Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée le 7 août 2018 sous le numéro 18MA03782, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 19 mars 2018 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler la décision du 16 juin 2017 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un récépissé de demande de titre de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me B... en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- la décision en litige est entachée d'un défaut d'examen sérieux ;
- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas un délai de départ volontaire supérieur à trente jours.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 juin 2018.
II. Par une requête enregistrée le 7 août 2018 sous le numéro 18MA03783, M. C...,
représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du 19 mars 2018 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2017 du préfet de l'Hérault ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou subsidiairement, de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour dans un délai de deux mois, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me B... en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le préfet a commis une erreur de droit en lui opposant l'absence d'entrée régulière sur le territoire français pour lui refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de français ;
- le motif tiré de la délivrance d'un mandat de recherche pour des faits de nature
criminelle, afin de justifier son interpellation la veille de son mariage avec une ressortissante française, est matériellement inexact ;
- l'arrêté en litige porte une atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale
disproportionnée aux buts poursuivis, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision fixant l'Algérie comme pays de destination est entachée d'illégalité eu égard au risque d'emprisonnement qu'il encourt en cas de retour dans ce pays.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 novembre 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 juin 2018.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Féménia,
- et les observations de Me B... représentant M. C....
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant algérien né le 7 juin 1988, relève appel du jugement en date du 19 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation d'une part de l'arrêté du 16 juin 2017 par lequel le préfet de l'Hérault lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours, d'autre part, l'arrêté en date du 21 septembre 2017 par lequel le préfet de l'Hérault lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à la frontière.
Sur la jonction :
2. Les requêtes susvisées de M. C... tendent à l'annulation du même jugement. Elles
ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt.
Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :
3. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit:/ (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) ".
4. Si M. C... déclare être entré en France en 2001 avec son père alors qu'il était mineur et fait valoir qu'il réside continuellement en France depuis cette époque, il ressort des pièces du dossier que par arrêté du 7 juin 2011 dont la légalité a été confirmée par le tribunal administratif de Marseille par jugement du 8 novembre 2011 puis par arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 28 juin 2013, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. C... et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois. Le 30 janvier 2007, il a été reconduit à la frontière et est revenu en France à une date inconnue. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu les stipulations précitées en lui opposant l'absence d'entrée régulière sur le territoire français.
5. Il ressort des pièces du dossier que le requérant a fait l'objet d'un mandat de recherche pour " vol ayant entraîné une ITT de dix jours, arrestation, enlèvement, séquestration, détention arbitraire avec torture ou acte de barbarie " émis le 3 mars 2017 par le juge d'instruction auprès le tribunal de grande instance de Créteil. Le motif par lequel le préfet de l'Hérault a mentionné l'existence de ce mandat de recherche n'est donc pas entaché d'inexactitude matérielle quand bien même l'intéressé n'aurait pas fait l'objet de poursuites pénales à la suite de son placement en garde en vue.
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l 'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit:/ (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ".
7. Il ressort des pièces du dossier que M. C... déclare être entré en France en 2001 avec son père alors qu'il était mineur. Si l'intéressé fait valoir qu'il réside continuellement en France depuis cette époque, il ressort des pièces du dossier qu'il n'a été scolarisé en France qu'au titre de l'année 2002/2003. Par arrêté du 7 juin 2011, comme il a été dit au point 4, le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois. Le 30 janvier 2007, il a été reconduit à la frontière et est revenu en France à une date inconnue. Il n'établit par aucune pièce versée au débat vivre de façon continue en France depuis son retour sur le territoire français. S'il est marié avec une ressortissante française, son mariage célébré le 18 juillet 2017 est très récent au regard de la décision en litige et sa relation avec son épouse ne présente pas un caractère ancien. Si, à la date de la décision en litige, le père du requérant résidait en France sous couvert d'un certificat de résidence de dix ans, et si l'une des soeurs de l'intéressé est de nationalité française, il n'établit pas ne plus disposer d'attaches dans son pays d'origine. Par ailleurs, M. C... est sans enfant, sans emploi ni ressources. Dans ces conditions, il ne démontre pas une insertion particulière dans la société française, ni ne justifie l'ancienneté et la stabilité de ses liens personnels et familiaux en France. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige, au regard des buts poursuivis par l'administration, aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Sur la légalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire français :
8. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux développées au point précédent.
Sur la légalité de la décision accordant un délai de départ volontaire de trente jours :
9. Aux termes du II. de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. (...) L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. ".
10. Les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile laissent, de façon générale, un délai de trente jours pour le départ volontaire de l'étranger qui fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Alors même que ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le délai de départ volontaire soit prolongé, le cas échéant, d'une durée appropriée pour les étrangers dont la situation particulière le nécessiterait, l'autorité administrative, lorsqu'elle accorde ce délai d'un mois, n'est pas tenue de motiver sa décision sur ce point si l'étranger, comme en l'espèce, n'a présenté aucune demande en ce sens.
11. M. C... reprend en appel le moyen tiré de l'erreur du défaut d'examen sérieux et du défaut de motivation entachant les décisions en litige déjà présentés devant le tribunal administratif de Montpellier. En l'absence d'élément nouveau, ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
12. En se bornant à invoquer son mariage avec une ressortissante française, le requérant ne démontre pas que le préfet aurait entaché son appréciation d'erreur manifeste au regard des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
13. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 que les attaches personnelles et familiales en France de M. C... sont récentes et limitées à la présence de son épouse avec laquelle il s'est mariée le 18 juillet 2017 et de sa soeur. Dans ces circonstances, la décision fixant le pays dont il a la nationalité comme destination en cas d'exécution de la mesure d'éloignement dont il fait l'objet ne porte pas une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
14. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ". Selon l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".
15. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a été appelé à servir sous les drapeaux par une décision du chef du centre du service militaire à Sétif datée du 24 mars 2014. En se bornant à faire valoir que l'article 254 du code du service militaire algérien prévoit une peine d'emprisonnement pour celui qui se soustrait à une telle obligation, alors que l'état d'insoumission est soumis à une enquête des autorités algériennes, M. C... n'établit pas la réalité des risques personnels qu'il encourrait en cas de retour dans son pays d'origine. Dans ces conditions, la décision fixant le pays de renvoi ne méconnait ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation des arrêtés du 16 juin 2017 et du 21 septembre 2017 du préfet de l'Hérault. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D É C I D E :
Article 1er: Les requêtes de M. C... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., au ministre de l'intérieur et à Me B....
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 14 décembre 2018, où siégeaient :
M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Féménia, première conseillère,
- M. Coutier, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 28 décembre 2018.
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N° 18MA03782, 18MA03783
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