Par une requête enregistrée le 17 juillet 2015, M. A...représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 16 juin 2015 du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Gard du 16 janvier 2015 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Gard, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai d'un mois, en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour, sous les mêmes conditions d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté du préfet est insuffisamment motivé ;
- la décision de refus de séjour méconnaît les stipulations de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- cette décision ne respecte pas l'article 6-5 de ce même accord franco-algérien ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il est fondé à se prévaloir des lignes directrices de la circulaire du 28 novembre 2012 ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- cette décision méconnaît l'article 8 et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 19 mai 2016, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Par une décision du 25 avril 2016, M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
A été entendu, au cours de l'audience publique le rapport de Mme Carotenuto.
1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien, relève appel du jugement du 16 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 janvier 2015 par lequel le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;
Sur la décision de refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté critiqué, qui énonce notamment que l'intéressé, dès lors qu'il ne démontre pas son entrée régulière sur le territoire français, ne remplit pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour en qualité de conjoint de français sur le fondement de l'article 6-2 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, comporte les éléments de droit et de fait sur lesquels est fondée la décision portant refus de séjour, conformément aux exigences de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; que le moyen tenant à l'insuffisante motivation de la décision portant refus de séjour doit, en conséquence, être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2) Au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. " ;
4. Considérant qu'il n'est pas contesté que M. A...est entré pour la dernière fois en France sans être muni du visa exigé par la législation en vigueur ; que s'il fait valoir qu'il a bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour en qualité d'étranger malade valable du 14 septembre 2010 au 13 décembre 2010, cette circonstance n'est pas de nature à régulariser son entrée irrégulière sur le territoire français ; qu'ainsi, et alors même que M. A...est marié depuis le 21 septembre 2013 avec Mme D...B..., de nationalité française, il ne remplit pas la condition d'entrée régulière posée par les stipulations précitées du 2 de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour litigieux aurait été pris en méconnaissance de ces stipulations ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. Le certificat de résident d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) Au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;
6. Considérant que M. A...fait valoir qu'il est entré sur le territoire français en 2006, à l'âge de vingt ans, et qu'il s'est marié en septembre 2013, soit seize mois avant la date de la décision contestée, avec MmeB..., de nationalité française ; que toutefois, les pièces produites par le requérant ne sont pas suffisamment nombreuses et probantes pour établir sa présence habituelle sur le territoire français sur l'ensemble de la période concernée, notamment au cours des années 2007 et 2008 ; qu'ainsi, eu égard au caractère récent du mariage dont il se prévaut et alors qu'il a fait l'objet de mesures d'éloignement en 2011 et 2013, M. A...n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour en litige porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le préfet du Gard n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien ni celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que pour les mêmes motifs, et alors même que M. A...a créé une entreprise commerciale au début de l'année 2012, la décision critiquée n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;
8. Considérant que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés ; qu'ainsi, les ressortissants algériens ne peuvent se prévaloir, pour l'obtention d'un titre de séjour, que des dispositions de cet accord ; que, par suite, M. A... ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives à l'admission exceptionnelle au séjour ; qu'en tout état de cause il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard notamment à ce qui a été dit au point 6, que le préfet du Gard aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice du pouvoir de régularisation dont il dispose même sans texte ;
9. Considérant, en dernier lieu, que M. A...ne peut utilement se prévaloir des orientations de la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que le ministre de l'intérieur a adressée aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. Considérant, en premier lieu, qu'il suit de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de séjour qui lui a été opposée le 16 janvier 2015 à l'appui de sa contestation de la mesure d'éloignement dont a été assortie ce refus ;
11. Considérant, en deuxième lieu, que lorsqu'une obligation de quitter le territoire français assortit un refus de séjour, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de mention spécifique ; que le refus de titre de séjour opposé à M. A...étant suffisamment motivé, ainsi qu'il a été dit au point 2, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français ne saurait, par suite, être accueilli ;
12. Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés au point 6, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;
13. Considérant, en dernier lieu, que M. A...ne peut utilement se prévaloir de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'encontre de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ; qu'en tout état de cause, à supposer même qu'il ait entendu contester la décision fixant le pays de destination, il n'établit pas, par la seule production d'un " procès-verbal de menace " daté de 1999, qu'il serait exposé à un risque réel et actuel de traitements contraires aux textes qu'il invoque en cas de retour dans son pays d'origine ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
15. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que demande M. A...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...A..., au ministre de l'intérieur et à Me C...
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Délibéré après l'audience du 31 mai 2016, où siégeaient :
- M. Cherrier, président,
- M. Martin, président-assesseur,
- Mme Carotenuto, premier conseiller.
Lu en audience publique, le17 juin 2016.
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N° 15MA02957
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