Par jugement n° 1705425 du 13 mars 2019, le tribunal administratif de Montpellier a par l'article 1er de ce jugement, annulé la décision du 20 septembre 2017 en tant seulement que le maire de Mauguio a refusé de dresser procès-verbal d'infraction s'agissant de la création d'un couloir de nage en terrasse et de cinq marches en terrasse ainsi que de la suppression de la verrière de la toiture-terrasse et de certains espaces végétalisés de cette toiture, par l'article 2 du jugement, enjoint au maire de faire dresser procès-verbal de ces seules irrégularités et par l'article 4 du jugement, a rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 13 mai 2019 et par un mémoire complémentaire enregistré le 8 juin 2021, Mme D... et autres, représentés par la SCP d'avocats SVA, doivent être regardés comme demandant à la Cour :
1°) d'annuler l'article 4 du jugement du 13 mars 2019 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande tendant à l'annulation totale de la décision du 20 septembre 2017 du maire de Mauguio et qu'il ne fait pas droit totalement à leur demande d'injonction au maire de dresser procès-verbal d'infraction ;
2°) d'annuler totalement la décision du 20 septembre 2017 du maire de Mauguio ;
3°) d'enjoindre au maire de Mauguio, agissant au nom de l'Etat, d'une part, de dresser un procès-verbal d'infraction pour toutes les irrégularités relevées dans le rapport d'expertise judiciaire du 20 mai 2016 dans un délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé ce délai et de communiquer sans délai le procès-verbal d'infraction au ministère public et d'autre part, d'ordonner l'interruption des travaux sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils informent la Cour du décès de Mme F... D... le 4 juillet 2020 et du maintien de la requête par les autres requérants ;
- la prescription de l'action publique n'est pas acquise en application de l'article 8 du code de procédure pénale dès lors qu'à la date du 25 février 2015, les travaux en litige n'étaient pas achevés ;
- la hauteur de la construction réalisée dépasse celle autorisée par le permis de construire délivré ;
- le rapport d'expertise judiciaire établit que la cage d'escalier est implantée au-delà de l'emprise autorisée par le permis de construire et que l'aspect extérieur et la volumétrie de la construction réalisée diffèrent de ce qui a été autorisé ;
- les autres irrégularités constatées par le rapport d'expertise judiciaire, qui modifient notamment l'aspect extérieur de l'immeuble, alors même que, prises isolément, elles ne seraient pas soumises à autorisation d'urbanisme, imposaient au maire de dresser procès-verbal d'infraction ;
- dès lors que le permis de construire délivré le 6 août 2012 est caduc en application de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme, le maire devra ordonner aussi l'interruption des travaux en application de l'article L. 480-4 du code de l'urbanisme ;
- le refus du 22 mai 2019 du maire de constater cette caducité fait l'objet d'un recours pendant n° 1904023 devant le tribunal administratif de Montpellier.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 juillet 2020, la SCI Stella Marine, représentée par la SELARL d'avocats Maillot Avocats et associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge des consorts D... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les conclusions aux fins d'enjoindre au maire d'ordonner l'interruption des travaux sont irrecevables pour être présentées pour la première fois en appel ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 juin 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que:
- les conclusions tendant à ce que le maire constate quatre infractions concernant l'aspect extérieur de la construction sont devenues sans objet ;
- les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt est susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions des consorts D... tendant à enjoindre au maire de Mauguio d'ordonner l'interruption des travaux, qui soulèvent un litige distinct de celui tendant à enjoindre au maire de dresser procès-verbal d'infraction des travaux réalisés sans autorisation par la SCI Stella Marine.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la Cour a décidé, par décision du 24 août 2021, de désigner M. Portail, président assesseur, pour statuer dans les conditions prévues à l'article R. 222-26 du code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Carassic,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me Borkowski pour les consorts D... et Me Castagnino pour la SCI Stella Marine.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 6 août 2012, le maire de la commune de Mauguio a délivré à la SCI Stella Marine un permis de construire afin de réaliser une extension en surélévation d'une maison individuelle, de démolir le garage existant et de déposer la toiture et le R+1 existant sur un terrain sis 138 avenue Grassion Cibran à Carnon. La demande de permis de construire modificatif déposée le 8 juillet 2015 par la société Stella Marine a été classée sans suite le 3 novembre 2015 pour incomplétude. Les consorts D..., voisins immédiats du projet, estimant que les travaux réalisés par la société bénéficiaire n'étaient pas conformes au permis de construire délivré le 6 août 2012, ont demandé le 27 mars 2014 au juge des référés du tribunal de grande instance de Montpellier la désignation d'un expert qui a été désigné par ordonnance du 15 mai 2020. A la suite du dépôt le 20 mai 2016 du rapport de cet expert, les requérants ont, par lettre notifiée le 20 juillet 2017, mis en demeure le maire de la commune de Mauguio, agissant au nom de l'Etat, de dresser procès-verbal d'infraction concernant la réalisation de travaux non conformes au permis de construire par la SCI Stella Marine. En l'absence de réponse du maire, une décision implicite de rejet de cette demande est née le 20 septembre 2017. Ils ont demandé au tribunal administratif de Montpellier l'annulation de cette décision du 20 septembre 2017 et d'enjoindre au maire de dresser ce procès-verbal à l'encontre de la société Stella Marine. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a, par l'article 1er de ce jugement, annulé la décision du 20 septembre 2017 en tant seulement que le maire de Mauguio a refusé de dresser procès-verbal d'infraction s'agissant de la création d'un couloir de nage en terrasse et de cinq marches en terrasse, ainsi que de la suppression de la verrière de la toiture-terrasse et de certains espaces végétalisés de cette toiture. Par l'article 2 du jugement, il a enjoint au maire de faire dresser procès-verbal de ces seules irrégularités et par l'article 4 du jugement, il a rejeté le surplus des conclusions des parties. Les consorts D... relèvent appel de l'article 4 du jugement du 13 mars 2019 du tribunal administratif de Montpellier en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande.
Sur les conclusions aux fins de non-lieu à statuer présentées par la ministre de la transition écologique :
2. Si la ministre soutient qu'en exécution de l'article 2 du jugement attaqué du 13 mars 2019, le maire agissant au nom de l'Etat a fait dresser le 25 mars 2019 un procès-verbal d'infraction sur le fondement de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme pour les modifications non autorisées du permis de construire délivré le 6 août 2012 telles qu'indiquées au point 1, il vient d'être dit que le jugement n'est pas attaqué dans cette mesure. Par suite, les conclusions aux fins de non-lieu à statuer présentées par la ministre doivent être rejetées.
Sur les conclusions d'appel des requérants aux fins d'enjoindre au maire d'ordonner l'interruption immédiate des travaux :
3. Ainsi que les parties en ont été informées en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les conclusions des consorts D... tendant à enjoindre au maire de Mauguio d'ordonner l'interruption des travaux, qui soulèvent un litige distinct de celui tendant à enjoindre au maire de dresser procès-verbal d'infraction des travaux réalisés sans autorisation par la SCI Stella Marine, sont irrecevables et doivent être écartées.
Sur les autres conclusions des consorts D... :
4. Aux termes de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction applicable : " Lorsque l'autorité administrative et, au cas où il est compétent pour délivrer les autorisations, le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ont connaissance d'une infraction de la nature de celles que prévoient les articles L. 480-4 et L. 610-1, ils sont tenus d'en faire dresser procès-verbal. Copie du procès-verbal constatant une infraction est transmise sans délai au ministère public. " L'article L. 480-4 de ce code prévoit que : " Le fait d'exécuter des travaux mentionnés aux articles L. 421-1 à L. 421-5 en méconnaissance des obligations imposées par les titres Ier à VII du présent livre et les règlements pris pour leur application ou en méconnaissance des prescriptions imposées par un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou par la décision prise sur une déclaration préalable est puni d'une amende comprise entre 1 200 euros et un montant qui ne peut excéder, soit, dans le cas de construction d'une surface de plancher, une somme égale à 6 000 euros par mètre carré de surface construite, démolie ou rendue inutilisable au sens de l'article L. 430-2, soit, dans les autres cas, un montant de 300 000 euros. " .Aux termes de l'article R. 421-1 du code de l'urbanisme : " Les constructions nouvelles doivent être précédées de la délivrance d'un permis de construire, à l'exception : a) Des constructions mentionnées aux articles R. 421-2 à R. 421-8-2 qui sont dispensées de toute formalité au titre du code de l'urbanisme ; b) Des constructions mentionnées aux articles R. 421-9 à R. 421-12 qui doivent faire l'objet d'une déclaration préalable. ". L'article R. 421-2 prévoit que : " Sont dispensées de toute formalité au titre du présent code, en raison de leur nature ou de leur très faible importance, sauf lorsqu'ils sont implantés dans le périmètre d'un site patrimonial remarquable, dans les abords des monuments historiques ou dans un site classé ou en instance de classement : a) Les constructions nouvelles répondant aux critères cumulatifs suivants :,-une hauteur au-dessus du sol inférieure ou égale à douze mètres ; -une emprise au sol inférieure ou égale à cinq mètres carrés ; -une surface de plancher inférieure ou égale à cinq mètres carrés (...); ". Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsque le maire a connaissance d'une infraction aux dispositions du code de l'urbanisme et notamment à celles exigeant le dépôt d'une demande d'autorisation d'urbanisme, il est tenu d'en faire dresser procès-verbal et de transmettre sans délai ce procès-verbal au ministère public.
5. En premier lieu, les requérants se bornent en appel à réitérer le moyen tiré de ce que la hauteur de la construction réalisée ne serait pas conforme à celle autorisée par le permis de construire délivré à la SCI Stella Marine et que le maire était ainsi tenu de dresser procès-verbal pour cette infraction, sans critiquer la réponse des premiers juges sur ce point et sans apporter en appel d'éléments de fait ou de droit nouveaux. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 3 du jugement attaqué.
6. En deuxième lieu, le procès-verbal d'infraction de l'agent assermenté mentionné au point 3 indique la création sous la terrasse d'un local technique de moins de 5 m² qui n'est ainsi pas soumis à l'obtention d'une autorisation d'urbanisme en application des articles R. 421-1 et R. 421-2 du code de l'urbanisme. Il précise que le déplacement de l'escalier en façade sud, qui n'exige pas d'autorisation d'urbanisme, est en cours de réalisation. En se bornant à produire l'annexe 25 du rapport de l'expert judiciaire du 20 mai 2016 relative au plan de la toiture terrasse de l'immeuble de la société Stella Marine, les requérants n'établissent pas que la cage d'escalier serait implantée au-delà de l'emprise autorisée par le permis de construire. En tout état de cause, en se rapportant aux seules constatations de l'expert judiciaire sans établir ni même alléguer en quoi la modification de cette emprise constituerait une infraction aux règles d'urbanisme, les requérants n'établissent pas que le maire aurait dû dresser procès-verbal de cette modification du projet prévu par le permis de construire délivré. Ainsi, aucune infraction aux dispositions des articles R. 421-1 et R. 421-2 du code de l'urbanisme n'ayant été commise par la société Stella Marine à cet égard, le maire de Mauguio agissant au nom de l'Etat n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme en refusant de faire dresser un procès-verbal d'infraction.
7. Il résulte de ce qui précède que les consorts D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier n'a annulé que partiellement la décision du 20 septembre 2017 du maire de Mauguio agissant au nom de l'Etat et à demander l'annulation totale de cette décision. Par voie de conséquence, leurs conclusions d'appel aux fins d'injonction de dresser un procès-verbal d'infraction sous condition de délai et d'astreinte doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme à verser aux consorts D... au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Il y a lieu, sur le fondement de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge des consorts D... une somme de 2 000 euros à verser à la SCI Stella Marine.
D É C I D E :
Article 1 : La requête des consorts D... est rejetée.
Article 2 : Les consorts D... verseront la somme de 2 000 euros à la SCI Stella Marine sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme G... D... épouse C..., à Mme E... D..., à M. A... D..., à la SCI Stella Marine et à la ministre de la transition écologique.
Copie en sera adressée à la commune de Mauguio et au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2021, où siégeaient :
- M. Portail, président par intérim, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Carassic, première conseillère,
- M. Point, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2021.
6
N° 19MA02127