Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 27 juin et 29 novembre 2019, M. X... E..., M. G... P..., M. A... Q..., M. M... R..., M. et Mme Y... et Aliette Brioude, Mme U... J..., Mme W... H..., Mme S... C..., M. B... N..., M. V... L..., ainsi que M. et Mme Z... et Irène I..., représentés par la SELARL F...-Tardivel, demandent à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du président du tribunal administratif de Nîmes du 3 mai 2019 ;
2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Nîmes ou, subsidiairement, d'annuler l'arrêté du maire des Angles du 30 octobre 2018 ;
3°) de mettre à la charge de la commune des Angles la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la demande de première instance était recevable en tant qu'elle était présentée par M. et Mme I... qui n'ont présenté aucun recours gracieux ;
- cette demande était recevable en tant qu'elle était présentée par Mme J..., signataire d'un recours gracieux collectif, qui a formé un recours gracieux personnel auquel aucune réponse n'a été apportée ;
- elle était également recevable en tant qu'elle était présentée par les autres demandeurs de première instance, signataires de ce recours gracieux collectif auquel il a été tacitement répondu ;
- l'ordonnance contestée ne pouvait être prise sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ;
- cette ordonnance ne se prononce pas sur la recevabilité de la demande de première instance en tant qu'elle était présentée par M. et Mme I... ;
- subsidiairement, dans l'hypothèse où le dossier ne serait pas renvoyé au tribunal administratif, l'arrêté contesté a été signé par une autorité incompétente ;
- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ;
- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des articles R. 111-2 et R. 111-5 du même code.
Par un mémoire en défense enregistré le 30 septembre 2019, la société Grand Delta Habitat, représentée par Me D..., conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, au renvoi de l'affaire devant le tribunal administratif de Nîmes et, en toute hypothèse, à ce que la somme de 1 200 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par M. E... et autres ne sont pas fondés.
Une ordonnance de clôture immédiate de l'instruction a été émise le 20 janvier 2020.
Des mémoires présentés pour la société Grand Delta Habitat et pour la commune des Angles ont été enregistrés, respectivement, le 20 janvier et le 23 octobre 2020, postérieurement à la clôture de l'instruction.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. O...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- les observations de Me F..., représentant M. E... et autres, et celles de Me T..., substituant Me D..., représentant la société Grand Delta Habitat.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... et autres relèvent appel de l'ordonnance du président du tribunal administratif de Nîmes du 3 mai 2019, prise sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejetant comme manifestement irrecevable leur demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 30 octobre 2018 par lequel le maire des Angles a délivré un permis de construire, valant permis de démolir, à la société Grand Delta Habitat en vue de l'édification de vingt-trois logements locatifs sociaux.
Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :
2. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) ".
3. Pour rejeter, dans son ensemble, la demande présentée par M. E... et autres comme manifestement irrecevable sur le fondement des dispositions citées au point précédent, le président du tribunal administratif de Nîmes a d'abord relevé qu'en formant, par une lettre reçue le 31 décembre 2018 en mairie des Angles, un recours gracieux à l'encontre de l'arrêté du 30 octobre 2018, les intéressés ont manifesté avoir acquis la connaissance du permis délivré à la société Grand Delta Habitat, à laquelle ils ont d'ailleurs notifié ce recours administratif conformément aux exigences de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme. Il a ensuite indiqué que le maire des Angles a expressément rejeté ce recours gracieux par une décision du 22 janvier 2019, notifiée le 30 janvier suivant au conseil de M. E... et autres, en précisant que cet avocat, qui avait été mandaté par ces derniers pour déposer ce recours administratif, était réputé avoir également reçu mandat de la part des intéressés pour recevoir la réponse du maire. Après avoir rappelé que le premier recours contentieux de M. E... et autres tendant à l'annulation de ce permis avait été rejeté au motif que les requérants n'avaient pas respecté les formalités de notification prévues par cet article R. 600-1, le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté la nouvelle demande des intéressés, enregistrée le 26 D... 2019 au greffe du tribunal, au motif que, ayant été présentée plus de deux mois après le rejet de leur recours gracieux, cette demande était tardive.
En ce qui concerne la tardiveté de la demande en tant qu'elle est présentée par M. et Mme I... :
4. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) ou de démolir court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Selon l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis explicite ou tacite (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) et pendant toute la durée du chantier (...) ".
5. Il ressort des procès-verbaux de constat d'huissier versés aux débats que le panneau d'affichage du permis litigieux était installé le 15 novembre 2018 sur le terrain d'assiette, que ce panneau y était maintenu le 17 décembre 2018 et qu'il demeurait en place le 17 janvier 2019. Contrairement à ce qui est soutenu, ce panneau d'affichage, lisible depuis la voie publique, comportait l'ensemble des mentions requises, concernant tant les caractéristiques du projet que les droits et obligations des tiers. Dans ces conditions, le délai de recours contentieux ayant commencé à courir le 15 novembre 2018 à l'égard de M. et Mme I... qui n'ont pas signé le recours gracieux collectif évoqué au point 3, la demande enregistrée le 26 D... 2019 au greffe du tribunal était tardive et, par suite, manifestement irrecevable. Il suit de là que les appelants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté comme manifestement tardive cette demande en tant qu'elle était présentée par M. et Mme I....
En ce qui concerne la tardiveté de la demande en tant qu'elle est présentée par les autres demandeurs de première instance :
6. En l'absence de circonstances particulières, la notification du rejet d'un recours administratif à l'avocat qui l'a formé pour le compte de son client fait à nouveau courir le délai du recours contentieux. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M. E... et les autres demandeurs de première instance, à l'exception de M. et Mme I..., ont, par l'intermédiaire de leur conseil commun, formé un recours gracieux, reçu le 31 décembre 2018 en mairie des Angles, à l'encontre du permis du 30 octobre 2018. Ce recours administratif a été rejeté par une décision expresse du maire des Angles du 22 janvier 2019, notifiée le 30 janvier suivant à cet avocat. Cette notification a fait courir le délai du recours contentieux. La seule circonstance que les intéressés n'ont pas élu domicile au cabinet de leur avocat n'a pu être de nature à y faire obstacle. Dès lors, ainsi que l'a jugé le président du tribunal administratif de Nîmes, la demande enregistrée le 26 D... suivant au greffe du tribunal était, en tant qu'elle était présentée par les signataires du recours gracieux collectif évoqué ci-dessus, tardive et, par suite, manifestement irrecevable.
7. D'autre part, à supposer même que Mme J..., signataire du recours gracieux évoqué au point précédent, ait formé un autre recours gracieux dans le délai de recours contentieux, ce second recours gracieux ne saurait avoir eu pour effet de proroger une nouvelle fois le délai de recours contentieux ouvert à l'intéressée.
8. Compte tenu de ce qui a été dit aux deux points précédents, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande des personnes signataires du recours gracieux évoqué au point 6 en raison de sa tardiveté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le président du tribunal administratif de Nîmes a pu rejeter la demande de M. E... et autres comme étant manifestement irrecevable sur le fondement des dispositions citées ci-dessus du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune des Angles, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. E... et autres la somme qu'ils demandent sur ce fondement. En application de ces mêmes dispositions, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ces derniers la somme globale de 1 200 euros au titre des frais exposés par la société Grand Delta Habitat et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. E... et autres est rejetée.
Article 2 : M. E... et autres verseront à la société Grand Delta Habitat la somme globale de 1 200 euros au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X... E..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants, à la commune des Angles et à la société Grand Delta Habitat.
Délibéré après l'audience du 27 octobre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Chazan, président,
- Mme K..., présidente assesseure,
- M. O..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 novembre 2020.
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N° 19MA02863