Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 mai 2015 et le 24 novembre 2016, la SCI la Cigalière et autres, représentés par MeE..., demandent à la Cour :
1°) de surseoir à statuer jusqu'à ce que le Conseil d'Etat, saisi d'un pourvoi à l'encontre de l'arrêt de la Cour de céans du 26 septembre 2014, rende sa décision ;
2°) d'annuler ce jugement du 20 mars 2015 du tribunal administratif de Nice ;
3°) de rejeter la demande présentée par la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon devant le tribunal administratif ;
4°) de mettre à la charge de la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon la somme de 1 500 euros à verser à chacun des requérants.
Ils soutiennent que :
- le tribunal administratif a soulevé d'office et sans débat contradictoire le moyen tiré de l'autorité de chose jugée s'attachant à l'arrêt de la Cour du 26 septembre 2014 ainsi que le moyen tiré de l'intérêt des parcelles à être incluses dans le périmètre syndical ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a apprécié la légalité de la délibération du 16 août 2011 au regard de l'arrêt de la Cour du 26 septembre 2014 ;
- leurs propriétés n'ont définitivement aucun intérêt à être incluses dans le périmètre syndical.
Un mémoire produit par l'ASA, observateur, représentée par MeD..., a été enregistré le 9 décembre 2016.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 27 décembre 2016 et le 11 avril 2018, la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de mettre à la charge solidaire des parties perdantes la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le moyen tiré de l'absence de fondement à la demande de distraction des parcelles n'a pas été soulevé d'office par le tribunal ;
- il n'existe aucune base statutaire permettant au président de l'ASA de convoquer les propriétaires à une assemblée générale extraordinaire ;
- le défaut de mise en conformité des statuts au-delà du délai de deux ans entraîne la nullité des dispositions statutaires non conformes aux règles nouvelles ;
- les dispositions de l'article 17 et de l'article 19 du décret du 3 mai 2006 ont été méconnues ;
- lors de l'assemblée générale, le mandataire de certaines sociétés propriétaires n'était ni membre de l'association ni fermier ni locataire ni métayer ni régisseur d'un associé, en méconnaissance de l'article 25 du décret de 1927 ;
- le texte des délibérations adoptées et la feuille de présence n'ont pas été annexés au procès-verbal ;
- les parcelles concernées ont encore un intérêt à faire partie de l'ASA, qui a notamment pour objet de mettre en valeur le bord de mer et les plages ;
- la délibération méconnaît l'article 38 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 qui prévoit que les propriétaires des fonds distraits restent redevables de la quote-part des emprunts contractés par l'association durant leur adhésion jusqu'au remboursement intégral de ceux-ci et de toutes les dettes contractées.
Par des mémoires, enregistrés le 20 mars 2018 et le 3 mai 2018, la SCI la Cigalière et autres concluent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens, demandent que la Cour surseoit à statuer jusqu'à l'arrêt de la Cour à intervenir suite à l'annulation par le Conseil d'Etat de l'arrêt du 26 septembre 2014 et soutiennent en outre que :
- la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon ne rapporte pas la preuve des illégalités externes dont elle se prévaut ;
- en tout état de cause, ces irrégularités n'ont pu exercer une influence sur le sens de la délibération ;
- l'intérêt à demeurer dans le périmètre syndical s'apprécie du point de vue de l'immeuble dont la distraction est sollicitée et non pas au regard de l'intérêt des autres immeubles ;
- les parcelles dont ils sont propriétaires n'ont pas d'intérêt à rester incluses dans le périmètre syndical, y compris au regard de la mission de l'ASA ayant trait à la mise en valeur du bord de mer ;
- l'ASA n'a contracté aucun emprunt et les propriétés concernées par la distraction ne sont grevées d'aucune servitude.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 ;
- le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duran-Gottschalk, rapporteure,
- les conclusions de M. Revert, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SCI la Cigalière, M. et MmeB..., M. et MmeC..., la SCI la Rose des vents, la SCI Chemin de la mer, la société Brown Hills LTD et la société Mitra holding relèvent appel du jugement du 20 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé les délibérations en date du 16 août 2011 par lesquelles l'assemblée générale des propriétaires membres de l'association syndicale autorisée (ASA) de Miramar d'Estérel - L'Esquillon a décidé de la distraction du périmètre de ladite ASA des parcelles cadastrées section A n° 2530, n° 2367, n° 2370, n° 2404, n° 2529, n° 2368, n° 2369, n° 2505, n° 1129, n° 2400, n° 2402, n° 2406, n° 1644, n° 1645 et n° 1647.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :
2. Le tribunal administratif a jugé que les propriétaires de la zone 3 bis n'établissaient pas que leurs parcelles n'avaient plus aucun intérêt définitif à faire partie du périmètre de l'ASA eu égard à l'installation par cette association d'une borne incendie et d'une aire de retournement prévue à l'extrémité de l'avenue du groupe naval d'assaut qui permettraient d'atteindre, en cas d'incendie, les propriétés de la zone 3 bis.
3. Aux termes de l'article 38 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 : " L'immeuble qui, pour quelque cause que ce soit, n'a plus de façon définitive d'intérêt à être compris dans le périmètre de l'association syndicale autorisée peut en être distrait (...) ". Une telle perte d'intérêt, qui peut résulter de l'action du propriétaire comme d'une cause étrangère à celui-ci, doit s'apprécier au regard de la nature du terrain et de sa destination, indépendamment de la qualité de celui qui en a la propriété au moment où la distraction est demandée.
4. En vertu des statuts de l'ASA des zones 3, 3 bis et 4 du lotissement Miramar d'Estérel-l'Esquillon, cette dernière a pour objet conformément au cahier des charges, l'entretien des biens communs, constituant des éléments d'équipements et compris dans son périmètre, notamment voies, espaces verts, canalisations, réseaux et éclairement publics, ouvrage ou constructions nécessaires au fonctionnement des réseaux.
5. L'ASA soutient que les parcelles dont la distraction a été décidée ont un intérêt à être incluses dans le périmètre syndical au regard des prescriptions du plan de prévention des risques d'incendie (PPRI), consistant notamment en l'installation d'une borne incendie et d'une aire de retournement prévue à l'extrémité de l'avenue du groupe naval Dassaut. Il résulte cependant de l'instruction et notamment d'un courrier du service départemental d'incendie et de secours que l'accès à la parcelle 2370, située dans le lot n° 3 bis en zone b1 du PPRI et en limite du lot n° 3, se fait par le domaine du port de la Galère et l'avenue de la Boussole et que cette propriété est défendue par un poteau d'incendie à 200 mètres et une prise accessoire située à 20 mètres avenue de la Boussole. La société La Cigalière fait également valoir sans être contredite qu'il est impossible pour les services de lutte contre l'incendie d'accéder, à partir de la zone 3, à sa propriété en raison de l'absence de toute voie d'accès, de la topographie très escarpée et rocailleuse des terrains, de la présence de constructions sur la propriété de la SCI Papi, située à l'extrémité de l'impasse du groupe naval Dassaut et de l'éloignement de la borne incendie créée dans la zone 3, devant les propriétés Legoff et Bisson. Il ne résulte pas non plus de l'instruction que les travaux de défense contre l'incendie entrepris par l'ASA profiteraient aux parcelles des autres requérants, encore plus éloignées de la zone 3.
6. Si la société Hôtel Tour de l'Esquillon soutient enfin que l'ASA a également pour objet la " sauvegarde et la mise en valeur du site ", et que la parcelle 323, réservée pour l'accès à la mer, constitue une partie commune du lotissement devant permettre aux co-lotis d'accéder à une calanque, les requérants soutiennent sans être contredits que cette parcelle est située en zone 3 qui n'est pas accessible aux propriétaires de la zone 3 bis parce qu'il n'y a aucune voie de communication entre les deux zones et que l'accès à la zone 3 est fermé par un portail.
7. Les parcelles dont la distraction a été décidée n'ont ainsi plus d'intérêt à rester incluses dans le périmètre syndical. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif a annulé les délibérations contestées au motif que l'inclusion de ces parcelles dans le périmètre de l'ASA conservait un intérêt.
8. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon devant le tribunal administratif de Nice.
En ce qui concerne les autres moyens soulevés par la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon :
9. En premier lieu, aux termes de l'article 5 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 : " Les associations syndicales de propriétaires peuvent agir en justice, acquérir, vendre, échanger, transiger, emprunter et hypothéquer sous réserve de l'accomplissement des formalités de publicité prévues selon le cas aux articles 8, 15 ou 43 ". L'article 23 de l'ordonnance précitée dispose : " Le président prépare et exécute les délibérations de l'assemblée des propriétaires et du syndicat. Il en convoque et préside les réunions. / Il est le chef des services de l'association et son représentant légal. Il en est l'ordonnateur ". Aux termes de l'article 60 de cette même ordonnance, dans sa version en vigueur alors : " I. - Les associations syndicales de propriétaires constituées en vertu des lois des 12 et 20 août 1790, 14 floréal an XI, 16 septembre 1807, 21 juin 1865 et 8 avril 1898 sont régies par les dispositions de la présente ordonnance. / Toutefois, leurs statuts en vigueur à la date de publication de la présente ordonnance demeurent.applicables jusqu'à leur mise en conformité avec les dispositions de celle-ci Cette mise en conformité doit intervenir dans un délai de deux ans à compter de la publication du décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 62. A l'exception de celle des associations syndicales libres, la mise en conformité est approuvée par un acte de l'autorité administrative ou, à défaut d'approbation, et après mise en demeure adressée au président de l'association et restée sans effet à l'expiration d'un délai de trois mois, l'autorité administrative procède d'office aux modifications statutaires nécessaires (...) ". Aux termes de l'article 102 du décret du 3 mai 2006 : " La mise en conformité des statuts des associations syndicales autorisées, des associations syndicales constituées d'office et de leurs unions prescrite à l'article 60 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 susvisée est adoptée, sur proposition du syndicat, par l'assemblée des propriétaires ou l'assemblée des associations selon l'une des modalités de consultation prévues à l'article 12 et dans les conditions prévues aux articles 19 et 20. / L'arrêté préfectoral approuvant cette mise en conformité fait l'objet des mesures de publicité et de notification prévues à l'article 13 ". Il résulte de ces dispositions que les décisions des associations syndicales de propriétaires constituées en vertu des lois des 12 et 20 août 1790, 14 floréal an XI, 16 septembre 1807, 21 juin 1865 et 8 avril 1898 ont été soumises aux nouvelles règles prévues par l'ordonnance du 1er juillet 2004 et le décret du 3 mai 2006 dès l'entrée en vigueur de ce décret, sauf pour celles de ces règles qui nécessitent au préalable une mise en conformité de leurs statuts.
10. Par un jugement du 1er juillet 2011, devenu définitif, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 4 juin 2009 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a modifié d'office les statuts de l'ASA des copropriétaires des zones 3, 3bis et 4 du lotissement de Miramar de L'Estérel-l'Esquillon, pour les mettre en conformité avec les dispositions de l'ordonnance du 1er juillet 2004. Toutefois, en l'absence de disposition expresse, le défaut de mise en conformité dans le délai prévu par l'article 60 précité de l'ordonnance du 1er juillet 2004 n'est pas sanctionné par la nullité de l'ASA qui conserve son existence légale et sa personnalité morale. Ainsi, l'absence de mise en conformité des statuts de l'ASA qui en a résulté n'a pas eu pour effet de priver de base légale le fonctionnement de l'association.
11. En deuxième lieu, en se bornant à soutenir sans aucune autre précision que les dispositions de l'article 17 du décret du 3 mai 2006, aux termes desquelles " A partir de l'état nominatif des propriétaires prévu à l'article 4 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 susvisée, le président de l'association dresse la liste des membres de l'assemblée des propriétaires d'après les règles fixées dans les statuts. La liste est déposée pendant quinze jours au siège de l'association avant chaque réunion ou consultation écrite de l'assemblée des propriétaires. L'annonce de ce dépôt est affichée dans chacune des communes sur le territoire desquelles s'étend le périmètre de l'association " ont été méconnues, la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon n'assortit pas le moyen d'éléments suffisamment précis permettant d'en apprécier le bien-fondé.
12. En troisième lieu, si le préfet et l'exécutif des communes intéressées n'ont pas été avisés de la réunion dans un délai de quinze jours ni de ce qu'ils pouvaient y assister ou s'y faire représenter, en méconnaissance des dispositions de l'article 19 du même décret, cette méconnaissance n'est pas de nature à rendre irrégulière les délibérations, ces autorités n'ayant pas voix délibérative et cette formalité n'ayant qu'une visée informative. Il ne ressort en outre pas des pièces du dossier que le président de l'assemblée n'aurait pas vérifié la régularité des mandats donnés par les membres de l'assemblée au plus tard au début de chaque séance, ainsi que le prescrit ce même article 19.
13. En quatrième lieu, si la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon soutient, toujours sur le fondement de l'article 19 du décret du 3 mai 2006, qu'un des propriétaires aurait reçu un nombre de pouvoirs supérieur au cinquième des membres en exercice de l'assemblée des propriétaires, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'en a obtenu que trois, soit moins d'un cinquième.
14. En cinquième lieu, la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon ne peut utilement se prévaloir de l'article 25 du décret de 1927, abrogé par l'ordonnance du 1er juillet 2004 et le décret du 3 mai 2006.
15. En sixième lieu, l'absence d'annexion au procès-verbal du texte des délibérations et de la feuille de présence est sans incidence sur la régularité de l'adoption des délibérations.
16. En septième et dernier lieu, l'article 38 de l'ordonnance du 1er juillet 2004 prévoit que les propriétaires des fonds distraits restent redevables de la quote-part des emprunts contractés par l'association durant leur adhésion jusqu'au remboursement intégral de ceux-ci et de toutes les dettes contractées. Si la société Hôtel Tour de l'Esquillon soutient que les délibérations contestées ont été prises en méconnaissance de ces dispositions, elle ne soutient ni même n'allègue que l'ASA aurait contracté un emprunt.
17. Il résulte de tout ce qui précède que la SCI la Cigalière et autres sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé les délibérations du 16 août 2011. Ce jugement doit par suite être annulé, sans qu'il soit besoin de statuer sur sa régularité, ni de surseoir à statuer jusqu'à l'intervention, après renvoi du Conseil d'Etat, de l'arrêt de la Cour, laquelle a rendu un arrêt le 31 mai 2018, et la demande présentée par la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon devant le tribunal administratif de Nice rejetée.
Sur les frais liés au litige :
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge des requérants, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, le versement d'une somme à la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée par les requérants au titre des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 20 mars 2015 du tribunal administratif de Nice est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon devant le tribunal administratif de Nice est rejetée.
Article 3 : Les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la SCI Chemin de la mer, la société Brown Hills LTD, M. et MmeC..., la SCI la Cigalière, la SCI la Rose des vents, M. et MmeB..., la société Mitra holding et la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Chemin de la mer, à la société Brown Hills LTD, à M. et MmeC..., à la SCI la Cigalière, à la SCI la Rose des vents, à M. et MmeB..., à la société Mitra holding, à la SIC Hôtel Tour de l'Esquillon.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes et à l'association syndicale autorisée de Miramar d'Estérel-L'Esquillon.
Délibéré après l'audience du 3 décembre 2018, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- M. Marcovici, président assesseur,
- Mme Duran-Gottschalk, première conseillère.
Lu en audience publique, le 17 décembre 2018.
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N° 15MA02193