Procédures devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 2 mars 2021 sous le n° 21MA00850, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er février 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 11 septembre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de l'admettre au séjour et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de certificat de résidence méconnaît les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord francoalgérien du 27 décembre 1968 ;
- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 mars 2021, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par M. D... ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée le 2 mars 2021 sous le n° 21MA00851, M. D..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) de l'admettre provisoirement à l'aide juridictionnelle ;
2°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er février 2021 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'exécution du jugement attaqué aura des conséquences difficilement réparables ;
- les moyens, visés ci-dessus, présentent un caractère sérieux.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 mars 2021, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les conditions du sursis à exécution ne sont pas réunies.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord francoalgérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les observations de Me B..., représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant algérien né en 1987 et déclarant être entré en France au cours de l'année 2017, a sollicité la délivrance d'un certificat de résidence d'un an pour raisons de santé le 17 janvier 2020. Par un arrêté du 11 septembre 2020, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un tel certificat, lui a fait obligation de quitter le territoire français, lui a accordé un délai de départ volontaire de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné. Par un jugement du 1er février 2021, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M. D... tendant à l'annulation de cet arrêté. Par ses requêtes nos 21MA00850 et 21MA00851, qui sont dirigées contre ce jugement et qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un même arrêt, M. D... demande à la cour, respectivement, de l'annuler et d'en prononcer le sursis à exécution.
Sur la requête n° 21MA00850 :
En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :
2. M. D... reproche aux premiers juges de ne pas avoir diligenté une mesure d'instruction afin de déterminer s'il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié de ses pathologies dans son pays d'origine. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le tribunal, qui dirige seul l'instruction, disposait de l'ensemble des éléments utiles, dont l'intéressé a eu connaissance, pour statuer sur le litige qui lui était soumis.
En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord francoalgérien du 27 décembre 1968 : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7° au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui en fait la demande au titre de ces stipulations, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, que cette décision ne peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait pour celui-ci un défaut de prise en charge médicale en Algérie. Lorsque le défaut de prise en charge médicale risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'intéressé, l'autorité administrative ne peut refuser le certificat de résidence sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause en Algérie. Si de telles possibilités existent mais que l'intéressé fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment au coût du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Algérie.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. D... est atteint du virus de l'immunodéficience humaine et qu'il bénéficie d'une prise en charge adaptée à son état de santé en France. Le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé, dans son avis émis le 16 juillet 2020, que si l'état de santé de M. D... rend nécessaire une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé peut néanmoins bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine vers lequel il peut voyager sans risque. Si M. D... soutient que le traitement médicamenteux à base de Biktarvy dont il bénéficie actuellement en France n'est pas disponible dans son pays d'origine, les certificats médicaux qu'il produit ne suffisent pas, à eux seuls, à établir qu'il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement, composé de médicaments ou de molécules substituables, adapté à son état de santé. Par ailleurs, compte tenu de leur caractère général et insuffisamment circonstancié, les éléments dont se prévaut M. D... ne permettent pas de corroborer ses allégations selon lesquelles il serait, en raison de sa séropositivité ainsi que de son orientation sexuelle, susceptible de faire l'objet de discriminations et d'être effectivement privé d'une prise en charge médicale et psychologique appropriée en Algérie. Dans ces conditions, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas, en refusant de délivrer le certificat de résidence sollicité par M. D..., fait une inexacte application des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord francoalgérien du 27 décembre 1968.
5. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.
6. Si M. D... soutient qu'il entretient une relation avec un ressortissant français depuis le printemps 2019 et qu'il mène une vie commune avec ce dernier depuis le mois d'octobre de la même année, cette relation demeurait récente à la date de l'arrêté attaqué. Il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé, qui ne justifie pas d'une intégration particulière en France en dépit des témoignages qu'il produit, serait dépourvu d'attaches dans son pays d'origine dans lequel il a vécu la majeure partie de sa vie et où réside notamment sa soeur avec laquelle il indique être resté en contact. Dans ces conditions, compte tenu en particulier du caractère récent du séjour en France de M. D..., l'arrêté attaqué ne porte pas au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris. Par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 11 septembre 2020. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent être rejetées.
Sur la requête n° 21MA00851 :
8. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D..., qui est représenté par un conseil, aurait déposé une demande d'aide juridictionnelle. Aucune situation d'urgence ne justifie qu'il soit fait application, en appel, des dispositions de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991. Dans ces conditions, les conclusions à fin d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle présentées par M. D... dans l'instance n° 21MA00851 doivent être rejetées.
9. Le présent arrêt statuant sur les conclusions de la requête n° 21MA00850 de M. D... tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Marseille du 1er février 2021, les conclusions de sa requête n° 21MA00851 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de ce même jugement sont devenues sans objet. Il n'y a donc plus lieu de statuer sur ces conclusions. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. D..., dans cette dernière instance, au titre de l'article L. 7611 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 21MA00851 à fin de sursis à exécution.
Article 2 : La requête n° 21MA00850 et le surplus des conclusions de la requête n° 21MA00851 sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D..., au ministre de l'intérieur et à Me B....
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 4 mai 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Chazan, président,
- Mme C..., première conseillère,
- M. A..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 mai 2021.
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Nos 21MA00850, 21MA00851