Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 janvier 2019 et 3 février 2021, la commune de Pignan, représentée par la SCP SVA, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 6 novembre 2018 ;
2°) d'annuler la délibération n° 2017-82 du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Hérault du 20 juin 2017 relative à la contribution de la commune de Pignan pour l'exercice budgétaire 2015 ;
3°) de mettre à la charge du SDIS du Gard la somme 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier dès lors que la clôture d'instruction est intervenue sans qu'un délai de réponse n'ait été accordé à un mémoire communiqué ;
- la compétence incendie appartient à la métropole depuis l'année 2015 ;
- le conseil d'administration n'était plus compétent pour prendre cette délibération en application des dispositions des articles L. 1424-35 et R. 1424-32 du code général des collectivités territoriales ;
- les conseillers ont été insuffisamment informés et le délai de 12 jours n'a pas été respecté ;
- la réunion du conseil d'administration n'a pas été publique ;
- le SDIS a méconnu l'article L. 1424-35, 5ème alinéa du code général des collectivités territoriales ;
- la délibération est illégale en raison de sa rétroactivité et de son absence de publication ;
- la délibération n'est pas devenue exécutoire ;
- le calcul de la contribution est entaché d'erreurs.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2021, le service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Hérault, représenté par la SCP Vinsonneau-Paliès Gauer et Associés, conclut au rejet de la requête, ou à titre subsidiaire à la désignation d'un expert chargé de déterminer les modalités de calcul de la contribution, et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Pignan une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la commune de Pignan ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant la commune de Pignan, et de Me A..., représentant le SDIS de l'Hérault.
Une note en délibéré, présentée par la commune de Pignan, a été enregistrée le 19 février 2021.
Considérant ce qui suit :
1. La commune de Pignan relève appel du jugement du 6 novembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la délibération du 20 juin 2017, par laquelle le conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Hérault a fixé le montant de la contribution financière de la commune de Pignan au titre de l'année 2015.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire est en état d'être jugée, les parties peuvent être informées de la date ou de la période à laquelle il est envisagé de l'appeler à l'audience. Cette information précise alors la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2.... ". Sur le fondement de ces dispositions, le tribunal administratif a fixé, le 3 mai 2018, un calendrier d'instruction, la clôture pouvant intervenir à compter du 1er juin 2018. La commune de Pignan a déposé un mémoire le 31 mai 2018. Le SDIS de l'Hérault a déposé un mémoire le 2 juillet 2018. Ce mémoire a été communiqué à la commune de Pignan le 3 juillet 2018, avec une demande de produire, le cas échéant, des observations " dans les meilleurs délais " et la clôture immédiate a été prononcée le 27 août suivant. En procédant de la sorte le tribunal administratif n'a commis aucune irrégularité dès lors que le délai accordé en l'espèce était suffisant pour permettre à la commune de répondre au mémoire du SDIS.
Sur le fond :
3. Contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la circonstance que la contribution de la commune de Pignan doive être fixée selon les modalités de calcul prévues à l'article R. 1424-32 ne rendait pas superflue la délibération du 20 juin 2017 du conseil d'administration du SDIS fixant la contribution pour l'année 2015.
4. Il y lieu pour la cour de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur la requête de la commune de Pignan.
5. Aux termes de l'article L. 1424-35 du code général des collectivités territoriales : " (...) Les modalités de calcul et de répartition des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour la gestion des services d'incendie et de secours au financement du service départemental d'incendie et de secours sont fixées par le conseil d'administration de celui-ci. (...) Les contributions des communes, des établissements publics de coopération intercommunale et du département au budget du service départemental d'incendie et de secours constituent des dépenses obligatoires. (...) Si aucune délibération n'est prise dans les conditions prévues au troisième alinéa, la contribution de chaque commune et de chaque établissement public de coopération intercommunale est calculée, dans des conditions fixées par décret, en fonction de l'importance de sa population, de son potentiel fiscal par habitant ainsi que de la part de sa contribution dans le total des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale constatée dans le dernier compte administratif connu. ". L'article R. 1424-32 du même code, dans sa rédaction alors applicable, prévoit : " (...) Lorsque, le 1er novembre de l'année précédant l'exercice, aucune délibération du conseil d'administration ne permet de fixer les modalités de calcul des contributions du département, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale, la contribution de ces collectivités et établissements au montant prévisionnel des recettes est répartie dans les conditions suivantes (...) ". En application de ces dispositions, le conseil d'administration a fixé, le 20 juin 2017, la contribution de la commune de Pignan au titre de 2015, dès lors qu'il n'avait pas délibéré avant le 1er novembre précédant l'exercice. Aucun texte, ni aucun principe, ne dessaisit le conseil d'administration de la compétence qu'il tient de ces textes. Le moyen tiré de ce que ce dernier était incompétent en raison du dépassement du délai prévu pour qu'il puisse délibérer ne peut qu'être écarté.
6. La commune de Pignan invoque la méconnaissance des dispositions combinées des articles L. 3241-1 et L. 3312-1 du code général des collectivités territoriales en ce qui concerne le défaut de convocation des membres du conseil d'administration et leur insuffisante information, ainsi que le caractère public de la réunion du conseil d'administration. Toutefois, ces dispositions, en tout état de cause, sont relatives à l'adoption du budget, alors que la délibération attaquée n'a pas cet objet. Le moyen ne peut ainsi qu'être écarté.
7. Contrairement aux affirmations de la commune, il ressort des pièces du dossier que le délai de sept jours, prévu par le règlement intérieur du conseil d'administration, dans lequel ses membres doivent recevoir un rapport sur les affaires a été respecté. Le moyen ne peut qu'être écarté.
8. Le défaut de notification de la délibération, à le supposer avéré, est sans effet sur sa légalité.
9. la contribution financière due au service départemental d'incendie et de secours n'est pas le paiement du prix d'un service dont les communes seraient les usagers, mais une charge qui leur incombe pour le bon fonctionnement d'un service public dont il a la responsabilité en vertu de la loi. Le service pouvait donc réclamer cette contribution après l'année au titre de l'année à laquelle elle est due sans entacher sa décision de rétroactivité illégale.
10. Si la métropole Montpellier Méditerranée Métropole, qui a été créée au 1er janvier 2015, par le décret n° 2014-1605 du 23 décembre 2014, exerce la compétence incendie au titre de ses compétences obligatoires, il résulte de l'instruction que, en application d'une convention conclue sur le fondement de l'article L. 5215-27 du code général des collectivités territoriales et conformément à une délibération du conseil municipal de Pignan du 15 décembre 2014, la commune a conservé la compétence en matière de services d'incendie et de secours jusqu'au 1er janvier 2016. C'est donc à bon droit que le SDIS a réclamé à la commune le montant de sa contribution au titre de l'exercice 2015.
11. Aux termes de l'article L. 1424-35 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable au litige : " La contribution du département au budget du service départemental d'incendie et de secours est fixée, chaque année, par une délibération du conseil général au vu du rapport sur l'évolution des ressources et des charges prévisibles du service au cours de l'année à venir, adopté par le conseil d'administration de celui-ci. / Les relations entre le département et le service départemental d'incendie et de secours et, notamment, la contribution du département, font l'objet d'une convention pluriannuelle. Les modalités de calcul et de répartition des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour la gestion des services d'incendie et de secours au financement du service départemental d'incendie et de secours sont fixées par le conseil d'administration de celui-ci. Le conseil d'administration peut, à cet effet, prendre en compte au profit des communes et des établissements publics de coopération intercommunale la présence dans leur effectif d'agents publics titulaires ou non titulaires ayant la qualité de sapeur-pompier volontaire, la disponibilité qui leur est accordée pendant le temps de travail ou les mesures sociales prises en faveur du volontariat. Le conseil d'administration peut, en outre, prendre en compte la situation des communes et des établissements publics de coopération intercommunale situés dans les zones rurales ou comptant moins de 5 000 habitants. / Les contributions des communes, des établissements publics de coopération intercommunale et du département au budget du service départemental d'incendie et de secours constituent des dépenses obligatoires. / Avant le 1er janvier de l'année en cause, le montant prévisionnel des contributions mentionnées à l'alinéa précédent, arrêté par le conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours, est notifié aux maires et aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale. / Pour les exercices suivant la promulgation de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, le montant global des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale ne pourra excéder le montant global des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale de l'exercice précédent, augmenté de l'indice des prix à la consommation et, le cas échéant, du montant des contributions de transfert à verser par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale sollicitant le rattachement de leurs centres de secours et d'incendie au service départemental.(...) / Si aucune délibération n'est prise dans les conditions prévues au troisième alinéa, la contribution de chaque commune et de chaque établissement public de coopération intercommunale est calculée, dans des conditions fixées par décret, en fonction de l'importance de sa population, de son potentiel fiscal par habitant ainsi que de la part de sa contribution dans le total des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale constatée dans le dernier compte administratif connu. ". Aux termes de l'article R. 1424-32 du même code : " En application du quatrième alinéa de l'article L. 1424-35, lorsque le conseil d'administration n'a pas fixé le montant prévisionnel des recettes du service départemental d'incendie et de secours le 15 octobre de l'année précédant l'exercice, celui-ci est égal, compte tenu, le cas échéant, des opérations de transfert intervenues dans l'année, au montant des contributions de ces collectivités et établissements publics constatées dans le dernier compte administratif connu, corrigé par l'évolution, à cette date, du dernier indice INSEE de la moyenne annuelle des prix à la consommation et augmenté des dépenses liées au glissement vieillesse-technicité. Lorsque, le 1er novembre de l'année précédant l'exercice, aucune délibération du conseil d'administration ne permet de fixer les modalités de calcul des contributions du département, des communes et des établissements publics de coopération intercommunale, la contribution de ces collectivités et établissements au montant prévisionnel des recettes est répartie dans les conditions suivantes : La contribution de chaque commune et de chaque établissement public de coopération intercommunale est égale : a) Pour 80 % de son montant à la part de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale dans le total des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale constaté dans le dernier compte administratif du service départemental d'incendie et de secours, corrigé, le cas échéant, pour tenir compte des opérations de transfert intervenues dans l'année ; b) Pour 20 % de son montant, au produit de la population par l'écart relatif entre le potentiel fiscal moyen par habitant de l'ensemble des communes du même groupe démographique et le potentiel fiscal par habitant de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale (...). ".
12. Si la commune de Pignan soutient que l'indice visé par ces dispositions est l'indice de la dernière année civile connue, les termes mêmes des dispositions précitées mentionnent le dernier indice INSEE de la moyenne annuelle des prix à la consommation connu au 15 octobre de l'année. Elle n'apporte aucun élément permettant d'affirmer que l'indice utilisé par le SDIS de l'Hérault, à savoir celui des mois d'août de l'année précédente au mois d'août de l'année en cours l'aurait été de manière irrégulière. Au demeurant, elle ne donne également aucun élément quant à l'incidence de cet indice sur sa contribution. Le moyen ne peut qu'être écarté.
13. Il ressort des termes mêmes des dispositions de l'article R. 424-32 précité que, pour la part de 80% des montants en cause, seules doivent être prises en compte les contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale constatées dans le dernier compte administratif. La commune de Pignan n'est donc pas fondée à soutenir que les modalités de calcul seraient inexactes, faute d'avoir pris en compte la contribution du département. Pour la même raison, la commune n'est pas fondée à soutenir que le calcul relatif au potentiel fiscal de la commune ou bien au plafonnement de la contribution, aurait dû prendre en compte la contribution du département. La critique relative à la part de 20% de la contribution n'est pas assortie des précisions permettant à la cour d'y statuer. La commune n'est pas davantage fondée à soutenir que le SDIS aurait dû prendre en compte le glissement GVT dès lors que cette prise en compte n'aurait pu qu'avoir pour effet d'augmenter sa part contributive. Si la commune demande " d'annuler " la délibération du 18 décembre 2006, elle n'est en tout état de cause pas fondée à invoquer son illégalité par voie d'exception dès lors que la contribution recalculée de 2007 n'a pas été prise pour son application, quant bien même les montants qui y figuraient pouvaient légalement être pris pour base du calcul, la circonstance qu'elle n'ait pas de caractère exécutoire étant en tout état de cause sans effet sur la légalité du calcul réalisé.
14. Contrairement aux affirmations de la commune de Pignan, le SDIS de l'Hérault a calculé la contribution due au titre de l'année 2007, puis celle de l'année en cause, sur le fondement du dernier compte administratif connu, à savoir celui de l'année 2006.
15. Il résulte toutefois de la combinaison des dispositions précitées de l'article L. 1424-35 du code général des collectivités territoriales et de l'article 1er de la loi du 10 janvier 1991 que, pour les exercices suivant la promulgation de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, le montant prévisionnel des contributions des communes, des établissements publics de coopération intercommunale et du département au budget du service départemental d'incendie et de secours ne peut excéder le montant global des contributions de ces personnes publiques de l'exercice précédent, augmenté de l'indice des prix à la consommation. Aux termes de l'article 1er de la loi 91-32 du 1er janvier 1991 : " A compter du 1er janvier 1992, toute référence à un indice des prix à la consommation pour la détermination d'une prestation, d'une rémunération, d'une dotation ou de tout autre avantage s'entend d'un indice ne prenant pas en compte le prix du tabac ". Il résulte de l'instruction que les contributions en cause ont été calculées en prenant en compte un indice des prix prenant en compte le prix du tabac, en méconnaissance des dispositions précitées, dès lors que ces contributions doivent être regardées comme des " avantages " au sens de ce texte. Il en résulte que la délibération en cause est irrégulière dans cette mesure, et que la contribution due par la commune de Pignan doit donc faire l'objet d'un nouveau calcul, en prenant en compte un indice des prix hors tabac, les autres modalités de calcul demeurant sans changement. Il y a dès lors lieu d'annuler la délibération en cause dans cette mesure.
Sur les frais du litige :
16. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de ne faire droit à aucune des conclusions des parties fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif du 6 novembre 2018 est annulé.
Article 2 : La délibération du 20 juin 2017 est annulée en tant qu'elle procède au calcul de la contribution de la commune de Pignan en fonction d'un indice des prix à la consommation sans en exclure le tabac.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la commune est rejetée.
Article 4 : Les conclusions du SDIS de l'Hérault fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Pignan et au service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de l'Hérault.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 15 février 2021, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. C..., président assesseur,
- M. Merenne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 mars 2021.
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N° 19MA00036