Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 11 mai 2018, Mme F..., représentée par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 18 décembre 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet l'Hérault du 30 mai 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour et à défaut de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
S'agissant de la décision portant refus de séjour :
- cette décision est entachée de vice d'incompétence dès lors que son signataire bénéficiait d'une délégation générale ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas l'admission exceptionnelle au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 février 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient s'en remettre à l'argumentation développée en première instance.
Mme F... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 mars 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- et les observations de Me G..., substituant Me C..., représentant Mme F....
Considérant ce qui suit :
1. Mme F..., ressortissante marocaine, née le 12 juillet 1965, déclare être entrée en France le 23 janvier 2016 munie d'un visa court séjour de 90 jours, mention " ascendant non à charge ". Le 4 avril 2017 elle a présenté une demande d'admission au séjour au titre de sa vie privée et familiale. Mme F... relève appel du jugement du 18 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 mai 2017 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
2. Par arrêté préfectoral n° 2016-I-1282 du 7 décembre 2016, régulièrement publié le 20 décembre 2016 au recueil des actes administratifs de l'État dans le département de l'Hérault, le préfet de l'Hérault a accordé une délégation de signature à M. B... E..., sous-préfet hors-classe, secrétaire général de la préfecture de l'Hérault, à l'effet de signer " tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'État dans le département de l'Hérault " et que cette délégation comprend notamment " la signature de tous les actes administratifs et correspondances relatifs au séjour et à la police des étrangers (...) " Cette délégation qui, contrairement à ce qui est soutenu, n'a pas une portée générale, donnait légalement compétence à M. E... pour signer la décision de refus de séjour en litige. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire manque en fait et doit être écarté.
3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit :/ (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme F..., entrée en France le 23 janvier 2016, ne justifiait que d'une durée de séjour brève d'un peu moins de dix-huit mois à la date de la décision contestée. Si elle est divorcée et mère de trois enfants vivant en France et en Italie, et réside auprès de sa fille, qui a la nationalité française, son divorce a été prononcé depuis 2010 et elle a vécu au Maroc jusqu'à l'âge de cinquante ans. Par ailleurs, il n'est pas établi que sa présence serait indispensable auprès de son gendre et de ses petits-enfants, atteints de myopathie, l'assistance quotidienne par une tierce personne nécessitée par leur état de santé pouvant être assurée par la fille de l'intéressée et les services médico-sociaux. En dépit du suivi psychologique dont elle fait l'objet sur le territoire national et de ses efforts d'apprentissage de la langue française, l'intéressée ne démontre pas que le centre de ses intérêts privés et familiaux est établi en France, ni qu'elle se trouve dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu toute sa vie. Dans ses conditions, eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de la requérante, la décision en litige n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, et n'a, par suite, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
5. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) ".
6. Les arguments invoqués par Mme F..., tels que mentionnés au point 4 ne relèvent pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels. Dès lors, le préfet de l'Hérault n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer une carte de séjour temporaire sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
7. Il résulte de ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soulever, par la voie de l'exception, l'illégalité du refus de séjour qui lui a été opposé par le préfet de l'Hérault à l'appui de sa demande d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
8. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 4, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter également ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles tendant à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme au titre des frais d'instance non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête présentée par Mme F... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...F..., au ministre de l'intérieur et à Me C....
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 29 mars 2019, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme D..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 avril 2019.
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N° 18MA02168
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