Procédure devant la Cour :
I) Sous le n° 20MA00989, par une requête, enregistrée le 21 février 2020, M. A... D..., représenté par Me F..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia du 17 octobre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 7 mai 2019 du préfet de la Haute-Corse ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Corse de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et à défaut, d'enjoindre au préfet, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, de procéder au réexamen de sa situation en lui délivrant durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à Me F..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige est insuffisamment motivé et révèle un défaut d'examen de sa situation ;
- le préfet a fait une application erronée des dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en déduisant de sa seule non-présentation aux examens l'absence du caractère réel et sérieux de ses études ;
- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité affectant le refus de séjour ;
- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- en ne lui accordant pas un délai de départ volontaire supérieur à trente jours le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 avril 2020, le préfet de la Haute-Corse conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
M. A... D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 février 2020.
II) Sous le n° 20MA00964, par une requête, enregistrée le 27 février 2020, M. A... D..., représenté par Me F..., demande à la Cour :
1°) de suspendre, en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 7 mai 2019 du préfet de la Haute-Corse ;
2°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Corse de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans l'attente du jugement au fond dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à Me F..., au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté en litige préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à sa situation ; la condition d'urgence doit être considérée comme remplie s'agissant d'un refus de renouvellement de titre de séjour ;
- il existe, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté au regard des moyens exposés dans sa requête au fond.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2020, le préfet de la Haute-Corse conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
M. A... D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 février 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. Georges B..., président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les observations de M. C..., représentant le préfet de la Haute-Corse.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... D..., ressortissant tunisien, né le 26 juillet 1996, est entré en France le 10 septembre 2017 sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant ". Par un arrêté du 7 mai 2019 le préfet de la Haute-Corse a refusé de renouveler son titre de séjour en qualité d'étudiant, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai. M. A... D... relève appel du jugement du 17 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté. Par une requête distincte, il demande sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension du même arrêté.
2. Les requêtes n° 20MA00964 et n° 20MA00989 présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur la légalité de l'arrêté du 7 mai 2019 le préfet de la Haute-Corse :
3. Il ressort des termes mêmes de son arrêté du 7 mai 2019 que pour refuser de renouveler le titre de séjour de M. A... D... et lui faire obligation de quitter le territoire français, le préfet de la Haute-Corse, après avoir visé les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'est notamment fondé, d'une part, sur ce que l'intéressé étant célibataire et sans enfant à charge en France, faits qui ne sont pas contestés, cet arrêté ne portait pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie familiale et, d'autre part, sur ce qu'il n'avait validé aucune de ses unités d'enseignement lors de sa première année de licence de droit, qu'il avait été considéré comme défaillant pour le premier comme pour le second semestre et qu'il avait été absent sans justificatif à de nombreux travaux dirigés précisément identifiés, pour en déduire l'absence de caractère réel et sérieux des études poursuivies. Ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, cet arrêté est suffisamment motivé et a été pris à l'issue d'un examen de la situation personnelle de M. A... D....
4. En vertu de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant " (...) ". Le renouvellement de cette carte est subordonné, notamment, à la justification par son titulaire de la réalité et du sérieux des études qu'il a déclaré accomplir.
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... D..., arrivé en France en septembre 2017, s'est inscrit en première année de licence en droit à l'UFR de droit, sciences sociales et de gestion de l'Université de Corse pour l'année universitaire 2017/2018. Il ne s'est pas présenté à différentes épreuves, tant à la première qu'à la seconde session, était absent de nombreux travaux dirigés, s'est vu attribuer des notes nulles dans plusieurs matières, telle que le droit constitutionnel ou l'histoire des institutions, et a été déclaré défaillant aux épreuves tant du premier que du second semestre. Les difficultés matérielles et de logement qu'il allègue avoir rencontrées au cours de l'année ne peuvent pas suffire à expliquer ses absences et ses échecs répétés aux différentes épreuves à la date de la décision du préfet de la Haute-Corse. Même si l'intéressé s'est réinscrit en première année de licence en droit pour l'année universitaire 2018/ 2019 et a, postérieurement à l'arrêté en litige, été admis en octobre 2019 avec une moyenne de 10/20 aux épreuves de la première année de licence, le préfet de la Haute-Corse a pu, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni commettre d'erreur d'appréciation, estimer, qu'à la date à laquelle il a statué sur la demande, le caractère insuffisamment sérieux des études menées par M. A... D... justifiait le refus de renouvellement de la carte de séjour "étudiant" qu'il sollicitait.
6. La décision de refus de séjour n'étant pas entachée d'illégalité, le moyen invoqué par la voie de l'exception à l'encontre de la décision faisant obligation à M. A... D... de quitter le territoire français et tiré de l'illégalité de cette décision de refus de séjour, doit être écarté.
7. Les moyens tirés de ce que la décision faisant obligation à M. A... D... de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ne sont pas assortis des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.
8. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. - L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Le délai de départ volontaire accordé à l'étranger peut faire l'objet d'une prolongation par l'autorité administrative pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. L'étranger est informé par écrit de cette prolongation. (...) ".
9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... D... aurait demandé au préfet de lui accorder un délai de départ supérieur au délai légal de trente jours. En se bornant à soutenir qu'un délai supérieur devait lui être accordé eu égard à ce qu'il était inscrit en 2ème année de licence pour l'année universitaire 2019/2020, alors au demeurant que cette inscription n'était pas encore intervenue à la date de l'arrêté en litige, il ne justifie d'aucune circonstance particulière de nature à rendre nécessaire la prolongation de ce délai au-delà de trente jours. Par suite, le préfet de la Haute-Corse n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation de la situation de l'intéressé en retenant le délai légal de trente jours.
10. Il résulte de ce qui précède que M. A... D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia rejeté sa demande.
Sur la requête n° 20MA00964 tendant à la suspension de l'arrêté du 7 mai 2019 du préfet de la Haute-Corse :
11. La Cour statuant au fond, par le présent arrêt, sur les conclusions présentées par M. A... D... à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Corse du 7 mai 2019, sa requête tendant à la suspension de l'exécution de ce même arrêté a perdu son objet. Par suite, il n'y a plus lieu d'y statuer.
Surs les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des frais liés au litige :
12. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par M. A... D... aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions la requête n° 20MA00964 de M. A... D... à fin de suspension de l'exécution de l'arrêté du préfet de la Haute-Corse du 7 mai 2019.
Article 2 : La requête de M. A... D... enregistrée sous le n° 20MA00989 est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... A... D..., à Me F... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute- Corse.
Délibéré après l'audience du 2 octobre 2020, où siégeaient :
- M. B..., président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- M. Coutier, premier conseiller,
- Mme E..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 16 octobre 2020.
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N° 20MA00964, 20MA00989
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