Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 15 juin 2018, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 14 février 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 7 décembre 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour et à défaut de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant de la régularité du jugement :
- le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la
convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard de l'état de santé de son fils.
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- le préfet de l'Hérault n'a pas examiné sa situation de manière complète au regard de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile afin de s'assurer qu'il ne disposait pas d'un droit au séjour à un autre titre que l'asile ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, son épouse et son fils souffrant de problèmes de santé nécessitant des soins médicaux ;
- elle est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant dès lors que son fils est scolarisé en France.
S'agissant de la durée du délai de départ volontaire :
- eu égard à la scolarité de son enfant, le préfet aurait dû lui accorder un délai supérieur à trente jours pour quitter le territoire français.
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- elle méconnaît l'article L 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales au regard des représailles auxquelles il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine.
Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2019, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il soutient s'en remettre à l'argumentation produite en première instance.
M. D... A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 avril 2018
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés
fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant Albanais, né le 28 décembre 1978, déclare être entré en France le 28 novembre 2016 avec son épouse et son enfant mineur. Il a sollicité l'asile le 19 décembre 2016. Sa demande a fait l'objet d'une décision de rejet le 28 avril 2017 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, dont la contestation a été rejetée par un arrêt de la Cour nationale du droit d'asile du 9 novembre 2017. M. A... relève appel du jugement du 14 février 2018 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 décembre 2017 par lequel le préfet de l'Hérault lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il résulte des motifs mêmes du point 7 de son jugement, que le magistrat désigné, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a expressément répondu au moyen soulevé par le requérant tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'omission à statuer sur ce point.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire :
3. Aux termes de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. "
4. Il ressort des termes mêmes de la décision contestée, qui fait état du parcours administratif de M. A... au titre de l'asile, des conditions de son séjour en France et d'éléments détaillés concernant sa situation familiale, que le préfet s'est prononcé après avoir procédé à un examen complet de la situation personnelle du requérant. Par ailleurs, les dispositions précitées de l'article L. 743-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'ont ni pour objet, ni pour effet d'obliger l'autorité administrative à s'assurer que le demandeur d'asile débouté ne peut bénéficier d'un droit au séjour à un autre titre, en l'absence de demande en ce sens. En tout état de cause, en l'espèce, le préfet de l'Hérault a vérifié que la situation familiale de M. A... ne s'opposait pas à une mesure d'éloignement.
5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... ne justifie ni de sa date d'entrée, ni de sa résidence régulière en France. Il est marié avec une compatriote qui fait également l'objet d'une mesure d'éloignement. Le requérant ne démontre pas l'impossibilité de poursuivre la vie familiale en Albanie, où il a résidé jusqu'à l'âge de trente-huit ans et où vivent d'autres membres de sa famille, la réalité des risques allégués en cas de retour n'étant pas démontrée. Si l'épouse et le fils du requérant font l'objet d'un suivi médical en France, il n'est pas justifié qu'ils ne pourraient poursuive les soins dans leur pays d'origine. Dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de son séjour en France, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquelles elle a été prise. Pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....
7. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
8. Si le fils de M. A..., âgé de treize ans est scolarisé en France, cette seule circonstance ne suffit pas à établir que celui-ci, qui a vécu dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de douze ans, ne pourrait poursuivre sa scolarité dans le pays dont il a la nationalité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
En ce qui concerne la décision de refus d'accorder un délai de départ volontaire :
9. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " II. - Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...) L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) ".
10. Eu égard aux conditions de séjour de M. A... et de son épouse ainsi qu'au jeune âge de leur enfant qui a la possibilité de poursuivre sa scolarité dans son pays d'origine, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de l'Hérault a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant qu'un délai de départ volontaire de trente jours pour quitter le territoire français.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
11. Devant la Cour, M. A... se borne à reprendre l'argumentation soumise au tribunal administratif de Montpellier dirigée contre la décision contestée et tirée de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article de 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En l'absence d'élément de fait ou de droit nouveau invoqués par l'intéressé, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier, dès lors que sa réponse est elle-même suffisante et n'appelle pas de nouvelles précisions en appel.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être également rejetées.
Sur les frais liés au litige :
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique s'opposent à ce que la somme réclamée pour le compte de Me B... sur leur fondement soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D É C I D E :
Article 1er : La requête présentée par M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., au ministre de l'intérieur et à Me B....
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2019, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 29 mars 2019.
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N° 18MA02828
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