Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 janvier 2018 et un mémoire, non communiqué, enregistré le 12 juin 2018, la commune de Murles, représentée par la SCP VinsonneauPaliès, Noy, Gauer et Associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 novembre 2017 ;
2°) de rejeter la demande de première instance de MM. D... ;
3°) de mettre à la charge de MM. D... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a considéré par erreur que le projet litigieux et son chemin d'accès n'étaient pas inondables ;
- les premiers juges ont dénaturé les pièces du dossier ;
- le jugement est entaché d'une contradiction de motifs ;
- les moyens invoqués en première instance ne sont pas fondés ;
- il sera procédé, le cas échéant, à une substitution de motifs dès lors qu'un certificat d'urbanisme négatif aurait pu être délivré compte tenu de la situation du projet en extrême limite de la zone rouge du plan de prévention des risques d'inondation.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 mai 2018, MM. D..., représentés par Me C..., concluent au rejet de la requête et à ce que la commune de Murles leur verse la somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que les moyens invoqués par la commune de Murles ne sont pas fondés et reprennent leurs moyens de première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant la commune de Murles.
Considérant ce qui suit :
1. Le maire de Murles a, le 24 septembre 2015, délivré un certificat d'urbanisme déclarant non réalisable l'opération envisagée par M. F... D..., consistant en l'édification d'une villa ainsi que d'une clôture sur un terrain, cadastré section B n° 134, situé au lieu-dit " Les Muscadels ". La commune de Murles relève appel du jugement du 30 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a annulé, à la demande de MM. D..., ce certificat d'urbanisme négatif.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Il résulte des dispositions du b) de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme que, lorsque la demande précise la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, le certificat d'urbanisme doit notamment indiquer " si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ". Aux termes de l'article R. 111-2 du même code : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à (...) la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".
3. D'une part, il appartient à l'autorité d'urbanisme compétente et au juge de l'excès de pouvoir, pour apprécier si les risques d'atteinte à la sécurité publique justifient la délivrance d'un certificat d'urbanisme négatif sur le fondement des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, de tenir compte tant de la probabilité de réalisation de ces risques que de la gravité de leurs conséquences, s'ils se réalisent.
4. D'autre part, les prescriptions d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, destinées notamment à assurer la sécurité des personnes et des biens exposés aux risques en cause et valant servitude d'utilité publique, s'imposent directement aux certificats d'urbanisme. Il incombe à l'autorité compétente pour délivrer un certificat d'urbanisme opérationnel de vérifier que le projet respecte les prescriptions édictées par le plan de prévention et, le cas échéant, de préciser dans le certificat les conditions de leur application. Si les particularités de la situation l'exigent et sans apporter au projet de modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande, il peut subordonner la délivrance du certificat d'urbanisme positif à des prescriptions spéciales, s'ajoutant aux prescriptions édictées par le plan de prévention dans cette zone, si elles lui apparaissent nécessaires pour assurer la conformité du projet aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Ce n'est que dans le cas où l'autorité compétente estime, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce qui lui est soumise et du projet en cause, y compris d'éléments déjà connus lors de l'élaboration du plan de prévention des risques naturels, qu'il n'est pas légalement possible d'accorder un certificat d'urbanisme positif en l'assortissant de prescriptions permettant d'assurer la conformité du projet aux dispositions de l'article
R. 111-2 du code de l'urbanisme, qu'elle peut, pour ce motif, délivrer un certificat d'urbanisme négatif.
5. Pour délivrer le certificat d'urbanisme négatif en litige sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le maire de Murles a en substance estimé que, alors même que la construction envisagée n'empiète ni sur la partie du terrain classée en zone rouge du plan de prévention des risques d'inondation applicable ni sur l'une des zones non aedificandi reportées sur le plan joint à la demande, le terrain d'assiette ne peut être utilisé pour la réalisation de cette opération compte tenu du risque d'inondation par ruissellement qui y a été identifié.
6. Il ressort des pièces du dossier que la partie sud de la parcelle d'assiette de l'opération envisagée est classée en zone rouge du plan de prévention des risques d'inondation applicable sur le territoire de la commune de Murles et grevée d'une servitude d'inconstructibilité instituée par ce plan. Cette parcelle en pente est située en contrebas de la route départementale n° 127 qui est dépourvue de fossé dans sa portion longeant sa partie est. La parcelle en cause est desservie, au nord, par un chemin en pente débouchant sur cette route départementale. Il n'est pas sérieusement contesté que ce chemin est exposé au phénomène de ruissellement des eaux pluviales. Par ailleurs, à la suite des inondations survenues au cours de l'année 2014 sur le territoire de la commune de Murles, le préfet de l'Hérault a, par une lettre du 6 janvier 2015, invité le maire de Murles à faire application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en fonction de ses " connaissances nouvelles sur les zones inondables " de la commune, en particulier au regard des constats des inondations de 2014. Il ressort du compte-rendu de la visite effectuée le 18 décembre 2015 par des agents du syndicat du bassin du Lez que la parcelle en cause a été " ravinée par les eaux de ruissellement de surface " et que cette parcelle pentue constitue un " chemin d'eau préférenti(el) lors des épisodes pluvieux ". Si ce dernier document a été établi postérieurement au certificat d'urbanisme négatif en litige, il révèle néanmoins une situation de fait existant à la date de cette décision. Dans ces conditions, compte tenu de la topographie des lieux en cause, de l'intensité du risque d'inondation par ruissellement identifié dans le secteur d'implantation du projet et de la nature de la construction envisagée en limite de la servitude d'inconstructibilité évoquée ci-dessus, et alors qu'il n'est pas soutenu qu'un certificat d'urbanisme positif assorti de prescriptions aurait pu être délivré en l'espèce, le maire de Murles n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme en retenant le motif énoncé au point précédent pour délivrer le certificat d'urbanisme négatif contesté. Par suite, c'est à tort que, pour annuler ce certificat d'urbanisme, le tribunal administratif de Montpellier s'est fondé sur le motif tiré de l'erreur d'appréciation commise par cette autorité au regard de ces dispositions.
7. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par MM. D....
8. En premier lieu, si l'article 7 du certificat d'urbanisme négatif en litige se réfère à un avis du service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault, la commune de Murles soutient, sans être contredite, d'une part, que cet établissement public n'a pas été consulté dans le cadre de l'instruction de la demande de certificat d'urbanisme déposée par M. D... et, d'autre part, que le maire de Murles a en réalité uniquement tenu compte, sur ce point, des préconisations générales du service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault relatives aux caractéristiques des voies de desserte des projets. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'" avis " évoqué à l'article 7 du certificat d'urbanisme négatif en litige aurait dû être joint à ce certificat doit, en tout état de cause, être écarté.
9. En deuxième lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point précédent, le moyen tiré de ce que le maire de Murles se serait, à tort, cru lié par un avis émis par le service départemental d'incendie et de secours de l'Hérault ne peut qu'être écarté.
10. En troisième et dernier lieu, il résulte de l'instruction que le maire de Murles aurait pris la même décision en retenant uniquement le motif fondé sur les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme. Par suite, il n'y a pas lieu pour la cour de se prononcer sur le bien-fondé du motif énoncé à l'article 7 du certificat d'urbanisme en litige.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Murles est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé le certificat d'urbanisme négatif du 24 septembre 2015. Par suite, il y a lieu d'annuler ce jugement, sans qu'il soit besoin d'examiner sa régularité, et de rejeter la demande de première instance de MM. D....
Sur les frais liés au litige :
12. Les dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Murles, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à MM. D... la somme qu'ils demandent sur ce fondement. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de MM. D... une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par la commune de Murles et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 30 novembre 2017 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par MM. D... devant le tribunal administratif de Montpellier est rejetée.
Article 3 : MM. D... verseront une somme globale de 2 000 euros à la commune de Murles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par MM. D... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Murles, à M. F... D... et à M. G... D....
Délibéré après l'audience du 27 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Chazan, président,
- Mme A..., présidente assesseure,
- M. E..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 novembre 2020.
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N° 18MA00394