Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 2 juillet 2014, M. ZIANE, représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier du 2 janvier 2014 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 juin 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", sous astreinte de 99 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de procéder à un réexamen de sa situation dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, son conseil renonçant à l'indemnité versée au titre de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet du dossier ;
- l'arrêté n'est pas suffisamment motivé ;
- la commission du titre de séjour n'a pas été saisie ;
- sa résidence en France depuis au moins 10 ans est établie ;
- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- il méconnaît également l'article 6-5) de l'accord franco-algérien et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le premier juge ne pouvait statuer par voie d'ordonnance alors que, compte tenu du nombre de preuves de présence qu'il versait au dossier, ses moyens n'étaient pas manifestement infondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2015, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- l'ordonnance n'est entachée d'aucune irrégularité ;
- la situation de l'appelant, telle que connue des services à la date de l'examen de sa demande, est celle décrite dans les considérants dudit arrêté ; cette décision est suffisamment motivée par les faits retenus ;
- les autres moyens ne sont pas davantage fondés.
Par décision du 16 avril 2014, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille a admis M. ZIANE au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
- le mémoire enregistré le 25 mars 2015, présenté pour M. ZIANE, et non communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative ;
- les ordonnances des 5 février, 25 février et 6 mars 2015 fixant, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction au 26 mars 2015 à 12 heures ;
- le mémoire, enregistré le 25 novembre 2015 après clôture de l'instruction, présenté pour M. A.en 2011 chez la soeur aînée de M. Ziane
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, dans sa rédaction issue du troisième avenant signé le 11 juillet 2001 et publié par le décret nº 2002-1500 du 20 décembre 2002 ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Busidan a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. ZIANE, de nationalité algérienne, relève appel de l'ordonnance du 2 janvier 2014 par laquelle, sur le fondement des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 juin 2013, pris par le préfet de l'Hérault et portant refus d'admission au séjour ;
Sur les conclusions en annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.// 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui. " ;
3. Considérant que M. ZIANE, né le 29 avril 1978, est titulaire d'un titre de séjour espagnol valable jusqu'au 3 mai 2016 ; que si les pièces du dossier n'établissent pas, contrairement à ce qu'il prétend, qu'il résiderait habituellement en France depuis dix ans à la date de l'arrêté en litige, elles attestent qu'il a emménagé le 1er juin 2012 dans un appartement situé à Montpellier, avec une ressortissante algérienne ; que cette compagne est née en 1990 et titulaire d'un titre de séjour de dix ans délivré en 2007, et était domiciliée... ; que peu avant l'emménagement sus-évoqué, le couple a eu une fille, née le 21 avril 2012 et reconnue peu avant sa naissance par les deux parents ; qu'à la date de l'arrêté en litige, la compagne de M. ZIANE attendait un deuxième enfant, qui a été reconnu par anticipation par le père le 27 juin 2013 et devait naître en décembre 2013 ; qu'à la date de l'arrêté, si deux frères de l'intéressé se trouvent en Allemagne et au Canada, quatre autres membres de sa fratrie sont citoyens français, les trois restants résident en France de manière régulière sous couvert de certificats de résidence de 10 ans, tandis que sa mère y séjourne sous couvert d'un titre d'un an, étant précisé, par ailleurs, que son père est décédé ; que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de l'ensemble des attaches familiales de M. ZIANE en France, dont celles constituées avec sa compagne depuis plus d'un an à la date de l'arrêté en litige, le préfet de l'Hérault, en lui refusant l'admission au séjour, a porté une atteinte disproportionnée au droit de M. ZIANE au respect de sa vie privée et familiale, et a ainsi méconnu les stipulations précitées de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, ni la régularité de l'ordonnance attaquée, M. ZIANE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ladite ordonnance, le président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu dès lors d'annuler cette ordonnance, ainsi que l'arrêté préfectoral en litige ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
5. Considérant qu'eu égard aux motifs pour lesquels il prononce l'annulation de l'arrêté en litige et dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'un changement dans les circonstances de droit ou de fait y ferait obstacle, le présent arrêt implique nécessairement la délivrance au requérant d'un certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" ; qu'il a donc lieu pour la Cour, sur le fondement des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de délivrer à l'intéressé un tel certificat dans le délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
6. Considérant que M. ZIANE a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que l'avocat de M. ZIANE renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de celui-ci le versement à Me B... de la somme de 1 200 euros qu'il demande ;
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance du 2 janvier 2014 du président de la 4ème chambre du tribunal administratif de Montpellier et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 12 juin 2013 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à M. ZIANE un certificat de résidence temporaire d'un an portant la mention "vie privée et familiale", dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat (ministère de l'intérieur) versera à Me B... une somme de 1 200 (mille deux cents) euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me B... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. ZIANE est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... ZIANE, au ministre de l'intérieur, au préfet de l'Hérault et à Me D...B.en 2011 chez la soeur aînée de M. Ziane
Délibéré après l'audience du 22 janvier 2016, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président-assesseur,
- Mme Busidan, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 12 février 2016.
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N° 14MA02995