Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 9 juillet 2018, la SCI Les Carrières, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 juin 2018 ;
2°) d'annuler la délibération en date du 20 février 2017 par laquelle le conseil municipal de la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de première instance n'était pas tardive ;
- la délibération en litige est entachée d'un vice de procédure dès lors que le conseil municipal n'a pas pris de délibération expresse pour décider de l'application au projet du PLU de certaines dispositions issues du décret du 28 décembre 2015 ;
- l'enquête publique est irrégulière en ce que le commissaire enquêteur n'a pas procédé à une analyse personnelle du projet, en méconnaissance de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme ;
- l'évaluation environnementale du projet de PLU est insuffisante, en méconnaissance des articles L. 104-4 et R. 123-1-3 du code de l'urbanisme ;
- la délibération en litige, qui classe les parcelles en cause en zone AUh, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est entachée d'une erreur de droit au regard de l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2018, la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la SCI Les Carrières une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de première instance était tardive ;
- les autres moyens soulevés par la SCI Les Carrières ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de procédure civile ;
- le code du travail ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Lopa Dufrénot,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me A..., représentant la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues.
Considérant ce qui suit :
1. Par délibération du 20 février 2017, le conseil municipal de la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande présentée par la SCI Les Carrières tendant à l'annulation de cette délibération ainsi que la décision implicite du maire rejetant son recours gracieux dirigé contre cette délibération au seul motif de sa tardiveté.
2. D'une part, selon l'article R. 153-20 du code de l'urbanisme, la délibération qui approuve, révise, modifie ou abroge un plan local d'urbanisme fait l'objet des mesures de publicité et d'information prévues à l'article R. 153-21. Aux termes des dispositions de l'article R. 153-21 du même code, " tout acte mentionné à l'article R. 153-20 est affiché pendant un mois (...) en mairie. Mention de cet affichage est insérée en caractères apparents dans un journal diffusé dans le département. (...) L'arrêté ou la délibération produit ses effets juridiques dès l'exécution de l'ensemble des formalités prévues au premier alinéa, la date à prendre en compte pour l'affichage étant celle du premier jour où il est effectué. ". Il résulte de ces dispositions que le délai de recours contentieux à l'encontre d'une délibération approuvant la révision d'un PLU court à compter de la plus tardive des deux dates correspondant, l'une au premier jour d'une période d'affichage en mairie d'une durée d'un mois, l'autre à la mention de cet affichage dans un journal diffusé dans le département.
3. D'autre part, en vertu de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. Aux termes de l'article L. 2131-8 du même code : " Sans préjudice du recours direct dont elle dispose, si une personne physique ou morale est lésée par un acte mentionné aux articles L. 2131-2 et L. 2131-3, elle peut, dans le délai de deux mois à compter de la date à laquelle l'acte est devenu exécutoire, demander au représentant de l'Etat dans le département de mettre en oeuvre la procédure prévue à l'article L. 2131-6 ". La saisine du préfet sur le fondement de ces dispositions, par une personne qui s'estime lésée par un acte d'une collectivité territoriale, si elle a été formée dans le délai du recours contentieux ouvert contre cet acte, a pour effet de proroger ce délai jusqu'à l'intervention de la décision explicite ou implicite par laquelle le préfet se prononce sur la demande dont il s'agit.
4. Enfin, l'article R. 421-1 du code de justice administrative énonce que la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. Ce délai est un délai franc. Par application de l'article 642 du nouveau code de procédure civile, lorsqu'il expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, ce délai est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant. L'article L. 3133-1 du code du travail précise que les fêtes légales dont relève le 1er mai sont des jours fériés.
5. Il ressort des pièces du dossier, notamment du certificat d'affichage du maire de la commune, que la délibération contestée du 20 février 2017 a fait l'objet d'un affichage en mairie à compter du 28 février 2017. En outre, cette délibération a donné lieu à une insertion, le 26 février 2017, dans le journal " Midi Libre ", diffusé dans le département. En application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, la SCI Les Carrières disposait ainsi d'un délai franc de deux mois à compter de la date de publicité la plus tardive pour introduire son recours contentieux à l'encontre d'une délibération approuvant le PLU de la commune, soit à compter du 28 février 2017. En vertu de l'article 642 du nouveau code de procédure civile, lorsque ce délai expire notamment un jour férié, il est prorogé le premier jour ouvrable suivant. Dès lors, le délai de deux mois, se calculant de quantième à quantième et expirant le 1er mai 2017, jour férié en vertu de l'article L. 3133-1 du code du travail, était prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant, soit le 2 mai 2017. Il ressort des nouvelles pièces communiquées en appel par la SCI requérante, notamment la copie de la sommation interpellative à la sous-préfecture de Béziers, dressée par acte d'huissier du 12 juin 2018, de la saisine formée par la SCI requérante, datée du 28 avril 2017, transmise par télécopie aux services préfectoraux ainsi que de l'avis d'émission de cette télécopie du 2 mai 2017 que la société requérante a saisi, le 2 mai 2017, à 17 heures 39, le préfet de l'Hérault, par acte transmis par télécopie au numéro de fax des services préfectoraux de l'Hérault. La saisine du préfet sur le fondement de l'article L. 2131-8 du code général des collectivités territoriales est donc intervenue avant l'expiration du délai de recours contentieux ouvert contre la délibération contestée le 2 mai 2017, avant minuit. La circonstance alléguée par la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues que figurait sur l'acte de saisine du préfet de l'Hérault le cachet du service du courrier daté du 3 mai 2017 est sans incidence sur la réalité de la réception de cette saisine par les services préfectoraux dès le 2 mai 2017. Ainsi, la saisine du préfet de l'Hérault, formée avant l'expiration du délai de recours contentieux ouvert contre la délibération en cause, a eu pour effet de proroger ce délai jusqu'à l'intervention de la décision implicite, née le 2 juillet 2017, par laquelle le préfet a refusé de faire droit à la demande de la société requérante. Par suite, le 21 août 2017, date d'enregistrement au greffe du tribunal administratif de Montpellier, de la demande présentée par la SCI Les Carrières, avant l'expiration du délai de recours contentieux, le 3 septembre 2017, celle-ci qui n'était pas tardive, était recevable. Par conséquent, le jugement attaqué qui a rejeté la demande de première instance pour tardiveté, est entaché d'irrégularité et doit être annulé.
6. Il résulte de ce qui précède que la SCI Les Carrières est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande et qu'elle est fondée à en demander l'annulation. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer le jugement de l'affaire au tribunal administratif de Montpellier.
Sur les frais liés à l'instance :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SCI Les Carrières, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette collectivité la somme demandée par la SCI Les Carrières, au même titre.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 juin 2018 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Montpellier.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI Les Carrières et à la commune de Saint-Vincent-de-Barbeyrargues.
Délibéré après l'audience du 29 janvier 2019, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- Mme Simon, présidente-assesseur,
- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 février 2019.
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N° 18MA03195