Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 mars 2020, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 17 avril 2019 du préfet de l'Hérault ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dès la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, sur le fondement de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros à Me B... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'erreur de fait en ce qu'elle retient le 26 janvier 2018 comme date d'entrée sur le territoire ;
- cette décision est entachée d'erreur de droit car le préfet a estimé que la circonstance qu'il vit en concubinage avec sa compagne exclut la reconnaissance d'une vie privée et familiale ;
- le préfet a méconnu le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision viole les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur de droit car, étant marié à une française, il peut obtenir un titre de séjour de plein droit en vertu du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 26 juin 2020, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 décembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. E... C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Entré pour la première fois en France le 13 février 2016 selon ses déclarations, M. A..., né le 8 août 1959 et de nationalité canadienne, a demandé le 4 septembre 2018 l'octroi d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° et du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 17 avril 2019, le préfet de l'Hérault a rejeté cette demande et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
2. Si l'arrêté attaqué indique que le requérant " présente un passeport sur lequel figure un tampon transfrontière d'entrée le 26 janvier 2018, démontrant ainsi une entrée postérieure à la date d'entrée ", il ressort des autres mentions de l'acte, relatives notamment à l'absence de présence durable et stable sur le territoire national, que le préfet de l'Hérault n'a pas entendu opposer au requérant l'absence de tout séjour en France avant le 26 janvier 2018 mais se fonder sur une absence de continuité du séjour avant cette date. A cet égard, si M. A... est entré en France le 13 février 2016, ainsi que l'atteste le billet d'avion qu'il a acquis à cette fin, ce même document mentionne un retour vers le Canada le 10 mai 2016. Par ailleurs, il ne ressort pas des autres pièces du dossier, qui se limitent à des factures téléphoniques et à divers documents administratifs concentrés pour l'essentiel entre juin 2017 et mars 2018, que l'intéressé ait résidé de manière stable en France entre février 2016 et avril 2019 comme il le soutient. Le moyen d'erreur de fait soulevé par M. A... ne peut donc être accueilli.
3. Les motifs de l'acte se bornent à indiquer que la seule circonstance que M. A... réside en concubinage avec sa compagne de nationalité française ne caractérise pas, à elle seule, une situation ouvrant droit au séjour. Il s'ensuit que le préfet n'a pas considéré que la pratique du concubinage excluait l'octroi d'un titre de séjour, de telle sorte que le moyen d'erreur de droit soulevé par le requérant doit être écarté.
4. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui .".
5. Ainsi qu'il vient d'être dit, M. A..., qui dit résider en France depuis le mois de février 2016, n'établit pas la continuité de son séjour sur le territoire français depuis cette date, ni l'installation du centre de ses intérêts privés et familiaux avant le début de l'année 2018. Par ailleurs, alors que le préfet remet en cause dans son arrêté l'existence d'une communauté de vie stable du requérant avec sa compagne, M. A..., qui se borne à produire un extrait d'une page de site internet le décrivant comme " ami " de celle-ci, deux attestations de communauté de vie, une attestation d'hébergement rédigée par sa compagne, des relevés d'appels téléphoniques couvrant une période de six mois environ et quelques pièces attestant de leur domiciliation commune, n'établit pas l'existence de cette communauté de vie avant l'été 2017, soit environ deux ans à la date de l'arrêté attaqué. Eu égard à la durée de cette relation et à la circonstance que le couple, qui ne s'est marié que postérieurement à la décision attaquée, n'a pas d'enfant, M. A..., qui a vécu l'essentiel de sa vie au Canada jusqu'à l'âge de cinquante-neuf ans au moins et n'y apparaît pas dépourvu de toute attache privée ou familiale, n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour attaquée aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, et ce alors même que plusieurs des membres de sa famille sont de nationalité française. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions et stipulations ci-dessus reproduites doit être écarté.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
6. Aux termes des stipulations de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français. ".
7. Il ressort des pièces du dossier que le requérant et sa compagne se sont mariés le 19 septembre 2019, soit postérieurement à l'arrêté attaqué. Il en résulte que M. A... ne remplissait pas les conditions posées par ces dispositions pour bénéficier de plein droit d'un titre de séjour. Il n'est par suite pas fondé à soutenir que le préfet de l'Hérault a commis une erreur de droit en l'obligeant à quitter le territoire français.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent qu'être également rejetées.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique s'opposent à ce que la somme réclamée par Me B... sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 5 octobre 2020, où siégeaient :
- M. Guy Fédou, président,
- Mme F... G..., présidente assesseure,
- M. E... C..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 octobre 2020.
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N° 20MA01081
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