Procédure devant la Cour :
I. Par une première requête et un mémoire complémentaire, enregistrés sous le n° 18MA03329, respectivement les 14 juillet et 14 août 2018, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 29 mars 2018 ;
2°) à titre principal, d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 24 novembre 2017 portant refus d'admission au séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer une carte de séjour à M. A... dans le mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation en France et de prendre une décision dans le mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ladite astreinte courant pendant un délai de trois mois après lequel elle pourra être liquidée et une nouvelle astreinte fixée et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de la renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de renouvellement de titre de séjour est insuffisamment motivée en droit et en fait et méconnait donc les dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;
- cette décision est entachée d'un défaut d'examen complet de la situation personnelle du requérant ;
- elle est également entachée d'une erreur de droit, au regard de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif que sa demande s'analysait en réalité en changement de statut, de travailleur temporaire en salarié et par suite également d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision en litige méconnait les termes de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ceux de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;
- en refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à 30 jours, le préfet aurait dû motiver sa décision ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- cette décision méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juillet 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- M. A... a déposé une demande de renouvellement et non une demande de changement de statut ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
II. Par une deuxième requête et un mémoire complémentaire, enregistrés sous le n° 18MA03331, respectivement les 16 juillet et 14 août 2018, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à l'exécution de ce jugement attaqué ;
2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer une carte de séjour temporaire à M. A... dans le mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que l'exécution du jugement attaqué risque d'entraîner pour lui des conséquences difficilement réparables et reprend les moyens développés dans sa requête au fond.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 20 juin 2018.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc relatif aux échanges de jeunes professionnels, signé à Rabat le 24 mai 2001 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pecchioli a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant marocain, né le 28 février 1989, est arrivé en France le 30 novembre 2014 à l'âge de vingt-cinq ans sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa " jeune professionnel " dans le cadre du dispositif prévu par l'accord signé le 24 mai 2001 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume du Maroc relatif aux échanges de jeunes professionnels. L'autorisation de travail prévue par cet accord a été délivrée le 13 octobre 2014 pour une durée de douze mois par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) des Bouches-du-Rhône, valant titre de séjour revêtu de la mention " travailleur temporaire ". Ce titre de séjour a été renouvelé, à la suite d'une seconde autorisation de la DIRECCTE en date du 25 septembre 2015, pour une durée de six mois, puis jusqu'au 17 février 2017.
2. Par un arrêté en date du 24 novembre 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas fait droit à sa nouvelle demande de titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, faisant suite à l'avis défavorable de la DIRECCTE en date du 30 mai 2017 laquelle soulignait que M. A... n'avait pas respecté l'article 7 de l'accord franco-marocain faisant obligation au " jeune professionnel " de quitter la France au bout des dix-huit mois que dure son contrat.
3. Par jugement du 29 mars 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. A..., de nationalité marocaine, tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 24 novembre 2017. M. A... relève appel de ce jugement.
Sur la jonction :
4. Les requêtes susvisées, n° 18MA03329 et n° 18MA03331, sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la requête n° 18MA03329 :
5. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des mentions de la décision de refus de titre de séjour opposée à M. A... que celui-ci était, à la date de sa demande de renouvellement du titre de séjour avec changement de statut en " salarié ", en possession d'une carte de séjour portant la mention " travailleur temporaire ", qui avait été renouvelée et qu'il avait sollicitée le 13 janvier 2017. En dépit de la mention " renouvellement en qualité de travailleur temporaire " apparaissant dans le cadre " nature de la demande " rempli par un agent de la préfecture, un changement de statut en qualité de salarié a été sollicité ainsi que cela ressort du courrier du directeur général adjoint responsable de l'unité départementale des Bouches-du-Rhône au préfet des Bouches-du-Rhône du 30 mai 2017 et du projet de contrat à durée indéterminée en date du 26 juillet 2016 produit aux débats.
6. Toutefois, la décision de refus de titre de séjour en litige qui lui a été opposée mentionne, en tout état de cause, que l'intéressé n'a pas respecté le protocole signé entre les deux Etats lequel " implique que l'intéressé s'engage à ne pas prolonger son séjour dans le pays d'accueil au-delà de la période autorisée ". Par cette réponse, le préfet a répondu implicitement mais nécessairement à la fois sur la question du renouvellement du titre de séjour en qualité de " jeune professionnel ", lequel est arrivé à son terme, et sur la question du changement de statut où il ne pouvait, dans ces conditions, pas obtenir satisfaction.
7. Les autres moyens de la requête de M. A..., qui ne comportent aucun développement nouveau, à l'encontre, d'une part, de la décision portant refus de titre et tirés de l'insuffisance de motivation en fait et au regard des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, du défaut d'examen complet de la situation personnelle du requérant, de l'erreur manifeste d'appréciation, de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, d'autre part, de la décision portant obligation de quitter le territoire français tirés de l'absence de motivation du refus d'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours, de l'illégalité de cette décision par exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'existence d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle doivent être écartés pour les motifs retenus par les premiers juges, qu'il y a lieu d'adopter.
8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du 24 novembre 2017. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et d'injonction ne peuvent être que rejetées.
Sur la requête n° 18MA03331 :
9. La Cour statuant par le présent arrêt sur les conclusions de la requête de M. A... tendant à l'annulation du jugement attaqué, les conclusions de sa requête n° 18MA03331 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce jugement sont privées d'objet. Il n'y a pas lieu, par suite, d'y statuer.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 18MA03331.
Article 2 : La requête n° 18MA03329 de M. A... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me C... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2018, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- M. Pecchioli, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 décembre 2018.
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N° 18MA03329 - 18MA03331