Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 11 août 2017, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) de réformer ce jugement du 15 mars 2017 en tant que le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 21 juillet 2016 par laquelle le maire de Marseille a décidé de ne pas renouveler son contrat et a limité à une indemnité réparant la perte de revenus subie l'indemnité au versement de laquelle il a condamné la commune de Marseille en réparation du préjudice qu'il a subi ;
2°) d'annuler la décision du 21 juillet 2016 par laquelle le maire de Marseille a décidé de ne pas renouveler son contrat ;
3°) de condamner la commune de Marseille à lui verser la somme complémentaire de 149 200 euros ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Marseille la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision du 21 juillet 2016 refusant de renouveler son contrat est illégale en ce qu'il était fondé à refuser le changement de poste proposé qui présupposait qu'il était inapte à occuper son poste précédent ;
- la perte de revenus résultant de la perte de chance d'être titularisé ou de bénéficier d'un contrat à durée indéterminée s'élève à 109 200 euros ;
- il justifie de la réalité de son préjudice moral et des troubles subis dans ses conditions d'existence qui doivent être réparés à hauteur de 20 000 euros pour chacun de ces deux chefs de préjudice.
Par un mémoire en défense enregistré le 20 mars 2019, la commune de Marseille, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident :
- d'annuler les articles 3 et 4 de ce jugement du 28 juin 2017 par lesquels le tribunal administratif de Marseille l'a condamnée à verser à M. A... une indemnité réparant la perte de revenus subie et a renvoyé ce dernier devant elle afin qu'il soit procédé à la liquidation de cette indemnité ;
- de rejeter les conclusions de M. A... devant le tribunal administratif de Marseille tendant à la réparation de ce préjudice ;
3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable en l'absence de signature ;
- les conclusions indemnitaires de première instance étaient irrecevables en l'absence de demande préalable adressée à l'administration ;
- les conclusions indemnitaires fondées sur la méconnaissance des dispositions de la loi du 12 mars 2012 sont irrecevables en ce qu'elles sont nouvelles en appel ;
- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 15 février 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 15 mars 2019 à 12 heures.
Par ordonnance du 8 mars 2019, la clôture de l'instruction a été reportée au 22 mars 2019 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- l'arrêté du 20 janvier 2017 relatif aux caractéristiques techniques de l'application permettant l'utilisation des téléprocédures devant le Conseil d'Etat, les cours administratives d'appel et les tribunaux administratifs ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,
- les conclusions de M. Coutel, rapporteur public,
- et les observations de MeD..., représentant la commune de Marseille.
Considérant ce qui suit :
1. Par un contrat conclu pour la durée d'un an et prenant effet au 1er janvier 2014, M. A... a été recruté par la commune de Marseille en qualité d'adjoint territorial d'animation de 2ème classe non titulaire à temps non complet pour occuper l'emploi d'animateur socio-culturel au service de la jeunesse. Par arrêtés du 14 avril 2015 et du 16 février 2016, il a été placé d'office par le maire de Marseille en position de congé de maladie ordinaire respectivement, jusqu'au 31 janvier 2016, puis, sans traitement, à compter du 13 janvier 2016. Son contrat qui avait été renouvelé à trois reprises, venant à échéance le 31 juillet 2016, il s'est vu proposer, le 14 juin 2016, un nouveau contrat pour exercer des fonctions correspondant à un cadre d'emplois de catégorie C, à l'exception de celui d'adjoint territorial d'animation. M. A... ayant décliné cette proposition, le maire de Marseille lui a donné acte, par lettre du 21 juillet 2016, de ce que son contrat ne serait pas reconduit à sa date d'échéance du 31 juillet 2016. Par un jugement du 28 juin 2017, le tribunal administratif de Marseille a annulé ces arrêtés du 14 avril 2015 et du 16 février 2016, a condamné la commune de Marseille à verser à M. A... une indemnité réparant la perte de revenus subie, a renvoyé ce dernier devant la commune de Marseille afin qu'il soit procédé à la liquidation de cette indemnité et a rejeté le surplus des conclusions de ses demandes, tendant notamment à l'annulation de la décision du 21 juillet 2016 et à la condamnation de la commune de Marseille à réparer le préjudice moral et les troubles d'existence résultant de l'illégalité des arrêtés du 14 avril 2015 et du 16 février 2016 ainsi que les préjudices résultant de l'illégalité de la décision du 21 juillet 2016. M. A... fait appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté ces dernières conclusions. Par la voie du recours incident, la commune de Marseille fait appel du même jugement en tant qu'il l'a condamnée à verser à l'intéressé une indemnité réparant la perte de revenus.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Marseille :
2. Aux termes de l'article R. 414-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'elle est présentée par un avocat, un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, une personne morale de droit public autre qu'une commune de moins de 3 500 habitants ou un organisme de droit privé chargé de la gestion permanente d'un service public, la requête doit, à peine d'irrecevabilité, être adressée à la juridiction par voie électronique au moyen d'une application informatique dédiée accessible par le réseau internet. (...) ". Aux termes de l'article R. 414-2 du même code : " L'identification de l'auteur de la requête, selon les modalités prévues par l'arrêté mentionné à l'article R. 414-1, vaut signature pour l'application des dispositions du présent code. / Toutefois, lorsque la requête n'a pas fait l'objet d'une signature électronique au sens du second alinéa de l'article 1367 du code civil, le requérant ou son mandataire peut, en cas de nécessité, être tenu de produire un exemplaire de sa requête revêtu de sa signature manuscrite. ".
3. Conformément aux dispositions précitées de l'article R. 414-1 du code de justice administrative, la requête de M. A..., présentée par un avocat, a été adressée au moyen de l'application informatique dénommée " télérecours " et enregistrée au greffe de la Cour le 11 août 2017. L'identification de son auteur selon les modalités de l'arrêté du 20 janvier 2017, alors en vigueur et pris en application de cet article, vaut, selon l'article R. 414-2, signature de la requête pour l'application notamment des dispositions de l'article R. 431-2. Dans ces conditions, la fin de non-recevoir opposée par la commune de Marseille tirée de ce que la requête ne porte pas la signature de son auteur doit être écartée.
Sur la recevabilité des conclusions indemnitaires présentées en première instance :
4. S'il ne résulte pas de l'instruction que M. A... a présenté devant l'administration une demande d'indemnité avant de saisir le tribunal administratif de Marseille de conclusions tendant à la condamnation de la commune de Marseille à lui verser la somme de 161 200 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité du non-renouvellement de son contrat et des décisions des 14 avril 2015 et 16 février 2016 le plaçant d'office en congé de maladie ordinaire, la commune de Marseille, qui a présenté à titre principal une argumentation sur le fond en première instance, a lié le contentieux à leur égard. Ainsi, contrairement à ce que soutient celle-ci à l'appui de son recours incident, ces conclusions étaient recevables.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
5. Un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie ni d'un droit au renouvellement de son contrat ni, à plus forte raison, d'un droit au maintien de ses clauses, si l'administration envisage de procéder à son renouvellement. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler ou de proposer à l'agent, sans son accord, un nouveau contrat substantiellement différent du précédent, que pour un motif tiré de l'intérêt du service.
6. Il ressort des pièces du dossier que la proposition adressée à M. A... par la commune de Marseille par lettre du 14 juin 2016 portait sur l'exercice de fonctions correspondant à un cadre d'emplois de catégorie C, à l'exception de celui d'adjoint territorial d'animation, dans les mêmes conditions de durée et de rémunération que le contrat initial venant à terme le 31 juillet 2016. M. A..., qui a refusé cette proposition, ne développe aucune argumentation soutenant que celle-ci porterait sur un contrat substantiellement différent du précédent. Dès lors, l'unique moyen tiré de ce que la décision du 21 juillet 2016 par laquelle le maire de Marseille l'a informé que son contrat ne serait pas reconduit à sa date d'échéance est inopérant.
Sur les conclusions indemnitaires :
7. D'une part, il est constant que M. A... a fait l'objet en 2014 d'accusations d'attouchements sur des enfants et que la plainte déposée à son encontre a été classée sans suite le 8 janvier 2015. Si, consécutivement aux décisions des 14 avril 2015 et 16 février 2016 annulées par le tribunal administratif de Marseille, son état de santé mentale, qui s'était détérioré, a évolué favorablement, l'intéressé ne peut en tout état de cause obtenir réparation que des préjudices résultant de l'illégalité de ces décisions. Eu égard au contexte dans lequel elles sont intervenues, à la nature du motif dont l'illégalité a motivé leur annulation par le juge administratif et à leurs effets, elles sont à l'origine d'un préjudice moral et de troubles dans les conditions d'existence dont M. A... est fondé à obtenir réparation à hauteur d'une somme globale de 5 000 euros.
8. D'autre part, le requérant n'établissant pas l'illégalité de la décision du 21 juillet 2016, il n'est pas fondé à être indemnisé sur ce fondement de la perte de revenus qui en résulterait, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée sur cette demande par la commune de Marseille.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a limité à une indemnité réparant la perte de revenus subie l'indemnité au versement de laquelle il a condamné la commune de Marseille en réparation du préjudice qu'il a subi et que celle-ci doit être condamnée à lui verser une somme supplémentaire de 5 000 euros. En revanche, le recours incident de la commune de Marseille doit être rejeté.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Marseille demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Marseille la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Une somme supplémentaire de 5 000 euros s'ajoutera à la somme que la commune de Marseille a été condamnée à verser à M. A... par le jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 juin 2017.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 juin 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : La commune de Marseille versera à M. A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A... et les conclusions de la commune de Marseille sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et à la commune de Marseille.
Délibéré après l'audience du 2 avril 2019, où siégeaient :
- M. Gonzales, président,
- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
- M. Jorda, premier conseiller.
N° 17MA03672 2