Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 10 août 2016, et un mémoire, enregistré le 12 décembre 2016, l'association " Les Robins Des Bois de La Margeride ", l'association " Margeride Environnement ", l'association " Margeride Environnement Sud " et l'association " Vents de Lozère ", représentés par la SCP d'avocats Deygas Perrachon et associés, demandent à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 8 juin 2016 du président du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Nîmes ou d'annuler l'arrêté du 18 août 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- l'absence de justification de l'accomplissement de la notification prévue à l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'est pas une cause d'irrecevabilité qui ne peut en aucun cas être couverte ou seulement jusqu'à l'expiration du délai de recours ;
- l'ordonnance en litige est entachée d'une contradiction et d'un défaut de motivation ;
- l'ordonnance attaquée, dont la minute n'est pas signée du magistrat qui l'a rendue, méconnaît l'article R. 742-5 du code de justice administrative ;
- elle méconnaît l'article R. 742-2 du code de justice administrative, les moyens et faits contenus dans les conclusions n'ayant pas été analysés ;
- le premier juge a méconnu l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 5 du code de justice administrative en ne s'assurant pas de la régularité de l'affichage rendant la formalité de la notification obligatoire avant de soulever d'office une telle irrecevabilité ;
- il n'est pas établi que le permis de construire ait fait l'objet d'un affichage régulier conforme aux prescriptions de l'article R. 424-14 du code de l'urbanisme ;
- elle maintient l'ensemble des moyens soulevés en première instance ;
- le permis de construire méconnaît l'article L. 145-3 II du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 septembre 2016, la société Vent d'Oc Centrale d'Energie renouvelable 17, représentée par le cabinet d'avocats CGR Legal, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de chacune des associations requérantes la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 décembre 2016, la ministre du logement et de l'habitat durable conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Un mémoire présenté pour la société Vent d'Oc Centrale d'Energie renouvelable 17 a été enregistré le 4 janvier 2017 et n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Portail,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant l'association " Les Robins Des Bois de La Margeride " et autres, et de Me D..., représentant la société Vent d'Oc Centrale d'Energie renouvelable 17.
1. Considérant que l'association " Les Robins Des Bois de La Margeride ", l'association " Margeride Environnement ", l'association " Margeride Environnement Sud " et l'association " Vents de Lozère " ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté n° PC 048 029 14 A0003 du 18 août 2015 par lequel le préfet de la Lozère a accordé à la société Vents d'Oc Centrale d'énergie renouvelable 17 un permis de construire sur le territoire de la commune du Born pour la réalisation d'un poste de livraison dans le cadre d'un parc éolien ; que, par une ordonnance en date du 8 juin 2016, dont les associations requérantes relèvent appel, le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande en raison de son irrecevabilité manifeste ;
2. Considérant, en premier lieu, que l'article R. 742-2 du code de justice administrative dispose : " Les ordonnances mentionnent le nom des parties, l'analyse des conclusions ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elles font application. " ;
3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées qu'elles n'ont pas pour effet d'imposer au juge statuant par ordonnance d'analyser ou de mentionner dans les visas de son ordonnance les moyens développés par les parties à l'appui de leurs conclusions, auxquels il doit toutefois être répondu, en tant que de besoin, dans les motifs de l'ordonnance ; que l'ordonnance attaquée mentionne, dans ses visas, l'intégralité des conclusions présentées par les demandeurs de première instance ; que, compte tenu de la solution de rejet pour irrecevabilité retenue par le premier juge, celui-ci n'avait pas à analyser les moyens soulevés à l'appui desdites conclusions; qu'il en résulte que les associations requérantes ne sont pas fondées à soutenir que cette ordonnance aurait été rendue en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 742-2 du code de justice administrative;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 742-5 du code de justice administrative : " La minute de l'ordonnance est signée du seul magistrat qui l'a rendue " ; qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutiennent les associations appelantes, la minute de l'ordonnance attaquée est signée du magistrat qui l'a rendue ;
5. Considérant, en troisième lieu, que l'article R. 222-1 du code de justice administrative dispose : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : / (...) 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 612-1 du même code : " Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif. La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours. La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux. " ; qu'il résulte de ces dispositions que le président de la formation de jugement peut, après avoir invité le requérant à régulariser sa requête en apportant la preuve de ce que, conformément aux dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, les notifications de la requête à l'auteur et au titulaire du permis de construire attaqué avaient été faites, rejeter cette requête comme manifestement irrecevable si à la date à laquelle il statue, qui est nécessairement postérieure à l'expiration du délai fixé par l'invitation à régulariser, il constate que ces justifications n'ont pas été produites ;
6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par une lettre dont il a été accusé réception le 17 novembre 2015, le greffe du tribunal administratif de Nîmes a invité les demandeurs de première instance à justifier de l'accomplissement de la formalité de notification de leur requête prescrite, à peine d'irrecevabilité, au titre des dispositions précitées du code de l'urbanisme ; que, à défaut pour les requérantes d'avoir justifié, dans le délai qui leur avait été imparti, de l'accomplissement de cette notification, le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande sur le fondement des dispositions de l'article R. 222-1 précité du code de justice administrative en raison de son irrecevabilité manifeste ; qu'alors même que ce magistrat n'a cité dans son ordonnance que l'extrait des dispositions de l'article R. 222-1 concernant, d'une part, les irrecevabilités qui ne peuvent en aucun cas être couvertes, d'autre part, celles qui ne peuvent être régularisées que jusqu'à l'expiration du délai de recours, il est constant qu'il a invité les demandeurs de première instance à justifier de l'accomplissement de la formalité de notification précitée ; qu'il était, dés lors, compétent pour rejeter la demande en raison de son irrecevabilité manifeste ;
7. Considérant, en quatrième lieu, que l'ordonnance attaquée mentionne les dispositions du code de justice administrative et du code de l'urbanisme sur lesquelles le président du tribunal administratif de Nîmes a entendu se fonder, et précise que les demandeurs n'ont pas justifié de l'accomplissement de la formalité de notification malgré l'invitation en ce sens qui leur a été adressée ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette ordonnance, qui n'est pas, en outre, entachée de contradiction dès lors que la formalité de la notification ne peut être accomplie après l'expiration du délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours, doit être écarté ;
8. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article R. 424-15 du code de l'urbanisme : " Mention du permis explicite ou tacite (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle le permis tacite (...) est acquis et pendant toute la durée du chantier (...) / Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis (...) " ;
9. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'irrecevabilité tirée de l'absence d'accomplissement des formalités de notification prescrites par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ne peut être opposée, en première instance, en appel ou en cassation, qu'à la condition, prévue au deuxième alinéa de l'article R. 424-15 du même code, que l'obligation de procéder à cette notification ait été mentionnée dans l'affichage du permis de construire ;
10. Considérant que lorsque l'auteur d'un recours entrant dans le champ d'application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'a pas justifié en première instance de l'accomplissement des formalités de notification requises alors qu'il a été mis à même de le faire, soit par une fin de non-recevoir opposée par le défendeur, soit par une invitation à régulariser adressée par le tribunal administratif, il n'est pas recevable à produire ces justifications pour la première fois en appel ; qu'il appartient néanmoins au juge d'appel, s'il est saisi de moyens en ce sens, y compris pour la première fois en appel, de vérifier si l'obligation de notification posée par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme peut, au regard des conditions fixées par l'article R. 424-15 du même code, être opposée à la demande ;
11. Considérant, d'une part, qu'il n'appartient pas au tribunal administratif de vérifier les conditions de l'affichage quand les requérants, à qui il a été demandé de justifier de la notification de leur recours, n'ont pas allégué de la méconnaissance de l'obligation de faire figurer sur l'affichage l'obligation de notification du recours ; que les demandeurs de première instance ont été mis en mesure, lorsqu'ils ont été invités à justifier de l'accomplissement de la formalité de notification de leur recours, de soutenir que la mention de l'obligation de cette notification n'aurait pas figuré sur l'affichage du permis de construire, ce dont ils se sont abstenus ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'ordonnance attaquée aurait été rendue en méconnaissance du principe du contradictoire et de l'égalité des armes, et aurait ainsi méconnu l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 5 du code de justice administrative doit être écarté ;
12. Considérant, d'autre part, qu'il ressort des constats effectués les 2 septembre, 28 septembre et 2 novembre 2015, par MaîtreA..., huissier de justice, produits devant la Cour, qu'à la date d'enregistrement de la demande devant le tribunal administratif, soit le 16 octobre 2015, le permis de construire en litige avait été affiché sur le terrain, de manière visible depuis la voie publique, et que cet affichage mentionnait également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ; que l'obligation de notification posée par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme pouvait, dès lors, au regard des conditions fixées par l'article R. 424-15 du même code, être opposée à la demande de première instance ;
13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les associations requérantes ne sont pas fondées à demander l'annulation de l'ordonnance du 8 juin 2016 par laquelle le président du tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante, une somme au titre des frais exposés par les associations requérantes et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la société Vents d'Oc Centrale d'Energie Renouvelable 17 fondée sur ces dispositions ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de l'association " Les Robins Des Bois de La Margeride " et autres est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la société Vents d'Oc Centrale d'Energie Renouvelable 17 présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à l'association " Les Robins Des Bois de La Margeride ", à l'association " Margeride Environnement ", à l'association " Margeride Environnement Sud ", à l'association " Vents de Lozère ", à la ministre du logement et de l'habitat durable et à la société Vents d'Oc Centrale d'Energie Renouvelable 17.
Copie en sera adressée au préfet de la Lozère et à la commune du Born.
Délibéré après l'audience du 24 mars 2017, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme C..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 11 avril 2017.
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N° 16MA03337