Procédure devant la Cour :
I) Sous le n° 19MA04446, par une requête, enregistrée le 1er octobre 2019, M. E..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Nice du 12 septembre 2019 ;
2°) d'ordonner au tribunal administratif de Nice d'inscrire sa demande au rôle d'une audience et de statuer sur celle-ci ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- les dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative étaient inapplicables au litige dans la mesure où son recours au fond, qui visait à obtenir l'annulation de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, était exclusivement régi par les dispositions des articles L. 512-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles de l'article R. 776-1 et suivants du code de justice administrative ;
- les dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative sont illégales car contraires à celles de l'article L. 5111-1 du même code qui prévoient une distinction nette entre l'instance au fond et celle en référé ;
- dans la mesure où postérieurement à l'ordonnance rendue par le juge des référés le 11 juin 2019, il avait demandé au tribunal administratif la mise au rôle de sa requête au fond, le premier juge ne pouvait faire usage des dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative et constater son désistement.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense.
M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mai 2020.
II) Sous le n° 19MA04471, par une requête, enregistrée le 7 octobre 2019, M. E..., représenté par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner sur le fondement de l'article R. 811-17 du code de justice administrative qu'il soit sursis à l'exécution de l'ordonnance de la présidente du tribunal administratif de Nice du 12 septembre 2019 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient qu'il fait état de moyens sérieux exposés dans sa requête au fond et que l'exécution de l'ordonnance en litige risque d'entraîner pour lui des conséquences difficilement réparables.
La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les observations de Me B..., représentant M. E....
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes n° 19MA04446 et n° 19MA04471, enregistrées pour M. E..., présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune. Par suite, il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. D'une part, les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile énumèrent les cas dans lesquels l'autorité administrative peut prononcer une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un ressortissant étranger. Aux termes de ces dispositions, dans leur rédaction résultant de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, qui n'ont pas été modifiées sur ce point par la loi du 10 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, l'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant, au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1 du même code, en particulier lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : " (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) ". Aux termes du I de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi du 7 mars 2016 : " L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sur le fondement des 3°, 5°, 7° ou 8° du I de l'article L. 511-1 ou sur le fondement de l'article L. 511-3-1 et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 ou au sixième alinéa de l'article L. 511-3-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ou d'interdiction de circulation sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant ".
3. D'autre part, en vertu de l'article R. 776-1 du code de justice administrative, inséré au chapitre VI du titre VII du livre VII de ce code : " Sont présentées, instruites et jugées selon les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles du présent code, sous réserve des dispositions du présent chapitre, les requêtes dirigées contre : / 1° Les décisions portant obligation de quitter le territoire français, prévues au I de l'article L. 511-1 et à l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les décisions relatives au séjour notifiées avec les décisions portant obligation de quitter le territoire français ; / (...) 4° Les décisions fixant le pays de renvoi prévues à l'article L. 513-3 du même code (...) ".
4. Enfin, selon l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative : " En cas de rejet d'une demande de suspension présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 au motif qu'il n'est pas fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision, il appartient au requérant, sauf lorsqu'un pourvoi en cassation est exercé contre l'ordonnance rendue par le juge des référés, de confirmer le maintien de sa requête à fin d'annulation ou de réformation dans un délai d'un mois à compter de la notification de ce rejet. A défaut, le requérant est réputé s'être désisté. / Dans le cas prévu au premier alinéa, la notification de l'ordonnance de rejet mentionne qu'à défaut de confirmation du maintien de sa requête dans le délai d'un mois, le requérant est réputé s'être désisté. ".
5. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que, lorsqu'une décision relative au séjour est intervenue concomitamment et a fait l'objet d'une contestation à l'occasion d'un recours dirigé contre une obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du 3° du I de l'article L. 511-1, cette contestation suit le régime contentieux applicable à l'obligation de quitter le territoire. Il résulte néanmoins des dispositions de l'article R. 776-1 du code de justice administrative que les requêtes dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français ainsi que les décisions relatives au séjour notifiées avec les décisions portant obligation de quitter le territoire français sont présentées, instruites et jugées selon les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais aussi selon celles du code de justice administrative, sous réserve des dispositions particulières du chapitre VI du titre VII du livre VII de ce code. Ainsi, lorsque qu'un requérant conteste devant le tribunal administratif une décision relative au séjour et une décision portant obligation de quitter le territoire français intervenue concomitamment, dès lors qu'aucune disposition du chapitre VI du titre VII du livre VII du code de justice administrative ni de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'y fait obstacle, les dispositions précitées de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative sont applicables à l'ensemble des conclusions présentées devant le juge administratif dans le cadre de ce litige. Par suite, M. E... n'est pas fondé à soutenir que ces dernières dispositions n'étaient pas applicables à la demande qu'il avait présentée devant le tribunal administratif de Nice tendant à l'annulation du refus de séjour qui lui avait été opposé par l'arrêté en litige et de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français dont ce refus était assorti.
6. Par ailleurs, les dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative n'ont ni pour objet ni pour effet de porter atteinte au caractère provisoire des décisions du juge des référés, résultant de l'article L. 511-1 du code de justice administrative ni de mettre fin à la distinction entre l'instance au fond et celle en référé. Le moyen tiré, par la voie de l'exception, de ce que ces dispositions seraient, pour ces motifs, entachées d'illégalité ne peut qu'être écarté.
7. A l'occasion de la contestation en appel de l'ordonnance prenant acte du désistement d'un requérant en l'absence de confirmation à l'expiration du délai d'un mois du maintien de sa requête au fond lorsque le juge des référés a rejeté ses conclusions à fin de suspension en raison de l'absence de moyen propre à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision litigieuse, il incombe au juge d'appel, saisi de moyens en ce sens, de vérifier que l'intéressé a reçu la lettre de notification de l'ordonnance de rejet du juge des référés mentionnée par les dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative et que cette lettre fixait un délai d'un mois au requérant pour confirmer le maintien de sa requête et l'informait des conséquences d'un défaut de confirmation dans ce délai et que le requérant s'est abstenu de répondre en temps utile et d'apprécier si le premier juge, dans les circonstances de l'affaire, a fait une juste application des dispositions de l'article R. 612-5-2.
8. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que, par une ordonnance n° 1902624 du 11 juin 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Nice, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté la demande de M. E... tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 11 février 2019 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, au motif qu'aucun moyen n'était propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cet arrêté. Le courrier de notification de cette ordonnance au requérant, daté du 13 juin 2019, comme la copie adressée à son conseil via l'application télérecours, mentionnaient qu'à défaut de confirmation du maintien de sa requête en excès de pouvoir dans le délai d'un mois, il serait réputé s'être désisté. Il est constant que ce courrier a été réceptionné par l'intéressé le 17 juin 2019. Aucune demande de confirmation de cette requête n'a été enregistrée dans le mois suivant cette notification. Si, postérieurement à l'expiration de ce délai, par une lettre du 9 septembre 2019, le conseil de M. E... a demandé que l'affaire soit jugée dans les meilleurs délais dans la mesure où son client était privé de la possibilité d'exercer son activité professionnelle, cette seule circonstance ne suffit pas à établir que l'auteur de l'ordonnance attaquée n'aurait pas fait, en l'espèce, une juste application des dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative en regardant l'absence de réponse de M. E... au courrier du 13 juin 2019 comme traduisant une renonciation de sa part à l'instance introduite.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, la présidente du tribunal administratif de Nice lui a donné acte du désistement de sa demande en application des dispositions de l'article R. 612-5-2 du code de justice administrative. Par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées.
Sur les conclusions aux fins de sursis à exécution de l'ordonnance du 12 septembre 2019 :
10. Le présent arrêt statue sur les conclusions à fin d'annulation de l'ordonnance du 12 septembre 2019. Dès lors, les conclusions de M. E... tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cette ordonnance sur le fondement des dispositions de l'article R. 811-17 du code de justice administrative sont devenues sans objet. Il n'y a donc pas lieu d'y statuer.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans les présentes instances, une somme à verser au conseil de M. E... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête n° 19MA04446 de M. E... est rejetée.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution de l'ordonnance du 12 septembre 2019 de la présidente du tribunal administratif de Nice présentées dans la requête n° 19MA04471.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête n° 19MA04471 est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E..., à Me D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 18 septembre 2020, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. C..., président assesseur,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 octobre 2020.
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N° 19MA04446, 19MA04471
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