'ordre public. Ainsi, à la date de l'arrêté attaqué, le 20 août 2019 la communauté de vie entre les époux était très récente. Si M. B... fait valoir dans ses écritures présentées devant la Cour que de cette union est née le 9 décembre 2020 leur fille, C..., cette circonstance postérieure à la date de la décision litigieuse du 20 août 2019 est sans influence sur sa légalité. Si la présence en France de M. B... ne représente pas une menace à l'ordre public, cette circonstance ne suffit pas à entacher d'irrégularité l'arrêté litigieux. Il est constant que les ascendants ainsi que la fratrie de M. B... vivent aux Maroc, pays où il a vécu jusqu'à l'âge de 30 ans. Ainsi, eu égard aux conditions et à la durée de son séjour en France, M. B... n'est pas fondé à soutenir qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive. Par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté, ainsi que, pour le même motif, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences de la décision sur sa situation personnelle.
7. Troisièmement, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) ".
8. Si M. B... soutient qu'il justifie d'une réelle volonté d'intégration dans la société française et que son épouse dispose d'un revenu d'environ 1 500 euros mensuel, les éléments d'ordre personnel et familial qu'il invoque ne sont pas de nature à établir, compte tenu de ce qui a été dit au point 6, que l'admission au séjour de l'intéressé répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
9. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) / 5° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans (...) ".
10. M. B... soutient qu'il ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès lors qu'il est père d'un enfant français, C..., née le 9 décembre 2020, postérieurement à la date de la décision attaquée. Mais cette circonstance est sans influence sur cette décision à la date à laquelle elle a été prise.
11. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
12. Ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, compte tenu de la naissance postérieure à la décision attaquée de la fille de M. B..., le moyen tiré de ce que l'arrêté litigieux méconnaîtrait les stipulations précitées est sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué.
13. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des frais liés à l'instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Hosseini Nassab et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 7 septembre 2021, où siégeaient :
- M. Badie, président,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Ury, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 septembre 2021.
N° 20MA01606 3