Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 avril 2018, Mme A..., représentée par Me F..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 16 février 2018 ;
2°) d'annuler la décision du maire de Roquebrune-Cap-Martin du 14 janvier 2016 ;
3°) d'enjoindre à la commune de Roquebrune-Cap-Martin de la réintégrer en qualité d'agent statutaire stagiaire à temps complet à partir du 19 juin 2007 et de reconstituer sa carrière ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Roquebrune-Cap-Martin la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête d'appel est recevable ;
- les décisions successives de renouvellement de ses contrats à durée déterminée étaient illégales dans la mesure où elles ne visaient pas à remplacer des fonctionnaires momentanément absents ;
- elle ne pouvait être recrutée en qualité d'agent contractuel pour une durée de 20 mois du 19 juin 2007 au 28 février 2009 mais seulement en qualité d'agent statutaire ;
- elle doit être regardée comme ayant occupé un poste d'agent statutaire stagiaire depuis le 19 juin 2007.
Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juin 2018, la commune de Roquebrune-Cap-Martin, représentée par la SELAS LLC et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984;
- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;
- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;
- le décret n° 92-1194 du 4 novembre 1992 ;
- le décret n° 2006-1690 du 22 décembre 2006 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guidal,
- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,
- et les observations de Me F..., représentant Mme A..., et de Me E..., substituant la SELAS LLC et associés, représentant la commune de Roquebrune-Cap-Martin.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... a été recrutée à compter du 19 juin 2007 par la commune de Roquebrune-Cap-Martin en qualité d'adjoint technique de 2ème classe non titulaire en vertu d'un contrat à durée déterminée pour une durée d'un mois. Un nouveau contrat a été conclu pour la période comprise entre le 20 juillet 2007 et le 31 janvier 2008. Puis ce contrat a fait l'objet de renouvellements successifs pour des périodes d'une durée variable de six mois à un an à temps non complet, puis à temps complet à compter du 1er septembre 2012 et, en dernier lieu, pour la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 2015. Par une lettre du 23 décembre 2015, l'intéressée a demandé la requalification de son engagement en contrat à durée indéterminée. Mme A... relève appel du jugement du 16 février 2018, par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 14 janvier 2016 par laquelle le maire de Roquebrune-Cap-Martin a rejeté sa demande.
Sur la légalité de la décision du 14 janvier 2016 du maire de Roquebrune-Cap-Martin :
2. Il résulte des dispositions de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984, dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, que les collectivités territoriales ne peuvent recruter par contrat à durée déterminée des agents non titulaires que, d'une part, au titre des premier et deuxième alinéas de cet article, en vue d'assurer des remplacements momentanés ou d'effectuer des tâches à caractère temporaire ou saisonnier définies à ces alinéas et, d'autre part, s'agissant des dérogations, énoncées aux quatrième, cinquième et sixième alinéas du même article, au principe selon lequel les emplois permanents sont occupés par des fonctionnaires, lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer certaines fonctions, lorsque, pour des emplois de catégorie A, la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient et, dans les communes de moins de 1 000 habitants, lorsque la durée de travail de certains emplois n'excède pas la moitié de celle des agents publics à temps complet.
3. Aux termes des septième et huitième alinéas du même article 3 de la loi du 26 janvier 1984, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 : " Les agents recrutés conformément aux quatrième, cinquième, et sixième alinéas sont engagés par des contrats à durée déterminée, d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables, par reconduction expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. / Si, à l'issue de la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée ". Aux termes de l'article 21 de la loi du 12 mars 2012 relative à l'accès à l'emploi titulaire et à l'amélioration des conditions d'emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique : " A la date de publication de la présente loi, la transformation de son contrat en contrat à durée indéterminée est obligatoirement proposée à l'agent contractuel, employé par une collectivité territoriale ou un des établissements publics mentionnés à l'article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée conformément à l'article 3 de la même loi, dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la présente loi, qui se trouve en fonction ou bénéficie d'un congé prévu par le décret pris en application de l'article 136 de ladite loi. / Le droit défini au premier alinéa du présent article est subordonné à une durée de services publics effectifs, accomplis auprès de la même collectivité ou du même établissement public, au moins égale à six années au cours des huit années précédant la publication de la présente loi. / Toutefois, pour les agents âgés d'au moins cinquante-cinq ans à cette même date, la durée requise est réduite à trois années au moins de services publics effectifs accomplis au cours des quatre années précédant la même date de publication " ;
4. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, pour les agents contractuels de la fonction publique territoriale recrutés sur un emploi permanent, en fonction au moment de la publication de la loi du 12 mars 2012, le renouvellement de contrat régi par l'article 21 de cette loi doit intervenir selon les règles fixées par les septième et huitième alinéas de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 et ne peut donc concerner que les titulaires de contrats entrant dans les catégories énoncées aux quatrième, cinquième et sixième alinéas de ce même article, soit ceux recrutés lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer certaines fonctions, soit encore, lorsque, pour des emplois de catégorie A, la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient soit, enfin, dans les communes de moins de 1 000 habitants, lorsque la durée de travail de certains emplois n'excède pas la moitié de celle des agents publics à temps complet.
5. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été recrutée en qualité d'adjoint technique de 2ème classe non titulaire, relevant de la catégorie C, pour exercer des fonctions d'exécution dans le domaine de la restauration en vue de faire face, notamment au cours de certaines périodes, au remplacement d'agents indisponibles. A hauteur d'appel, l'intéressée ne conteste plus qu'elle n'entrait pas dans le cadre de l'une des hypothèses prévues par les dispositions précitées dans laquelle en cas de contrats successifs d'une durée cumulée supérieure à six ans, l'obligation de renouvellement ultérieur doit intervenir par une décision expresse et pour une durée indéterminée.
6. A supposer, comme le soutient la requérante, que les décisions successives de renouveler ses contrats à durée déterminée auraient été illégales dans la mesure où elles n'auraient pas visé au remplacement de fonctionnaires momentanément absents et que le poste qu'elle occupait aurait dû être pourvu par le recrutement d'un agent statutaire, la nature des fonctions exercées, ainsi que le nombre et la durée cumulée des contrats en cause ne donnaient pas à l'intéressée un droit au renouvellement de son contrat ou à sa transformation en contrat à durée indéterminée. Par suite, le refus de renouvellement et de transformation de son contrat qui a été opposé à Mme A... n'est entaché d'aucune illégalité.
7. Aux termes de l'article 46 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " La nomination, intervenant dans les conditions prévues aux articles 25,36 ou 38, paragraphes a et d, ou 39 de la présente loi à un grade de la fonction publique territoriale présente un caractère conditionnel. La titularisation peut être prononcée à l'issue d'un stage dont la durée est fixée par le statut particulier ". Selon les dispositions de l'article 1er du décret du 4 novembre 1992 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires stagiaires de la fonction publique territoriale : " Est fonctionnaire territorial stagiaire la personne qui, nommée dans un emploi permanent de la hiérarchie administrative des communes, (...) accomplit les fonctions afférentes audit emploi et a vocation à être titularisée dans le grade correspondant à cet emploi ". Aux termes de l'article 7 du décret du 22 décembre 2006 susvisé portant statut particulier du cadre d'emploi des adjoints administratifs territoriaux : " Les candidats recrutés en qualité d'adjoint administratif territorial de 2e classe sur un emploi d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public d'une collectivité territoriale (...) sont nommés stagiaires par l'autorité territoriale investie du pouvoir de nomination pour une durée d'un an. / (...) ".
8. Si Mme A... s'est vu confier aux termes de contrats à durée déterminée successifs des fonctions d'agent territorial d'exécution dans le domaine de la restauration correspondant à celles qui peuvent être exercées par un adjoint technique territorial de 2ème classe, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier qu'elle aurait été nommée dans un emploi permanent de la hiérarchie administrative de la commune par l'autorité territoriale compétente. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'elle devait être regardée comme ayant occupé un emploi en qualité d'agent statutaire stagiaire depuis le 19 juin 2007 qui lui aurait donné vocation à être titularisée. En tout état de cause, l'intéressée s'est bornée à solliciter la régularisation de sa situation par la signature d'un contrat d'adjoint technique de 2ème classe non titulaire à temps complet à durée indéterminée, avec toutes conséquences de droit et non pas sa nomination rétroactive en tant que fonctionnaire stagiaire. Son argumentation relative a l'existence d'une telle qualité est, par suite, inopérante à l'encontre de la décision en litige.
9. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de Mme A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de Roquebrune-Cap-Martin de prononcer sa réintégration en qualité d'agent statutaire stagiaire à temps complet à compter du 19 juin 2007 et de reconstituer sa carrière doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Roquebrune-Cap-Martin, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme A..., au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la commune de Roquebrune-Cap-Martin présentées au même titre.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Roquebrune-Cap-Martin au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...et à la commune de Roquebrune-Cap-Martin.
Délibéré après l'audience du 12 avril 2019, où siégeaient :
- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme B..., première conseillère.
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 avril 2019.
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N° 18MA01694
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