Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 13 avril 2015, Mme A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 12 mars 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet du Gard, à titre principal, de lui délivrer le titre de séjour sollicité, dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour lui ouvrant droit au travail dans le délai de huit jours à compter de ladite notification, ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa demande, et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois, ce sous la même astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à MeC..., en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ce règlement emportant renonciation à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- l'arrêté est entaché d'une insuffisance de motivation ;
- la commission du titre de séjour aurait dû être consultée ;
- l'arrêté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que celles de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle réside en France depuis 2003 aux côtés de ses parents et de ses cinq frères et soeurs ;
- les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de même que la circulaire du 28 novembre 2012 qui a un caractère réglementaire ont été méconnues dans la mesure où elle est présente en France depuis plus de dix ans aux côtés de sa famille ;
- le préfet a commis une erreur manifeste quant à l'appréciation des conséquences de sa décision de refus de séjour sur sa situation personnelle ;
- l'obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale et de motivation ;
- elle ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès lors qu'elle était en droit de prétendre à la délivrance d'un titre de séjour ;
- cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2015, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par l'appelante n'est fondé.
Par ordonnance du 29 septembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 6 novembre 2015.
La demande d'aide juridictionnelle de Mme A... a été rejetée par une décision du 21 octobre 2015, confirmée par décision du 11 mars 2016.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Pena.
1. Considérant que Mme B...A..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 12 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 1er décembre 2014 par laquelle le préfet du Gard a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 1er décembre 2014 du préfet du Gard comporte, dans ses visas et ses motifs, tous les éléments de droit et de fait sur lesquels il se fonde et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière de Mme A... au regard des stipulations et des dispositions législatives et réglementaires applicables ; qu'il est ainsi suffisamment motivé ;
3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;
4. Considérant que Mme A..., célibataire et sans enfant, ne démontre pas davantage en appel qu'en première instance, par les pièces versées au dossier, la continuité de sa présence sur le territoire français depuis 2003 comme elle persiste à l'alléguer ; que les attestations peu circonstanciées de tiers ainsi que celle d'un médecin certifiant lui avoir prodigué des soins de manière épisodique depuis cette date sont en effet insuffisamment probantes pour établir ladite allégation ; que si elle fait par ailleurs valoir que trois de ses frères et soeurs ainsi que sa mère ont pu bénéficier de la procédure de regroupement familial initiée par son père en 2001 et que son autre frère se trouve également en situation régulière en France depuis l'année 2009, il est toutefois constant qu'elle demeure célibataire et sans enfant, qu'elle est hébergée chez ses parents et qu'elle n'établit pas avoir cherché à s'insérer au sein de la société française d'une quelconque manière ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier que, lorsque l'un de ses frères et l'une de ses soeurs ont entrepris les démarches de régularisation administrative, en 2009 pour l'un et 2010 pour l'autre, tous deux avaient indiqué aux services de la préfecture que l'appelante ainsi que sa soeur Fatiha se trouvaient alors au Maroc ; que, dans ces conditions, la décision de refus de titre de séjour n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ;
6. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles exposées au point 4, Mme A... n'est pas fondée soutenir que son admission au séjour répondait à des considérations humanitaires et se justifiait au regard de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le préfet du Gard aurait méconnu lesdites dispositions doit être écarté ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, relatives aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne constituent pas des lignes directrices dont les intéressés peuvent utilement se prévaloir devant le juge ;
8. Considérant, en cinquième et dernier lieu, qu'aux termes des articles L. 312-2 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour est saisie par l'autorité administrative qui envisage de refuser de délivrer un titre de séjour à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou à un étranger qui a formé une demande d'admission exceptionnelle au séjour et qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ; que Mme A... n'étant pas, ainsi qu'il a été dit, en situation d'obtenir de plein droit la délivrance d'un titre de séjour en application de l'article L. 313-11 et ne justifiant pas qu'elle résiderait en France habituellement depuis plus de dix ans, le préfet du Gard n'était dès lors pas tenu de saisir ladite commission ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Considérant, en premier lieu, que lorsqu'une obligation de quitter le territoire français assortit un refus de séjour, la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de mention spécifique ; qu'en l'espèce, comme il a été dit au point 2, le refus de séjour opposé à Mme A... satisfait à l'obligation de motivation ; que la mesure d'éloignement est ainsi suffisamment motivée ;
10. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre ;
11. Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux qui concernent le refus de séjour, le préfet du Gard, en obligeant l'intéressée à quitter le territoire français, n'a pas méconnu les stipulations sus-rappelées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
12. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'en vertu de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : [...] 4° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" " ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 4, l'intéressée ne démontre pas, comme elle l'allègue, avoir résidé en France de manière régulière depuis 2003 ; qu'elle n'est par suite pas fondée, en tout état de cause, à soutenir qu'elle ne pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement eu égard à sa résidence régulière en France depuis dix ans ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, tant ses conclusions à fin d'injonction que celles présentées au titre des frais irrépétibles ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Gard.
Délibéré après l'audience du 23 février 2016 où siégeaient :
- M. Gonzales, président,
- M. Renouf, président assesseur,
- Mme Pena, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 15 mars 2016.
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N° 15MA014965