Procédure devant la Cour :
Par une requête et deux mémoires enregistrés le 9 juin 2015, le 3 février 2017 et le 16 mars 2017 sous le n° 15MA02356, M. A..., représenté par Me B... demande à la Cour :
1°) de réformer ce jugement du 9 avril 2015 ;
2°) d'enjoindre à l'administration de reconstituer sa carrière dès le 1er septembre 2002, dans le délai de trois mois, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;
3°) de condamner l'État à lui verser la somme de 381 768,29 euros, en réparation du préjudice de carrière qu'il estime avoir subi ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement ne se prononce pas sur la faute de l'État à n'avoir pas procédé à son reclassement sur un poste sédentaire ;
- en méconnaissant ses obligations en matière de reclassement, l'État a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
- à ce jour, aucun poste adapté à son taux d'incapacité physique ne lui a été proposé ;
- l'illégalité fautive du reclassement dont il a fait l'objet lui a fait subir un préjudice de carrière qu'il évalue à la somme de 381 768,29 euros, correspondant à la perte des traitements qu'il aurait dû percevoir, ainsi qu'à une perte de chance sérieuse de bénéficier d'un avancement de carrière normal ;
- l'illégalité de la situation dans laquelle il se trouve toujours révèle, outre la carence fautive de l'État, une discrimination liée à son handicap ;
- la somme qu'il a perçue au titre de la reconstitution de sa carrière, entre le 1er septembre 2002 et le 21 janvier 2008, est insuffisante.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 décembre 2016, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- l'État n'a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité, dès lors qu'il a été procédé au reclassement du requérant sur un poste sédentaire adapté depuis sa mise à disposition du département des Hautes-Alpes et son placement en détachement sans limitation de durée auprès de cette autorité ;
- le grade étant distinct de l'emploi, la carrière de M. A... a été reconstituée au grade qui était le sien à la date de son accident de service, de sorte qu'il ne peut prétendre à la perception du traitement d'un maître ouvrier ;
- il n'a donc subi aucun préjudice de carrière.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n° 91-462 du 14 mai 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coutel,
- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., substituant Me B..., représentant M. A....
1. Considérant que M. A... a été recruté, en qualité d'ouvrier professionnel, dans le corps des ouvriers professionnels des établissements d'enseignement du ministère de l'éducation nationale qui a été absorbé par le corps des adjoints techniques des établissements d'enseignement du ministère de l'éducation nationale ; qu'à la suite d'un accident de service, il a été reconnu inapte à l'exercice de son " poste statutaire " mais apte à la reprise d'un " travail sédentaire ", par avis du comité médical départemental des Bouches-du-Rhône rendu le 23 mai 2002 ; qu'après avoir été affecté en septembre 2002 dans un collège, à titre provisoire, sur un poste de maître ouvrier, l'intéressé a été radié des cadres pour abandon de poste, par décision du 24 septembre 2003 ; que cette décision a été annulée par un arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille n° 05MA00337, du 15 janvier 2008 ; qu'en exécution de cette décision de justice, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a, par arrêtés des 26 mai et 20 octobre 2008, mis M. A... à la disposition de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et l'a détaché, sans limitation de durée, auprès de la même autorité ; que ces arrêtés ont toutefois été annulés par un jugement du tribunal administratif de Marseille, n° 0901451, du 5 avril 2012 ; que, par un arrêté du 7 mai 2012, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a dès lors détaché M. A... auprès du département des Hautes-Alpes ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé ce dernier arrêté pour incompétence de son auteur, et rejeté au fond, pour le surplus, les conclusions indemnitaires du requérant ; que le requérant fait appel de ce jugement sur ce dernier point ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que le jugement attaqué vise le moyen soulevé par le requérant et tiré de l'absence de reclassement sur un poste sédentaire adapté à son taux d'incapacité physique ; qu'au point 6 du jugement attaqué, le tribunal a également rejeté au fond ses conclusions à fin d'indemnisation ; que, ce faisant, le premier juge a nécessairement et implicitement écarté le moyen fondé sur l'existence d'une faute commise par l'État dans le cadre de la procédure de reclassement ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient M. A..., le jugement attaqué n'est entaché d'aucune omission de statuer ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la reconstitution de la carrière de M. A... :
3. Considérant en premier lieu, qu'aux termes de l'article 12 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Le grade est distinct de l'emploi (...) " ; qu'aux termes de l'article 17 du décret du 14 mai 1991 modifié, fixant les dispositions statutaires applicables au corps des adjoints techniques des établissements d'enseignement du ministère de l'éducation nationale et au corps des techniciens de l'éducation nationale, dans sa rédaction anciennement applicable : " Le corps des ouvriers professionnels des établissements d'enseignement du ministère de l'éducation nationale comprend deux grades : Ouvrier professionnel ; Ouvrier professionnel principal " ; qu'aux termes de l'article 2 de ce même décret dans sa rédaction applicable à la date du 7 mai 2012 : " Le corps des adjoints techniques des établissements d'enseignement du ministère de l'éducation nationale comprend le grade d'adjoint technique de 2e classe, le grade d'adjoint technique de 1re classe, le grade d'adjoint technique principal de 2e classe et le grade d'adjoint technique principal de 1re classe (...) " ; que, si le statut du corps des adjoints techniques s'est substitué à celui des ouvriers professionnels, la seule circonstance que l'intéressé a été placé provisoirement sur un emploi de maître ouvrier par arrêté du 5 septembre 2002, n'a eu ni pour objet ni pour effet de lui octroyer le grade de maître ouvrier ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que la carrière de l'intéressé a d'abord été reconstituée au grade d'ouvrier professionnel auquel s'est par la suite substitué celui d'adjoint technique de première classe, entre le 1er septembre 2002 et le 31 décembre 2008 ;
En ce qui concerne l'invocation d'un préjudice de carrière :
4. Considérant que, par arrêté du 7 mai 2012, M. A... a été détaché à partir du 1er janvier 2009 auprès du département des Hautes-Alpes, dans le grade d'adjoint technique de première classe ; qu'à supposer qu'à cette occasion, l'intéressé n'aurait pas été affecté sur un emploi adapté à son handicap, cette seule circonstance n'est pas de nature à établir qu'il n'aurait pas perçu les traitements et indemnités afférents à son grade et son emploi ; que, par suite, le requérant n'établit pas l'existence du préjudice qu'il invoque ;
5. Considérant enfin, que M. A... n'avance aucun argument précis de nature à établir qu'il aurait perdu une chance sérieuse d'obtenir un avancement plus favorable que celui dont il a bénéficié ; que cette circonstance n'est pas davantage établie par l'instruction ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté le surplus des conclusions de sa requête ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2017, où siégeaient :
- M. Gonzales, président,
- M. Renouf, président assesseur,
- M. Coutel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 4 avril 2017.
N° 15MA02356 2