Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 30 mars 2018, le centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer, représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société Ambulances des Iles d'Or devant le tribunal administratif de Toulon ;
3°) de mettre à la charge de la société Ambulances des Iles d'Or la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision rejetant la demande indemnitaire de la requérante est suffisamment motivée ;
- la convention nationale des transporteurs sanitaires privés signée le 26 décembre 2002 ne prévoit pas le règlement des déplacements sans transport de patient effectués pour le compte du service d'aide médicale urgente ;
- le service assuré par les transporteurs sanitaires pour le compte du service d'aide médicale urgente ne repose ni sur un contrat ni sur un quasi-contrat ;
- l'établissement ne s'est pas enrichi et l'enrichissement sans cause n'est dès lors pas caractérisé.
Par un mémoire en défense enregistré le 31 mai 2018, la société Ambulances des Iles d'Or conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge du centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par le centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer sont infondés.
Par ordonnance du 8 novembre 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 22 novembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- la convention nationale des transporteurs sanitaires privés prévue à l'article L. 322-5-2 du code de la sécurité sociale ;
- l'avenant n° 1 à la convention nationale des transporteurs sanitaires privés relatif à la garde ambulancière ;
- l'arrêté du 23 juillet 2003 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C... Grimaud, rapporteur,
- les conclusions de M. A... Thiele, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant le centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer.
Considérant ce qui suit :
1. La société Ambulances des Iles d'or a demandé le 9 mars 2015 au centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer le paiement de factures correspondant à des prestations de déplacement sans transport de patient effectuées entre le 3 juin 2013 et le 24 avril 2014, à la demande du centre de réception et de régulation des appels installé au sein des services d'aide médicale urgente. Par décision du 23 mars 2015, le directeur du centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer a rejeté cette demande.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 6311-1 du code de la santé publique : " L'aide médicale urgente a pour objet, en relation notamment avec les dispositifs communaux et départementaux d'organisation des secours, de faire assurer aux malades, blessés et parturientes, en quelque endroit qu'ils se trouvent, les soins d'urgence appropriés à leur état ". En vertu de l'article L. 6311-2 du même code : " Seuls les établissements de santé peuvent être autorisés, (...) à comporter une ou plusieurs unités participant au service d'aide médicale urgente, dont les missions et l'organisation sont fixées par voie réglementaire. / Un centre de réception et de régulation des appels est installé dans les services d'aide médicale urgente. Ce centre peut être commun à plusieurs services concourant à l'aide médicale urgente. / (...) Les services d'aide médicale urgente et les services concourant à l'aide médicale urgente sont tenus d'assurer le transport des patients pris en charge dans le plus proche des établissements offrant des moyens disponibles adaptés à leur état, sous réserve du respect du libre choix ".
3. En deuxième lieu, en vertu des dispositions de l'article L. 6312-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable au litige : " Constitue un transport sanitaire, tout transport d'une personne malade, blessée ou parturiente, pour des raisons de soins ou de diagnostic, sur prescription médicale ou en cas d'urgence médicale, effectué à l'aide de moyens de transports terrestres, aériens ou maritimes, spécialement adaptés à cet effet. (...) ". En vertu de l'article L. 6312-5 du même code : " Sont déterminées par décret en Conseil d'Etat : / -les conditions d'agrément de toute personne effectuant un transport sanitaire prévu à l'article L. 6312-2 ; / (...) -les obligations de ces personnes à l'égard du service de garde organisé par l'agence régionale de santé et à l'égard des centres de réception et de régulation des appels mentionnés à l'article L. 6112-5 ; / -les conditions dans lesquelles l'agence régionale de santé organise la garde départementale assurant la permanence du transport sanitaire ". En vertu de l'article R. 6312-11 du code de la santé publique : " L'agrément est délivré pour l'accomplissement des transports sanitaires des malades, blessés ou parturientes effectués : / 1° Dans tous les cas, au titre de l'aide médicale urgente ; / 2° Au surplus, le cas échéant, aux transports effectués sur prescription médicale ". Aux termes des dispositions de l'article R. 6312-19 du même code : " Les entreprises de transports sanitaires agréées pour l'accomplissement des transports mentionnés aux 1° et 2° de l'article R. 6312-11 sont tenues de participer à la garde départementale en fonction de leurs moyens matériels et humains. (...) ". L'article R. 6312-23 du même code dispose quant à lui : " Pendant la garde, toutes les demandes de transports sanitaires urgents sont adressées au service d'aide médicale urgente. / Les entreprises de transports sanitaires mentionnées au tableau de garde, pendant la durée de celle-ci : / 1° Répondent aux appels du service d'aide médicale urgente ; / 2° Mobilisent un équipage et un véhicule dont l'activité est réservée aux seuls transports demandés par le service d'aide médicale urgente ; / 3° Assurent les transports demandés par le service d'aide médicale urgente dans les délais fixés par celui-ci ; / 4° Informent le centre de réception et de régulation des appels médicaux du service d'aide médicale urgente de leur départ en mission et de l'achèvement de celle-ci ". Aux termes des dispositions de l'article 1er de l'arrêté du 23 juillet 2003 fixant les périodes de la garde départementale assurant la permanence du transport sanitaire : " La garde s'effectue les samedi, dimanche, jours fériés ainsi que la nuit de 20 heures à 8 heures du matin ".
4. En troisième lieu, les stipulations du 2 de l'article 2 de l'avenant n° 1 à la convention nationale des transporteurs privés, approuvées selon les dispositions de l'article L. 162-15 du code de la sécurité sociale et dès lors pourvues d'un effet obligatoire tant à l'égard de leurs signataires que des tiers, en vigueur lors de la réalisation des déplacements dont la société demande le paiement, prévoyaient que " La participation financière comprend deux éléments : une indemnité de garde et une tarification spécifique pour les sorties pendant les gardes. /
Chaque entreprise de transport sanitaire perçoit une indemnité de 346 euros quelle que soit la zone géographique. / Cette indemnité est versée par les caisses aux entreprises de transport sanitaire au vu du tableau de garde qui leur est transmis par les services de la préfecture. Le montant est versé mensuellement à chaque entreprise en fonction du nombre de véhicules par permanence dédié à la garde au titre des permanences réalisées au cours du mois précédent. / (...) Les transports réalisés et régulés par le centre 15 dans le cadre de la garde font l'objet d'une facturation de 40 % de la tarification conventionnelle. / Seules les prestations délivrées au moyen des véhicules dédiés au centre 15 donneront lieu à facturation de 40 % de la tarification conventionnelle en complémentarité avec l'indemnité de garde allouée ".
5. Il résulte des dispositions qui précèdent, d'une part, que la participation des transporteurs sanitaires privés au service de la garde ambulancière, consistant à fournir des prestations de transport et de déplacement d'un véhicule et d'un équipage afin d'analyser la situation du patient, assurée au bénéfice du service d'aide médicale urgente, résulte non d'un contrat ou d'un quasi-contrat, mais a pour cause l'obligation légale mise à leur charge par les dispositions de l'article L. 6312-1 du code de la santé publique et, d'autre part, que la seule modalité de rémunération de cette astreinte est l'indemnité forfaitaire de 346 euros réglée pour chaque garde effectivement assurée. Il en résulte que le centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer est fondé à soutenir que la société Ambulances des Iles d'Or n'était pas en droit de se voir rémunérer pour les déplacements qu'elle a réalisés pour le compte du service d'aide médicale urgente de l'établissement qui n'ont pas été suivis d'un transport de patient et qu'il était dès lors fondé à rejeter sa demande.
6. Lorsque le juge d'appel, saisi par le défendeur de première instance, censure le motif retenu par les premiers juges, il lui appartient, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'ensemble des moyens présentés par l'intimé en première instance, alors même qu'ils ne seraient pas repris dans les écritures produites, le cas échéant, devant lui, à la seule exception de ceux qui auraient été expressément abandonnés en appel.
7. La décision du directeur du centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer du 23 mars 2015 a eu pour seul effet de lier le contentieux à l'égard de l'objet de la demande de la société qui, en formulant les conclusions susanalysées, a donné à l'ensemble de sa requête le caractère d'un recours de plein contentieux. Au regard de l'objet d'une telle demande, qui conduit le juge à se prononcer sur le droit de l'intéressé à percevoir la somme qu'il réclame, les vices propres dont serait, le cas échéant, entachée la décision qui a lié le contentieux sont sans incidence sur la solution du litige. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de prise en charge est inopérant.
8. Il résulte de tout ce qui précède que le centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont fait droit à la demande de la société Ambulances des Iles d'Or et que leur jugement doit dès lors être annulé.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée par la société Ambulances des Iles d'Or sur leur fondement soit mise à la charge du centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu au contraire de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de la société Ambulances des Iles d'Or, à verser au centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer sur le fondement de ces mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 1501224 du tribunal administratif de Toulon du 1er février 2018 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la société Ambulances des Iles d'Or devant le tribunal administratif de Toulon est rejetée.
Article 3 : La société Ambulances des Iles d'Or versera une somme de 1 500 euros au centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier intercommunal Toulon-La Seyne-sur-Mer et à la société Ambulances des Iles d'Or.
Délibéré après l'audience du 20 mai 2019, où siégeaient :
- M. David Zupan, président,
- M. C... Grimaud, premier conseiller,
- M. Allan Gautron, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 juin 2019.
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N° 18MA01447