Par un jugement n° 1603216 du 19 octobre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Par une demande n° 1603875, l'office public de l'habitat Logis Cévenols a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision implicite de rejet opposée par le conseil régional d'Occitanie à sa demande indemnitaire tendant à la réparation des conséquences dommageables du refus de subvention concernant l'opération de construction de logements sociaux dite " la Rouvière " et d'enjoindre au président du conseil régional de lui verser à ce titre la somme de 130 404 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de la notification du jugement à intervenir.
Par un jugement n° 1603875 du 19 octobre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée le 31 mai 2018 sous le n° 18MA02570, l'office public de l'habitat Logis Cévenols, représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes n° 1601512 du 30 mars 2018 ;
2°) de condamner la région Occitanie à lui verser une indemnité de 1 767 371 euros en réparation des conséquences dommageables du refus de subventions qu'elle lui a opposé, majorée des intérêts à compter du 2 décembre 2015 et du produit de leur capitalisation ;
3°) de mettre à la charge de la région Occitanie la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'intervention de décisions implicites de rejet de ses demandes, qui ne résultent pas d'une instruction par les services de la région et d'une délibération du conseil régional ou de sa commission permanente, constitue une faute ;
- la région a méconnu les dispositions de la délibération du 30 novembre 2007, qui imposent un examen rapide des dossiers de demande de subvention ;
- le délai excessif d'instruction de ces dossiers constitue une faute ;
- la région n'a pas respecté le principe d'égalité à l'occasion de l'instruction des demandes de subvention relatives aux opérations dites " le Chabrol " et " les Lucioles ".
Par un mémoire en défense enregistré le 18 janvier 2019, la région Occitanie, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'office public de l'habitat Logis Cévenols en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le requérant n'ayant pas contesté les décisions implicites de rejet qui lui ont été opposées, sa demande est irrecevable ;
- sa requête d'appel est irrecevable dès lors que le montant de la demande indemnitaire présentée à la Cour excède les conclusions présentées en première instance ;
- une partie des prétentions exposées en appel porte sur des sommes qui n'ont fait l'objet d'aucune réclamation préalable ;
- la requête est irrecevable en ce qu'elle porte sur les opérations de la Rouvière, des Lucioles et du Chabrol, objets d'une autre instance ;
- les mesures d'exécution du contrat de participation financière qu'elle a conclue avec la communauté d'agglomération d'Alès ne peuvent être contestées par l'office, qui n'est pas partie à ce contrat, lequel ne comporte aucune stipulation pour autrui ;
- les moyens invoqués par l'office ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté par l'office public de l'habitat Logis Cévenol et enregistré le 12 juin 2019 n'a pas été communiqué.
Une note en délibéré présentée pour l'office public de l'habitat Logis Cévenols a été enregistrée le 20 juin 2019.
Une note en délibéré présentée pour la région Occitanie a été enregistrée le 25 juin 2019.
II. Par une requête enregistrée le 21 décembre 2018 sous le n° 18MA05416, l'office public de l'habitat Logis Cévenols, représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes n° 1603216 du 19 octobre 2018 en tant qu'il rejette sa demande indemnitaire ;
2°) de condamner la région Occitanie à lui verser une indemnité de 128 550 euros en réparation des conséquences dommageables du refus de lui accorder les montants de subvention dus au titre des opérations de construction de logements sociaux dites " le Chabrol " et " les Lucioles ", majorée des intérêts à compter du 27 juin 2016 et du produit de leur capitalisation ;
3°) de mettre à la charge de la région Occitanie la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'intervention de décisions implicites de rejet de ses demandes, qui ne résultent pas d'une instruction par les services de la région et d'une délibération du conseil régional ou de sa commission permanente, constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la région ;
- la région ne pouvait faire une application rétroactive de la délibération du 18 avril 2014 à ses demandes de subvention déposées en 2013 ;
- le délai d'instruction excessif de ces dossiers constitue une faute ;
- la région n'a pas respecté le principe d'égalité à l'occasion de l'instruction des demandes de subvention.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 juin 2019, la région Occitanie, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'office public de l'habitat Logis Cévenols en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par l'office ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté par l'office public de l'habitat Logis Cévenols et enregistré le 12 juin 2019 n'a pas été communiqué.
Une note en délibéré présentée pour la région Occitanie a été enregistrée le 25 juin 2019.
III. Par une requête enregistrée le 21 décembre 2018 sous le n° 18MA05417, l'office public de l'habitat Logis Cévenols, représenté par Me E..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes n° 1603875 du 19 octobre 2018 en tant qu'il rejette sa demande indemnitaire ;
2°) de condamner la région Occitanie à lui verser une indemnité de 92 404 euros en réparation des conséquences dommageables du refus de subvention qu'elle lui a opposé au titre de l'opération dite " la Rouvière ", majorée des intérêts à compter du 7 septembre 2016 et du produit de leur capitalisation ;
3°) de mettre à la charge de la région Occitanie la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'intervention de décisions implicites de rejet de ses demandes, qui ne résultent pas d'une instruction par les services de la région et d'une délibération du conseil régional ou de sa commission permanente, constitue une faute de nature à engager la responsabilité de la région ;
- la région ne pouvait faire une application rétroactive de la délibération du 18 avril 2014 à ses demandes de subvention déposées en 2013 ;
- le délai d'instruction excessif de ces dossiers constitue une faute ;
- la région n'a pas respecté le principe d'égalité à l'occasion de l'instruction des demandes de subvention.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 juin 2019, la région Occitanie, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'office public de l'habitat Logis Cévenols en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par l'office ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté par l'office public de l'habitat Logis Cévenols et enregistré le 12 juin 2019 n'a pas été communiqué.
Une note en délibéré présentée pour la région Occitanie a été enregistrée le 25 juin 2019.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code civil ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. D... Grimaud, rapporteur,
- les conclusions de M. B... Thiele, rapporteur public,
- et les observations de Me E... représentant l'office public de l'habitat Logis Cévenols et de Me A..., substituant Me C..., représentant la région Occitanie.
Considérant ce qui suit :
1. Entre mai 2012 et janvier 2014, l'office public de l'habitat Logis Cévenols a déposé auprès de la région Languedoc-Roussillon, aujourd'hui devenue Occitanie, six demandes de subvention dans le cadre du régime régional d'aide à la production de logement social, au titre des opérations dites " les Lucioles ", " le Chabrol ", " la Rouvière " " Robiac Rochessadoule ", " les Santolines " et " la Porte Saint-Martin ". Après avoir été initialement laissées sans réponses, ces six demandes ont donné lieu à l'attribution de subventions entre décembre 2014 et décembre 2016 pour des montants respectifs de 12 000 euros, 10 000 euros, 50 000 euros, 38 000 euros, 12 000 euros et 14 000 euros. L'office a par ailleurs déposé auprès de la région, en décembre 2013, dans le cadre du programme régional de construction et de réhabilitation de logements sociaux au titre des opérations retenues par le programme national de rénovation urbaine, douze demandes de subvention destinées à la construction de logements sociaux relatives aux opérations dites " Maupassant ", " Petit Lavoisier 1 ", " Petit Lavoisier 2 ", " Grand Lavoisier 2 ", " Rue André Chénier 1 ", " Rue André Chénier 2 ", " 2 à 10 rue de la Lozère ", " Delaune ", " Romarins " et " Winston Churchill ", ainsi qu'à une opération groupée portant sur les immeubles de plusieurs rues d'Alès. Ces demandes ont été rejetées par la région. L'office sollicite l'annulation des jugements par lesquels le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'indemnisation du retard ayant entaché l'instruction des dossiers présentés au titre du régime régional d'aide à la production de logement social et, d'autre part, au versement des aides refusées par la région au titre de son programme de rénovation urbaine.
I. Sur la jonction :
2. Les requêtes présentées par l'office public de l'habitat " Logis Cévenols ", enregistrées respectivement sous les n° 18MA02570, 18MA05416 et 18MA05417, présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
II. Sur la recevabilité de la requête d'appel :
3. En premier lieu, le litige soumis à la Cour par l'office public de l'habitat " Logis Cévenols " tend, notamment, à l'indemnisation des conséquences dommageables du caractère excessif du délai d'instruction des demandes de subvention qu'il a présentées à la région Occitanie, lesquelles ont été en partie satisfaites. Dès lors, la circonstance qu'il n'aurait pas contesté par la voie du recours pour excès de pouvoir les décisions implicites ayant initialement rejeté ces demandes est sans incidence sur la recevabilité de sa demande.
4. En second lieu, la jonction des instances ouvertes sous les nos 18MA02570, 18MA05416 et 18MA05417 ayant pour effet de permettre à la Cour de statuer sur leurs conclusions par un seul arrêt, la région Occitanie n'est pas fondée à soutenir que la présentation de conclusions équivalentes dans plusieurs de ces instances serait de nature à les entacher d'irrecevabilité.
III. Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
III.1 En ce qui concerne la fin de non-recevoir soulevée devant le Tribunal :
5. Les conclusions d'une requête unique tendant à ce que soient annulées plusieurs décisions sont recevables dans leur totalité si elles présentent entre elles un lien suffisant. La demande n° 1603216 présentée par l'office public de l'habitat Logis Cévenols devant le Tribunal ayant trait à deux décisions de refus de subvention intervenues le même jour et à l'indemnisation des préjudices découlant du retard à instruire les demandes, et étant assortie des mêmes moyens en ce qui concerne ces deux décisions, ces conclusions présentaient entre elles un lien suffisant. Dès lors, contrairement à ce que soutenait la région Occitanie devant les premiers juges, cette demande contentieuse était recevable.
III.2. En ce qui concerne les conclusions à fin d'indemnisation relatives au programme d'aide à la production de logements sociaux :
III.2.1. S'agissant des opérations dites " les Santolines ", " le Chabrol ", " les Lucioles ", " la Rouvière " et " Robiac Rochessadoule " :
6. En premier lieu, aux termes des dispositions de la délibération du conseil régional du 29 novembre 2010 : " Face à l'ampleur des besoins en logement social et à l'objectif très ambitieux de produire à terme 10 000 logements sociaux par an, il est important que les capacités de production de tous les acteurs du logement social puissent être mobilisées. / A cette fin, il est proposé que l'ensemble de bailleurs sociaux (...) soient éligibles aux aides de la région de sorte à soutenir tous les acteurs souhaitant produire du logement social (...) / Pour les bailleurs sociaux / La subvention régionale sera calculée (...) de manière forfaitaire selon la nature sociale du logement et plafonnée en fonction de la typologie du logement ". Aux termes du 1 de l'article B de cette délibération, définissant les modalités de calcul de la subvention pour les bailleurs sociaux : " La subvention régionale sera calculée, pour les opérations de construction neuve/VEFA et d'acquisition amélioration, de manière forfaitaire selon la nature sociale du logement et plafonnée en fonction de la typologie du logement. / (...) PLAI / 90 euros/m² habitable / PLUS / 60 euros/m² / PLS 30 euros/m² habitable ". Le C de l'article 3 de la délibération du conseil régional du 18 avril 2014, intitulé " modulation des aides ", dispose quant à lui : " Cet engagement permet de maintenir un soutien important à l'ensemble de la production de logement social, de ménager l'impact sur la programmation 2014 et sur l'activité du BTP, d'intervenir en priorité sur la maîtrise d'ouvrage directe qui bénéficie d'une aide majorée par rapport à la production en VEFA. / Maîtrise d'ouvrage directe : 4 000 euros par logement PLAI 2 000 euros par logement PLUS / VEFA (...) : 3 000 euros par logement PLAI 1 000 euros par logement PLUS (...) ". Aux termes de l'article 4 de la même délibération, intitulé " des partenariats renforcés " : " A compter des agréments 2013 et afin de renforcer la mobilisation de chacun, il est proposé de conditionner l'intervention régionale : / (...) à un partenariat financier équitable et efficient d'autres collectivités. La région accompagnera les projets à parité de l'aide locale et dans la limite de ses forfaits d'intervention (...) ".
7. Il résulte des dispositions de la délibération du 29 novembre 2010, ainsi que de la fiche programme d'action annexée à la même délibération, combinées avec celles des dispositions des délibérations des 16 juin 2005, 30 novembre 2005, 9 juin 2006, 6 février 2007, 30 juillet 2008 et 18 décembre 2009 qui l'ont précédée, que la région Languedoc-Roussillon a entendu instituer un régime réglementaire de subvention aux opérations de construction de logement social d'application générale, reposant sur des critères purement objectifs et prédéterminés tenant à la nature, à la surface, au mode de financement et aux caractéristiques des logements concernés, sans conférer aux autorités régionales l'exercice d'une quelconque marge d'appréciation quant à l'opportunité du projet, à son degré de priorité ou à sa plus ou moins grande conformité à des objectifs fixés par la région. L'attribution d'une telle subvention constituait dès lors un droit pour les maîtres d'ouvrage remplissant les conditions réglementaires pour l'obtenir, l'objectif de répartition équitable des subventions entre les différents demandeurs invoqué par la région devant la Cour ne s'étant traduit par l'édiction, dans ces délibérations, d'aucune condition d'attribution ou restriction de nature à permettre une sélection des projets.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000, dans sa rédaction en vigueur avant l'intervention de la loi n° 2013-1005 du 12 novembre 2013 : " Sauf dans les cas où un régime de décision implicite d'acceptation est institué dans les conditions prévues à l'article 22, le silence gardé pendant plus de deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet (...). Lorsque la complexité ou l'urgence de la procédure le justifie, des décrets en Conseil d'Etat prévoient un délai différent ". Aux termes de ces dispositions, dans leur rédaction issue de la loi du 12 novembre 2013 : " I. - Le silence gardé pendant deux mois par l'autorité administrative sur une demande vaut décision d'acceptation. / (...) Le premier alinéa n'est pas applicable et, par dérogation, le silence gardé par l'administration pendant deux mois vaut décision de rejet : / (...) 3° Si la demande présente un caractère financier sauf, en matière de sécurité sociale, dans les cas prévus par décret (...) ". Faute d'autre disposition définissant les conséquences attachées au silence gardé par la région sur une demande de subvention formulée dans le cadre du régime d'aide à la production de logements sociaux décrit ci-dessus, ces dispositions, qui expriment d'ailleurs une règle générale de procédure, fixaient le délai au terme duquel, faute de décision explicite, elle était réputée avoir statué sur les demandes dont elle était saisie et les avoir rejetées.
9. Les demandes de subvention présentées par l'office en vue des opérations dites " les Lucioles ", " le Chabrol ", " la Rouvière " " Robiac Rochessadoule " et " les Santolines ", présentées entre mai 2012 et août 2013, ont respectivement été enregistrées et déclarées complètes par les services de la région Occitanie eux-mêmes en ce qui concerne l'aide à la production de logements sociaux les 8 avril 2013, 18 avril 2013, 2 août 2013, 16 octobre 2013 et 24 octobre 2013. Elles ont dès lors donné lieu, en vertu des dispositions citées ci-dessus, à des décisions implicites de refus intervenues respectivement les 8 juin 2013, 18 juin 2013, 2 octobre 2013, 16 décembre 2013 et 24 décembre 2013. Les cinq opérations ici en cause ont toutefois ensuite fait l'objet de décisions explicites accordant une subvention, faisant ainsi partiellement droit aux demandes de l'office public de l'habitat et intervenues respectivement les 23 décembre 2014, 14 avril 2016 pour deux d'entre elles, 1er juillet 2016 et 16 décembre 2016.
10. S'il était loisible à la région Occitanie de prolonger l'instruction des demandes de subvention en cause en dépit de l'intervention des décisions implicites les rejetant, afin de leur substituer des décisions statuant explicitement sur leur bien-fondé, il lui appartenait d'adopter ces nouvelles décisions dans un délai raisonnable. Or, la région n'invoque aucune difficulté particulière dans l'examen de ces demandes, en dehors d'un épuisement temporaire des crédits évoqué dans les courriers des 2 août 2013, 16 octobre 2013 et 24 octobre 2013 confirmant le caractère complet des dossiers relatifs aux opérations " la Rouvière ", " les Santolines " et " Robiac Rochessadoule ", circonstance qui n'était de nature, par elle-même, ni à faire obstacle à l'instruction ni à s'opposer à l'intervention d'une décision favorable, eu égard au caractère inconditionné du régime d'aides en cause et à la possibilité de financer ces dépenses à compter de janvier 2014. La région n'a toutefois statué explicitement sur ces cinq demandes qu'après que la délibération du 18 avril 2014, pourtant postérieure de six à douze mois à l'intervention des décisions implicites de rejet évoquées ci-dessus, a instauré un régime de subvention moins favorable. Si nul ne dispose de droits acquis au maintien d'un règlement, la région, en reprenant ainsi l'instruction de demandes de subvention sur lesquelles elle avait déjà statué sous l'empire du règlement antérieurement en vigueur et en s'abstenant néanmoins de statuer dans un délai qui eût permis de faire application des règles en vigueur à la date où elle était réputée avoir déjà statué, fût-ce implicitement, sur ces demandes, a exagérément prolongé cette procédure et méconnu l'exigence de délai raisonnable mentionnée ci-dessus. L'office public de l'habitat Logis Cévenols est donc fondé à soutenir qu'elle a commis à ce titre une faute de nature à engager sa responsabilité.
11. La faute ainsi commise par la région a eu pour conséquence directe l'application aux cinq demandes de subvention en cause de la délibération du 18 avril 2014, dont les dispositions étaient moins favorables que celles issues de la délibération du 29 novembre 2010 auparavant en vigueur et sur le fondement desquelles l'office Logis Cévenols, disposait en principe, ainsi qu'il a été dit, d'un droit au versement de la subvention dès lors que ses projets répondaient aux critères objectifs fixés par les délibérations instituant ce régime d'aide.
12. En troisième lieu, il résulte des dispositions précitées de la délibération du 29 novembre 2010 que la demande relative au projet " les Santolines ", comprenant trois logements financés par un prêt locatif aidé d'intégration totalisant 164 mètres carrés habitables, ouvrait droit, eu égard au taux de 90 euros par mètre carré prévu par cette délibération pour ce type de logement, à la subvention de 10 800 euros que réclamait l'office. Il résulte toutefois de l'instruction que ce dernier a obtenu une subvention de 12 000 euros pour cette opération, de telle sorte qu'il n'a subi aucun préjudice sur ce point.
13. Selon les mêmes dispositions, la demande relative au projet " le Chabrol ", constitué de six logements dont deux financés par un prêt locatif aidé d'intégration totalisant 145 mètres carrés habitables et quatre financés par prêt locatif à usage social totalisant une surface de 290 mètres carrés, ouvrait droit, eu égard aux taux respectifs de 90 euros et 60 euros par mètre carré prévus par la délibération pour chacune de ces catégories de logement, à la subvention de 28 350 euros que réclamait l'office Logis Cévenols. Celui-ci, qui n'a obtenu qu'une subvention de 10 000 euros en ce qui concerne cette opération, est dès lors fondé à invoquer un préjudice de 18 350 euros.
14. Le programme immobilier " les Lucioles ", comprenant trente-quatre logements dont six financés par un prêt locatif aidé d'intégration, totalisant 615 mètres carrés habitables, et vingt-huit financés par prêt locatif à usage social, totalisant une surface de 1 785 mètres carrés, ouvrait droit quant à lui, eu égard aux taux mentionnés ci-dessus, à la subvention de 160 200 euros que réclamait l'office, lequel, ayant obtenu une subvention de seulement 50 000 euros en application de la délibération du 18 avril 2014, est ainsi fondé à soutenir que la faute de la région relevée au point 10 s'est traduite par un préjudice de 110 200 euros.
15. En vertu des dispositions de la délibération du 29 novembre 2010, la demande relative au projet dit " la Rouvière ", regroupant vingt-six logements dont six financés par un prêt locatif aidé d'intégration totalisant 450 mètres carrés habitables et vingt financés par un prêt locatif à usage social totalisant une surface de 1 500 mètres carrés, ouvrait droit, eu égard aux taux respectifs de 90 euros et 60 euros par mètre carré prévus par cette délibération pour ces catégories de logement, à la subvention de 130 404 euros sollicitée par l'office public de l'habitat Logis Cévenols. Ce dernier, qui n'a obtenu qu'une subvention de 38 000 euros pour cette opération, est dès lors fondé à soutenir qu'il a subi un préjudice de 92 404 euros.
16. Enfin, le projet dit " Robiac Rochessadoule ", comprenant quatre logements dont un financé par un prêt locatif aidé d'intégration, d'une superficie de 81 mètres carrés habitables et trois financés par prêt locatif à usage social totalisant une surface de 243 mètres carrés, ouvrait droit, en fonction des taux mentionnés ci-dessus, à la subvention de 22 500 euros sollicitée par l'office, auquel n'a été finalement allouée à ce titre qu'une subvention de 12 000 euros et qui a donc subi un préjudice de 10 500 euros.
17. Il résulte de ce qui précède que l'office public de l'habitat Logis Cévenols, qui a présenté une réclamation préalable pour chacune des cinq opérations en cause et dont les conclusions en appel n'excèdent pas, en ce qui les concerne, le quantum de sa demande de première instance, est fondé à demander la condamnation de la région Occitanie à lui verser une indemnité de 231 454 euros.
III.2.2. S'agissant de l'opération dite " la Porte de Saint-Martin " :
18. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 4221-1 du code général des collectivités territoriales : " Le conseil régional règle par ses délibérations les affaires de la région dans les domaines de compétences que la loi lui attribue (...) ". Selon le paragraphe 3 de l'article 2 de la délibération du conseil régional du 20 décembre 2007 portant règlement général des interventions de la région : " Le dossier de demande de financement est instruit par les services administratifs de la région. / Il fait ensuite l'objet d'un rapport présenté par le Président soit à l'Assemblée délibérante soit à la Commission permanente, après généralement avis des commissions spécialisées ".
19. La circonstance que la décision implicite de refus opposée à la demande de subvention présentée par l'office public de l'habitat Logis Cévenols pour l'opération dite " la Porte de Saint-Martin " n'aurait pas été instruite par les services de la région ou n'aurait pas été préalablement soumise à l'assemblée délibérante ou à la commission permanente n'est pas de nature, par elle-même, à engager la responsabilité de la région Occitanie, dès lors que celle-ci, à la suite de l'intervention de cette décision implicite, a repris l'instruction de la demande et statué selon les formes prévues par les dispositions précitées.
20. En deuxième lieu, aux termes du 1 de l'article 2 de la délibération du conseil régional du 20 décembre 2007 portant règlement général des interventions de la région : " Afin de faciliter leur prise en compte dans le cadre du budget de l'année suivante, les dossiers de demande de financement doivent de préférence être déposés avant le 15 septembre (...) ". Selon le 2 de l'article 2 de ce règlement : " Le service de la région chargé de l'instruction du dossier vérifie la constitution du dossier (...) / - Si le dossier est incomplet ou si la nature du projet justifie des pièces complémentaires, le service demande les compléments d'information nécessaires, auxquels le bénéficiaire est tenu de répondre dans un délai fixé à un mois. / - Si le projet n'est manifestement pas conforme aux priorités régionales ou à l'intérêt régional, le porteur est rapidement informé qu'il ne sera pas donné suite à sa demande. / Une fois le dossier dûment constitué, le service instructeur en accuse réception auprès du demandeur. Celui-ci peut alors engager l'opération projetée sans pour autant que la région soit engagée sur la suite réservée à la demande de financement ".
21. Il ne résulte ni de ces dispositions elles-mêmes ni de leur combinaison avec celles, précédemment citées, du 3 de l'article 2 de la délibération du 20 décembre 2007 que le conseil régional aurait instauré un délai impératif d'examen des demandes de subvention. En particulier, la seule circonstance que ce règlement invite les demandeurs à déposer leur dossier avant le 15 septembre de l'exercice budgétaire pour le voir traité au cours de l'exercice suivant et qu'il prévoit le rejet rapide des demandes manifestement infondées n'emporte aucune obligation précise en termes de délai. L'office public de l'habitat Logis Cévenols n'est dès lors pas fondé à soutenir que la région Occitanie aurait méconnu ces dispositions et aurait ainsi commis, à ce titre, une faute engageant sa responsabilité.
22. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que le dossier de la demande de subvention concernant l'opération dite " la Porte Saint-Martin " n'a été complété par l'office Logis Cévenols que le 28 mai 2014, soit ultérieurement à l'entrée en vigueur de la délibération du 18 avril 2014. Dès lors, cet établissement public n'est en tout état de cause pas fondé à soutenir que la région aurait fait une application rétroactive de cette délibération à la demande de subvention présentée au titre de cette opération.
23. En quatrième lieu, le caractère éventuellement fautif du délai qui s'est ensuite écoulé entre le 28 mai 2014, date à laquelle le dossier de la demande de subvention relatif à l'opération dite " la Porte Saint-Martin " a été complété, et l'intervention de la délibération attribuant la subvention, adoptée le 16 décembre 2016, n'est à l'origine d'aucun préjudice dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction et qu'il n'est d'ailleurs pas soutenu que les règles présidant à l'attribution des subventions auraient été modifiées dans un sens défavorable à l'office public de l'habitat Logis Cévenols après l'entrée en vigueur de la délibération du 18 avril 2014 ou que le délai d'instruction aurait par lui-même causé un préjudice à l'office en affectant les conditions de réalisation de l'opération.
24. En dernier lieu, si l'office public de l'habitat Logis Cévenols soutient que l'instruction de la demande de subvention concernant l'opération de la Porte Saint-Martin a été menée en méconnaissance du principe d'égalité, il n'établit pas que les autres demandes dont il fait état et qui ont été satisfaites dans des délais plus courts aient été présentées à la région Languedoc-Roussillon dans des conditions comparables. Ainsi, faute pour cet établissement public d'établir qu'il se trouvait dans la même situation que les autres maîtres d'ouvrage, il n'est donc pas fondé à soutenir que le principe d'égalité aurait été méconnu et ne justifie au demeurant, pas plus que précédemment, d'un préjudice en découlant.
IV. En ce qui concerne les demandes de subvention présentées au titre du programme de rénovation urbaine :
25. Aux termes de l'article 1121 du code civil, en vigueur lors de la conclusion de la convention du 25 mars 2009 relative aux projets de rénovation urbaine financés par la région : " On peut pareillement stipuler au profit d'un tiers, lorsque telle est la condition d'une stipulation que l'on a fait pour soi-même ou d'une donation que l'on a fait à un autre (...) ". Aux termes de l'article 1165 du même code : " Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu à l'article 1121 ".
26. En principe, les tiers à un contrat administratif, ne peuvent se prévaloir des stipulations de ce contrat hormis le cas où elles revêtent le caractère de clauses réglementaires ou de stipulations pour autrui.
27. Les clauses de la convention conclue le 25 mars 2009 entre la région Occitanie et la communauté d'agglomération du grand Alès ont pour seul objet de définir les engagements réciproques de ces personnes publiques en vue de la participation de la région au financement de projets de rénovation urbaine menés par la communauté d'agglomération et d'énumérer les opérations pouvant bénéficier de subventions allouées par la région. Ces clauses ne revêtent aucune portée réglementaire et, faute de stipulation expresse souscrite par les parties au bénéfice de l'office public de l'habitat Logis Cévenols, elles ne présentent pas davantage le caractère d'une stipulation pour autrui. La qualité de tiers à ce contrat de l'office public de l'habitat Logis Cévenols fait dès lors obstacle à ce qu'il se prévale de son inexécution dans le cadre d'une action en responsabilité quasi-délictuelle.
28. Il résulte de tout ce qui précède que l'office public de l'habitat Logis Cévenols est seulement fondé à demander l'annulation des jugements nos 1601512, 1603216 et 1603875 des 30 mars 2018 et 19 octobre 2018 en ce qu'ils ont rejeté ses demandes indemnitaires relatives aux opérations dites " le Chabrol ", " les Lucioles ", " la Rouvière " et " Robiac Rochessadoule " et la condamnation de la région Occitanie à lui verser une indemnité d'un montant total de 231 454 euros.
V. Sur les intérêts et les intérêts des intérêts :
29. En vertu de l'article 1153 du code civil, les intérêts au taux légal courront sur la somme de 231 454 euros mentionnée au point 28 à compter du 2 décembre 2015, date de réception, par la région, de la réclamation que lui a adressée l'office public de l'habitat Logis Cévenols. En vertu de l'article 1154 du même code, ces intérêts seront capitalisés respectivement au 31 mai 2018, date à laquelle cette capitalisation a été demandée pour la première fois et à laquelle il était dû une année d'intérêts, puis à chaque échéance annuelle ultérieure, pour produire eux-mêmes intérêts.
VI. Sur les frais liés au litige :
30. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que la somme réclamée par la région Occitanie sur leur fondement soit mise à la charge de l'office public de l'habitat Logis Cévenols, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu, au contraire, de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de la région Occitanie, à verser à l'office public de l'habitat Logis Cévenols sur le fondement de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : Les jugements nos 1601512, 1603216 et 1603875 du tribunal administratif de Nîmes des 30 mars 2018 et 19 octobre 2018 sont annulés en ce qu'ils ont rejeté les demandes indemnitaires de l'office public de l'habitat Logis Cévenols relatives aux opérations dites " le Chabrol ", " les Lucioles ", " la Rouvière " et " Robiac Rochessadoule ".
Article 2 : La région Occitanie est condamnée à verser une somme de 231 454 euros à l'office public de l'habitat Logis Cévenols. Cette somme portera intérêts à compter du 2 décembre 2015. Les intérêts échus le 31 mai 2018 seront capitalisés à cette date et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.
Article 3 : La région Occitanie versera une somme de 2 000 euros à l'office public de l'habitat Logis Cévenols en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'office public de l'habitat Logis Cévenols et à la région Occitanie.
Délibéré après l'audience du 17 juin 2019, où siégeaient :
- M. David Zupan, président,
- M. D... Grimaud, premier conseiller,
- M. Allan Gautron, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 juillet 2019.
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N° 18MA02570, 18MA05416, 18MA05417