Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés le 10 septembre 2019 et le 2 mars 2020, Mme H..., Mme F..., M. F... et l'association Sauvegarde du Mas del Rey, représentés par la SCP Codognes, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 9 juillet 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du maire de Saint-Estève du 18 mai 2017, ainsi que les décisions implicites rejetant leurs recours gracieux dirigés contre cet arrêté ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Estève le versement, à chaque requérant, de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- leur requête est suffisamment motivée ;
- les dispositions des articles R. 423-1 et R. 431-5 du code de l'urbanisme ont été méconnues ;
- le projet litigieux méconnaît l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols alors en vigueur ;
- il ne respecte pas l'article UA 12 du même règlement.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 janvier 2020, la commune de Saint-Estève, représentée par la SCPA Vigo, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est insuffisamment motivée ;
- les moyens invoqués par les appelants ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense enregistrés les 11 mars et 10 avril 2020, l'office public de l'habitat des Pyrénées-Orientales, représenté par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge des consorts F..., d'une part, et de l'association Sauvegarde du Mas del Rey, d'autre part, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens invoqués par Mme H... et autres ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., représentant l'office public de l'habitat des Pyrénées-Orientales.
Considérant ce qui suit :
1. L'office public de l'habitat des Pyrénées-Orientales a déposé, le 13 mars 2017, une demande de permis de construire, valant permis de démolir, en vue de l'édification d'un immeuble collectif comportant trente-et-un logements locatifs sociaux sur un terrain situé rue Jean-Baptiste Poquelin à Saint-Estève et classé en zone UA du plan d'occupation des sols alors en vigueur. Par un arrêté du 18 mai 2017, le maire de Saint-Estève a délivré le permis de construire, valant permis de démolir, ainsi sollicité. A la suite du rejet implicite de leur recours gracieux dirigé contre ce permis, Mme H... et autres ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de l'annuler. Ils relèvent appel du jugement du 9 juillet 2019 par lequel ce tribunal a rejeté leur demande d'annulation.
Sur la légalité du permis en litige :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; / b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire (...) ". En vertu du dernier alinéa des articles R. 431-5 et R. 451-1 du même code, les demandes, respectivement, de permis de construire et de permis de démolir doivent comporter " l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis ".
3. D'une part, il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire et de permis de démolir doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme. Sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à cet article doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Toutefois lorsque l'autorité saisie d'une demande de permis vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif.
4. D'autre part, les dispositions de l'article 653 du code civil établissent une présomption légale de copropriété des murs séparatifs de propriété. Il résulte des dispositions citées au point 2, notamment du b) de l'article R. 4231, qu'une demande de permis concernant un mur séparatif de propriété peut, alors même que les travaux en cause pourraient être contestés par les autres propriétaires devant le juge judiciaire sur le fondement des articles 653 et suivants du code civil, être présentée par un seul coindivisaire.
5. L'office public de l'habitat des Pyrénées-Orientales a attesté avoir qualité pour déposer la demande de permis de construire, valant permis de démolir, en cause dans le présent litige. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les travaux de démolition autorisés par l'arrêté contesté devraient, ainsi que le soutiennent les appelants, être entrepris, en partie, sur la propriété des consorts F.... Par ailleurs, la circonstance, au demeurant non établie, que les travaux litigieux concerneraient notamment le mur séparant les propriétés respectives du pétitionnaire et des consorts F... n'est pas de nature à établir que la demande de permis aurait été entachée de fraude ou que l'office public de l'habitat des Pyrénées-Orientales n'aurait pas eu qualité pour la déposer. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées au point 2 doit être écarté.
6. En deuxième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article UA 11 du règlement du plan d'occupation des sols de Saint-Estève, applicable à la date de l'arrêté attaqué en vertu de l'article L. 174-5 du code de l'urbanisme, doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 8 à 10 de leur jugement.
7. En troisième et dernier lieu, en vertu de l'article UA 12 du règlement du plan d'occupation des sols de Saint-Estève alors en vigueur, lorsque le projet prévoit la création de logements : " Il doit être réalisé une place de stationnement dans le volume bâti ou sur la parcelle servant d'assiette au projet, pour chaque tranche de 60 m² de surface de plancher et pour chaque logement ".
8. Il ressort des pièces du dossier, et il n'est d'ailleurs pas contesté, que le projet litigieux, qui prévoit la création de trente-deux places de stationnement, respecte les exigences des dispositions citées ci-dessus de l'article UA 12 du règlement du plan d'occupation des sols de Saint-Estève alors en vigueur. Si Mme H... et autres évoquent un risque pour la sécurité publique, lié selon eux aux conditions d'utilisation des places de stationnement directement accessibles depuis la rue Jean-Baptiste Poquelin, cette circonstance demeure sans incidence sur la conformité du projet aux dispositions citées au point précédent. En tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet litigieux serait susceptible de porter atteinte à la sécurité publique et, en particulier, à la sécurité des usagers de cette voie publique.
9. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, Mme H... et autres ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Saint-Estève du 18 mai 2017 ainsi que des décisions implicites rejetant les recours gracieux formés à son encontre.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Saint-Estève, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à Mme H... et autres la somme que ces derniers demandent sur ce fondement. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme H... et autres le versement d'une somme de 1 000 euros tant à la commune de Saint-Estève qu'à l'office public de l'habitat des Pyrénées-Orientales au titre de ces mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme H... et autres est rejetée.
Article 2 : Mme H... et autres verseront une somme de 1 000 euros à la commune de Saint-Estève et une même somme de 1 000 euros à l'office public de l'habitat des Pyrénées-Orientales au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... H..., représentante unique, à la commune de Saint-Estève et à l'office public de l'habitat des Pyrénées-Orientales.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Chazan, président,
- Mme C..., présidente assesseure,
- M. E..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 décembre 2020.
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N° 19MA04292