Procédure devant la Cour :
I- Par une requête enregistrée le 26 février 2020 sous le numéro n° 20MA0948, Mme A... C..., représentée par Me Ruffel, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier du 17 octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 juillet 2019 par lequel le préfet du département de l'Hérault lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée de quatre mois et l'a astreinte à des mesures de surveillance ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros qui sera versée à Me Ruffel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
Sur la régularité du jugement attaqué :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors que, d'une part, le tribunal, pour rejeter le moyen tiré du défaut de motivation et du défaut d'examen dont est entachée la décision l'obligeant à quitter le territoire français, s'est contenté d'affirmer que la circonstance que ne soit pas mentionnée l'existence d'un troisième enfant né sur le sol français était sans incidence sur la légalité de cette décision et, d'autre part, que le tribunal, pour écarter le moyen tiré de l'erreur de droit dont sont entachées les mesures de surveillance, a affirmé sans le justifier qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que le préfet se soit cru en situation de compétence liée ;
- le jugement attaqué est entaché de contradiction de motifs, en ce qu'il considère que l'absence de délivrance de l'autorisation provisoire de séjour prévue par le dispositif du jugement n° 1902879 du tribunal administratif de Montpellier du 18 juillet 2019 est sans incidence, tout en tenant compte d'une décision de la cour nationale du droit d'asile qui n'est pas mentionnée dans l'arrêté du 30 juillet 2019 ;
- le tribunal n'a pas répondu aux moyens tirés du défaut d'examen et de l'erreur de droit dont est entachée la décision fixant le pays de destination dès lors que le préfet s'est fondé sur la seule décision de rejet de l'office français de protection des réfugiés et apatrides ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont est entachée la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision l'obligeant à quitter le territoire français :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen réel et complet de sa situation et est entachée d'une erreur de droit, le préfet ne l'ayant pas invité à présenter des observations et n'ayant procédé à aucun nouvel examen de sa situation après le jugement n° 1902879 du tribunal administratif de Montpellier du 18 juillet 2019 qui a enjoint au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
- elle méconnaît l'autorité de la chose jugée attachée à ce jugement ;
- elle méconnaît l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale dès lors qu'elle repose sur une obligation de quitter le territoire français elle-même illégale ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen et d'une erreur de droit, le préfet s'étant à tort cru lié par la décision de rejet de l'office de protection des réfugiés et des apatrides ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est illégale dès lors qu'elle repose sur une obligation de quitter le territoire français elle-même illégale ;
- elle est entachée d'une erreur de fait et méconnaît les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet s'étant fondé à tort sur le fait qu'elle se serait maintenue en situation irrégulière sur le territoire après la décision de rejet de sa demande d'asile par l'office français de protection des réfugiés et des apatrides ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant les mesures de surveillance :
- elle a été prise par une autorité incompétente en l'absence de délégation régulière de signature ;
- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'une erreur de droit, dès lors que le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 avril 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'il s'en remet à l'argumentation produite en première instance.
Par une ordonnance du 18 mars 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 30 avril suivant.
II- Par une requête enregistrée le 26 février 2020 sous le numéro n° 20MA0949, Mme B... C..., représenté par Me Ruffel, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier du 17 octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 30 juillet 2019 par lequel le préfet du département de l'Hérault lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour d'une durée de quatre mois et l'a astreint à des mesures de surveillance ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros qui sera versée à Me Ruffel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement attaqué :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé dès lors que, d'une part, le tribunal, pour rejeter le moyen tiré du défaut de motivation et du défaut d'examen dont est entachée la décision l'obligeant à quitter le territoire français, s'est contenté d'affirmer que la circonstance que ne soit pas mentionnée l'existence d'un troisième enfant né sur le sol français était sans incidence sur la légalité de cette décision et, d'autre part, que le tribunal, pour écarter le moyen tiré de l'erreur de droit dont sont entachées les mesures de surveillance, a affirmé sans le justifier qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que le préfet se soit cru en situation de compétence liée ;
- le jugement attaqué est entaché de contradiction de motifs, en ce qu'il considère que l'absence de délivrance de l'autorisation provisoire de séjour prévue par le dispositif du jugement n° 1902879 du tribunal administratif de Montpellier du 18 juillet 2019 est sans incidence, tout en tenant compte d'une décision de la cour nationale du droit d'asile qui n'est pas mentionnée dans l'arrêté du 30 juillet 2019 ;
- le tribunal n'a pas répondu aux moyens tirés du défaut d'examen et de l'erreur de droit dont est entachée la décision fixant le pays de destination dès lors que le préfet s'est fondé sur la seule décision de rejet de l'office français de protection des réfugiés et apatrides ;
- le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont est entachée la décision portant interdiction de retour sur le territoire français.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision l'obligeant à quitter le territoire français :
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen réel et complet de sa situation et est entachée d'une erreur de droit, le préfet ne l'ayant pas invité à présenter des observations et n'ayant procédé à aucun nouvel examen de sa situation après le jugement n° 1902879 du tribunal administratif de Montpellier du 18 juillet 2019 qui a enjoint au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
- elle méconnaît l'autorité de la chose jugée attachée à ce jugement ;
- elle méconnaît l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le jugement attaqué est entaché de contradiction de motifs, en ce qu'il considère que l'absence de délivrance de l'autorisation provisoire de séjour prévue par le dispositif du jugement n° 1902879 du tribunal administratif de Montpellier du 18 juillet 2019 est sans incidence, tout en tenant compte d'une décision de la cour nationale du droit d'asile qui n'est pas mentionnée dans l'arrêté du 30 juillet 2019 ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale dès lors qu'elle repose sur une obligation de quitter le territoire français elle-même illégale ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen et d'une erreur de droit, le préfet s'étant à tort cru lié par la décision de rejet de l'office de protection des réfugiés et des apatrides ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est illégale dès lors qu'elle repose sur une obligation de quitter le territoire français elle-même illégale ;
- elle est entachée d'une erreur de fait et méconnaît les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet s'étant fondé à tort sur le fait qu'elle se serait maintenue en situation irrégulière sur le territoire après la décision de rejet de sa demande d'asile par l'office français de protection des réfugiés et des apatrides ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant les mesures de surveillance :
- elle a été prise par une autorité incompétente en l'absence de délégation régulière de signature ;
- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'une erreur de droit, dès lors que le préfet s'est cru à tort en situation de compétence liée, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 avril 2021, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'il s'en remet à l'argumentation produite en première instance.
Par une ordonnance du 18 mars 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 30 avril suivant.
Par une décision du 13 décembre 2019, M. et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Balaresque a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C..., ressortissants serbes, relèvent appel du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier du 17 octobre 2019 qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation des arrêtés du 30 juillet 2019 par lesquels le préfet de l'Hérault leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement, a prononcé à leur encontre une interdiction de retour d'une durée de quatre mois et les a astreints à des mesures de surveillance.
Sur la jonction :
2. Les requêtes susvisées de M. et Mme C... tendent à l'annulation du même jugement. Elles ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.
Sur la régularité du jugement :
3. En premier lieu, en indiquant, aux points 10 et 12 du jugement attaqué, que les requérants n'établissaient pas, par leurs seules allégations, que le préfet n'aurait pas procédé à un examen sérieux et attentif de leur demande et que la circonstance que le préfet n'ait pas mentionné l'existence de leur troisième enfant né sur le sol français n'était pas constitutive d'un défaut de motivation ni d'un défaut d'examen des dossiers, le tribunal administratif a, au regard de l'argumentation développée par les requérants, suffisamment motivé la réponse à ces moyens tirés du défaut de motivation et du défaut d'examen.
4. En deuxième lieu, si M. et Mme C... soutiennent que le jugement attaqué est entaché d'une contradiction dans ses motifs et doit par suite être annulé, la contradiction de motifs affecte le bien-fondé d'une décision juridictionnelle et non sa régularité.
5. En troisième lieu, en relevant qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que le préfet se soit cru en situation de compétence liée pour prendre les mesures de surveillance contestées, le tribunal a répondu au moyen tiré de l'erreur de droit et suffisamment motivé son jugement.
6. En quatrième lieu, en rappelant qu'il incombe à l'autorité administrative de s'assurer que la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger ne l'expose pas à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales puis, en indiquant, d'une part, que le préfet avait tenu compte des circonstances nouvelles que constituent les décisions de la Cour nationale du droit d'asile du 25 juillet 2019 et, d'autre part, que les requérants n'établissaient pas le défaut d'examen sérieux et attentif de leur demande, le tribunal a suffisamment répondu aux moyens tirés du défaut d'examen et de l'erreur de droit dirigés contre les décisions fixant le pays de destination. Il n'a donc pas omis de statuer sur ces derniers.
7. En cinquième lieu, dans le cadre de l'examen de la légalité des interdictions de retour sur le territoire français, le tribunal a relevé que le préfet avait pris en compte les critères prévus par le III de l'article L. 511 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour prononcer ces interdictions et en fixer la durée. Il a, ce faisant, répondu au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation. Il n'a donc pas omis de statuer sur ce dernier.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :
8. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...)". Aux termes de l'article L. 743-2 de ce code, dans sa rédaction applicable : " (...) le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) 7° L'office a pris une décision de rejet dans les cas prévus au I et au 5° du III de l'article L. 723-2 ; ". Enfin, aux termes de l'article L. 723-2 du même code, dans sa rédaction applicable : " I. - L'office statue en procédure accélérée lorsque : 1° Le demandeur provient d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr en application de l'article L. 722-1 ; (...) ".
9. En premier lieu, il ressort des mentions des arrêtés contestés des 30 juillet 2019 que, d'une part, M. et Mme C..., entrés en France en septembre 2018 selon leurs déclarations, ont présenté le 2 octobre 2018 une demande d'asile, qui a été rejetée le 28 février 2019 par l'office français de protection des réfugiés et apatrides en application du 1° de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la Serbie étant considérée comme un pays d'origine sûr, et que, d'autre part, par un jugement du 18 juillet 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé les arrêtés du 17 mai 2019 par lesquels le préfet de l'Hérault avait précédemment fait obligation à M. et Mme C... de quitter le territoire français et enjoint au préfet de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour au motif que la seule mention de leur qualité de ressortissants serbes ne permettait pas d'identifier le cas de figure prévu par les dispositions de l'article L. 743-2 du code de code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il était fait application. Ainsi, les arrêtés contestés, qui comportent les considérations de droit et de fait sur lesquels ils se fondent, en précisant notamment les dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont ils font application, sont suffisamment motivés.
10. En deuxième lieu, le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas prévu au 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au litige, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise après que la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusée à l'étranger, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du défaut de reconnaissance de cette qualité ou de ce bénéfice. Le droit d'être entendu n'implique alors pas que l'administration ait l'obligation de mettre l'intéressé à même de présenter ses observations de façon spécifique sur la décision l'obligeant à quitter le territoire français, dès lors qu'il a pu être entendu à l'occasion de l'examen de sa demande de reconnaissance de sa qualité de réfugié. Ainsi, le préfet n'était pas tenu de demander aux requérants, dont la demande d'asile a été rejetée par l'office français de protection des réfugiés et des apatrides en application du 1° de l'article L. 723-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de présenter leurs observations de façon spécifique sur les décisions les obligeant à quitter le territoire français.
11. En troisième lieu, la circonstance que les décisions obligeant les requérants à quitter le territoire français ne mentionnent pas leur dernier enfant, né en novembre 2018 sur le territoire français, ne saurait à elle seule révéler un défaut d'examen réel et complet de leur situation personnelle. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et du défaut d'examen doivent être écartés comme manquant en fait.
12. En quatrième lieu, les décisions portant obligation de quitter le territoire français du 30 juillet 2019 qui, ainsi qu'il a été dit, précisent les dispositions de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont elles font application, ne méconnaissent pas l'autorité de la chose jugée par le jugement du 18 juillet 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a annulé les décisions portant obligation de quitter le territoire français du 17 mai 2019 au motif tiré de leur insuffisance de motivation.
13. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 512-4 de ce code, dans sa rédaction applicable : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. (...) ". S'il résulte de ces dispositions que lorsqu'un étranger a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français annulée par le juge de l'excès de pouvoir, il doit être muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait de nouveau examiné sa situation, la méconnaissance de ces dispositions est sans incidence sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français prise après ce nouvel examen. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions ne peut qu'être écarté comme inopérant.
14. En sixième lieu, si les requérants soutiennent que l'obligation de quitter le territoire français qui leur est faite les empêche de finaliser leur recours devant la cour nationale du droit d'asile et est ainsi entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur leur situation personnelle, il ressort toutefois des pièces produites en première instance par le préfet que la cour nationale du droit d'asile a rejeté leur recours par une décision du 25 juillet 2019. Par suite, ce moyen doit, en tout état de cause, être écarté.
15. En septième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. "
16. Les requérants font valoir qu'ils sont entrés en France en septembre 2018 avec leurs trois aînés, qui y sont scolarisés, que leur dernière fille est née en novembre 2018 sur le territoire français et que tous les membres de leur famille ont été contraints de quitter la Serbie et vivent désormais en France. Toutefois, les requérants, qui sont tous deux de nationalité serbe, n'établissent pas, par les éléments qu'ils produisent, d'une part, que leurs enfants ne pourraient poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine et, d'autre part, qu'ils y seraient dépourvus de toute attache familiale. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :
17. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les obligations de quitter le territoire français prises à l'encontre des requérants ne sont pas entachées des illégalités qu'ils allèguent. Dès lors, ils ne sont pas fondés à invoquer leur illégalité par voie d'exception à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions fixant le pays de destination.
18. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier et, en particulier, des mentions de la décision attaquée que le préfet de l'Hérault a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle de M. et Mme C... avant de fixer le pays de destination de la mesure d'éloignement et ne s'est pas cru lié, sur ce point, par la décision de rejet de leur demande d'asile émanant de l'office français de protection des réfugiés et apatrides. Les moyens tirés du défaut d'examen et de l'erreur de droit qu'ils soulèvent sur ce point doivent dès lors être écartés.
19. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version applicable : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné : / 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / (...) / Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à des peines ou des traitements inhumains ". Pour l'application des stipulations et des dispositions précitées, il appartient à l'autorité administrative de s'assurer que la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger ne l'expose pas à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
20. En l'espèce, si les requérants font valoir qu'ils encourent des risques de mauvais traitement en cas de retour en Serbie du fait de leur appartenance à la communauté rom, les éléments qu'ils apportent au soutien de leurs allégations, consistant pour l'essentiel en quelques photos non datées et en des récits faits par leurs proches, également demandeurs d'asile, ainsi qu'en un article de journal relatif aux tensions frontalières entre le Kosovo et la Serbie, ne sont pas de nature à établir la réalité des risques auxquels ils seraient exposés en cas de retour dans leur pays d'origine, alors que l'office de français de protection des réfugiés et des apatrides puis la cour nationale du droit d'asile ont rejeté leur demande d'asile. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations et dispositions précitées doivent être écartées.
En ce qui concerne les interdictions de retour sur le territoire français :
21. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les obligations de quitter le territoire français prises à l'encontre des requérants ne sont pas entachées des illégalités qu'ils allèguent. Dès lors, ils ne sont pas fondés à invoquer leur illégalité par voie d'exception à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions leur interdisant le retour sur le territoire français.
22. En deuxième lieu, aux termes des dispositions du III de l'article L. 511 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français ".
23. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des mentions de la décision attaquée, que le préfet de l'Hérault a procédé à l'examen particulier de la situation personnelle des requérants au regard des critères fixés par les dispositions précitées avant de leur interdire le retour sur le territoire français, en tenant compte en particulier de leur présence récente sur le territoire et de l'absence de liens familiaux préexistants à leur arrivée. Ainsi que l'a relevé le premier juge, les décisions d'interdiction de retour ne sont pas motivées par le maintien irrégulier des requérants sur le territoire français. Les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur de fait qu'ils soulèvent sur ce point doivent dès lors être écartés.
24. En troisième lieu, il ressort également des pièces du dossier que, si M. et Mme C... ne constituent pas une menace pour l'ordre public et n'ont fait l'objet d'aucune mesure d'éloignement, leurs attaches en France sont uniquement constituées de leurs quatre enfants mineurs et de leurs proches, également demandeurs d'asile, arrivés très récemment. En outre, ils ne sont eux-mêmes arrivés sur le territoire français que depuis moins d'un an à la date de l'arrêté attaqué et ils n'apparaissent pas dépourvus de toute attache en Serbie. Enfin, la cour nationale du droit d'asile a rejeté le 25 juillet 2019, soit préalablement aux décisions attaquées, leur recours contre les décisions de l'office de protection des réfugiés et des apatrides rejetant leur demande d'asile. Dans ces conditions, ils ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de l'Hérault aurait commis une erreur d'appréciation en leur interdisant le retour sur le territoire français pour une durée de quatre mois.
En ce qui concerne les obligations de se présenter à la préfecture de l'Hérault une fois par semaine :
25. En premier lieu, par un arrêté n° 2019-I-110 du 7 février 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du même jour, le préfet de l'Hérault a donné délégation à Mme Laure Deroo, conseillère d'administration de l'intérieur et de l'outre-mer, directrice des migrations et de l'intégration, pour signer les décisions litigieuses. Ainsi, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté comme manquant en fait.
26. Aux termes de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel un délai de départ volontaire a été accordé en application du II de l'article L. 511-1 peut, dès la notification de l'obligation de quitter le territoire français, être astreint à se présenter à l'autorité administrative ou aux services de police ou aux unités de gendarmerie pour y indiquer ses diligences dans la préparation de son départ. ".
27. En deuxième lieu, la décision contestée, qui vise l'article L. 513-4 du code précité, est suffisamment motivée, notamment par la motivation afférente aux autres décisions contestées.
28. En troisième lieu, ainsi que l'a relevé le premier juge, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet, qui a procédé à un examen approfondi de la situation personnelle des requérants, se soit cru en situation de compétence liée pour prendre les décisions contestées. Le moyen tiré de l'erreur de droit doit, dès lors, être écarté.
29. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a, par le jugement attaqué, rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de l'Hérault du 30 juillet 2019.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
30. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des arrêtés litigieux, n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par M. et Mme C... ne peuvent être accueillies.
Sur les frais de l'instance :
31. Il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.
32. Les dispositions précitées font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance soit condamné à verser une quelconque somme à l'avocat de M. et Mme C... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme C... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C..., à Mme A... C..., à Me Ruffel et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 20 septembre 2021, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- Mme Balaresque, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 octobre 2021.
N°s 20MA00948 - 20MA00949 3