Elles soutiennent que :
- l'avis de la Commission nationale d'aménagement commercial est insuffisamment motivé ;
- le dossier de demande d'autorisation, qui ne comporte qu'une modélisation du bâtiment, est incomplet au regard des exigences de l'article R. 752-7 du code de commerce ;
- le projet n'est pas compatible avec le schéma de cohérence territoriale de la narbonnaise ;
- la décision méconnaît l'objectif d'aménagement du territoire, dès lors que le projet, éloigné du centre-ville, ne s'inscrit pas dans la continuité urbaine de la commune de Sigean, qu'il aura nécessairement un impact négatif sur l'animation de la vie urbaine, et qu'il ne présente pas un caractère novateur ;
- la décision méconnaît l'objectif de développement durable, dès lors que le projet conduira à une augmentation des flux de véhicules, que sa qualité environnementale est très médiocre, alors qu'il se situe au sein du parc naturel régional de la narbonnaise en Méditerranée, de sorte qu'il aurait dû respecter la règlementation technique 2012, qu'il n'a pas recours aux énergies renouvelables, que son insertion paysagère n'a pas été soignée et qu'il sera la source de nuisances pour son environnement proche ;
- l'implantation de ce " drive " dans la zone du Peyrou est contraire à l'objectif d'accueil des commerces de proximité et des services sur des micros centralités défini par l'orientation d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme de Sigean.
Par un mémoire, enregistré le 26 avril 2017, la commune de Sigean, représentée par Me B..., informe la Cour qu'elle s'en remet à la décision qui sera prise.
Par des mémoires, enregistrés le 9 mai 2017 et le 29 décembre 2017, la société Sodilang, représentée par Me C..., demande à la Cour de rejeter la requête de la SCI Du Grand Verger et de la SAS Alexanie et de mettre à leur charge la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le moyen tiré de la méconnaissance du plan local d'urbanisme est irrecevable ;
- les autres moyens soulevés par la SCI Du Grand Verger et la SAS Alexanie ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de commerce ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises ;
- le décret n° 2015-165 du 12 février 2015 relatif à l'aménagement commercial ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus, au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Mastrantuono,
- les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., substituant Me A..., pour la SCI Du Grand Verger et la SAS Alexanie et de Me E..., substituant Me C..., pour la société Sodilang.
Une note en délibéré présentée pour la SCI Du Grand Verger et la SAS Alexanie a été enregistrée le 19 avril 2018.
1. Considérant que, par un arrêté du 7 mars 2017, le maire de la commune de Sigean a délivré à la SAS Sodilang un permis de construire en vue de travaux sur une construction existante située 4, rue du Peyrou, valant autorisation d'exploitation commerciale d'un point permanent de retrait par la clientèle d'achats au détail commandés par voie télématique, organisé pour l'accès en automobile, à l'enseigne " E. Leclerc " ; que la SCI Du Grand Verger et la SAS Alexanie demandent l'annulation de ce permis de construire en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale ;
Sur la légalité du permis de construire tenant lieu d'autorisation d'exploitation commerciale :
En ce qui concerne la procédure suivie devant la Commission nationale d'aménagement commercial :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 752-38 du code du commerce, relatif au recours contre les décisions ou avis des commissions départementales d'aménagement commercial présentées devant la Commission nationale d'aménagement commercial : " (...) L'avis ou la décision est motivé (...) " ;
3. Considérant qu'en relevant que le projet s'implantera dans la zone d'activités du " Peyrou " à Sigean, à 1,4 km du centre-ville, qu'il bénéficiera d'une bonne desserte routière, que les flux de circulation supplémentaires estimés sont très minimes, que le projet, en s'implantant en lieu et place d'une friche commerciale, ne conduira pas à une imperméabilisation supplémentaire et qu'il permettra d'apporter aux consommateurs une offre nouvelle complémentaire à celle existante, la Commission nationale d'aménagement commercial, contrairement à ce qui est soutenu, a suffisamment motivé son avis ;
En ce qui concerne la composition du dossier de la demande d'autorisation :
4. Considérant que les requérantes ne sauraient utilement soutenir que le dossier de demande serait incomplet au regard des dispositions de l'article R. 752-7 du code de commerce, qui n'est applicable qu'aux demandes d'autorisation d'exploitation commerciale portant sur des projets ne nécessitant pas de permis de construire ;
En ce qui concerne l'appréciation portée par la Commission nationale d'aménagement commercial :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I. - L'autorisation d'exploitation commerciale (...) est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale (...) / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. / Les a et b du présent 2° s'appliquent également aux bâtiments existants s'agissant des projets mentionnés au 2° de l'article L. 752-1 (...) " ;
6. Considérant, d'une part, que les requérantes ne sauraient utilement soutenir que le projet méconnaîtrait l'objectif du schéma de cohérence territoriale de la narbonnaise tendant à limiter l'implantation de nouveaux centres commerciaux en dehors des pôles urbains, lequel a seulement pour objet de promouvoir l'implantation des activités commerciales soumises à autorisation au titre de la législation relative à l'urbanisme commercial dans les zones agglomérées et les secteurs bien desservis par les transports en commun ;
7. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des pièces du dossier que le projet, qui a vocation à s'implanter dans des locaux commerciaux délaissés, prendra place au sein d'une zone d'activité au sein de laquelle diverses activités commerciales, dont un supermarché, sont déjà exploitées, située en continuité du tissu urbain de Sigean ; que, par ailleurs, aucun élément au dossier n'établit que la création d'un point permanent de retrait " drive " comportant seulement trois pistes de ravitaillement serait susceptible de nuire à l'animation de la vie urbaine de l'agglomération de Sigean ; que dans ces conditions, la commission nationale a pu estimer, sans erreur d'appréciation, que le projet en litige ne compromet pas l'objectif d'aménagement du territoire ;
8. Considérant, enfin, qu'il ressort des pièces du dossier que le projet en litige, qui prendra place au sein d'un bâtiment existant, aura pour effet, en tout état de cause, d'améliorer son insertion paysagère par la modernisation de la façade principale, la plantation d'arbres et l'engazonnement d'une partie du terrain ; que si la charte du parc naturel régional de la narbonnaise en Méditerranée préconise le développement des zones d'activité " haute qualité environnementale " et l'adoption des démarches " d'approche environnementale de l'urbanisme " pour la requalification des zones d'activité, elle ne saurait avoir pour effet, contrairement à ce qui est soutenu, d'imposer le respect de la réglementation technique 2012 lors de la requalification d'une zone d'activité ; qu'enfin, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que l'implantation du projet, d'ampleur modeste, conduira à une augmentation significative des nuisances au détriment de son environnement proche ; que, dans ces conditions, la commission nationale a pu également estimer, sans erreur d'appréciation, que le projet en cause ne compromet pas l'objectif de développement durable ;
En ce qui concerne la méconnaissance des prescriptions du plan local d'urbanisme :
9. Considérant que les autorisations délivrées en application du code de l'urbanisme et en application du code de commerce relèvent de législations distinctes et sont régies par des procédures indépendantes ; que, dès lors, la SCI Du Grand Verger et la SAS Alexanie ne peuvent invoquer utilement à l'encontre du permis de construire en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale une orientation d'aménagement et de programmation du plan local d'urbanisme de la commune de Sigean ; qu'en tout état de cause, l'orientation en question, qui tend à l'accueil au sein de " micros centralités " des commerces de proximité et de services auxquels, d'ailleurs, un " drive " ne saurait être assimilé, est relatif au seul secteur " Sud Sigean ", dont la zone d'activité du Peyrou ne fait pas partie ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI Du Grand Verger et la SAS Alexanie ne sont pas fondées à demander l'annulation de la décision attaquée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les conclusions présentées par la SCI Du Grand Verger et la SAS Alexanie, parties perdantes, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à leur charge une somme de 2 000 à verser à la société Sodilang sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SCI Du Grand Verger et de la SAS Alexanie est rejetée.
Article 2 : La SCI Du Grand Verger et la SAS Alexanie verseront à la société Sodilang une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Du Grand Verger et la SAS Alexanie, à la commune de Sigean et à la société Sodilang.
Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial.
Délibéré après l'audience du 17 avril 2018, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- Mme Boyer, premier conseiller,
- Mme Mastrantuono, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 mai 2018.
N° 17MA01133 6
nc