Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 septembre 2017, Mme D...B..., représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 août 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 9 décembre 2016 et l'arrêté du 18 janvier 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours, sous peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
S'agissant de la décision de refus d'octroi d'une autorisation de travail :
- elle est entachée d'une erreur de fait ;
- elle est également entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation de la situation de l'emploi.
S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :
- elle est illégale du fait de l'illégalité de celle refusant de lui accorder une autorisation de travail ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation ;
- la décision est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale du fait de l'illégalité de celle portant refus de lui délivrer une carte de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale du fait de l'illégalité de celle portant refus de lui délivrer une carte de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme D...B...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code du travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Simon a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D...B..., ressortissante cubaine, a sollicité le 13 septembre 2016 le renouvellement de sa carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " en demandant un changement de son statut en celui de salarié sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A la suite du refus de l'autorisation de travail qui lui a été opposé le 9 décembre 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône, par un arrêté du 18 janvier 2017, a refusé de lui délivrer une carte de séjour et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à destination du pays dont elle a la nationalité ou dans lequel elle établit être légalement admissible. Mme D...B...fait appel du jugement du 9 août 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 9 décembre 2016 et de l'arrêté du 18 janvier 2017.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la décision du 9 décembre 2016 de refus d'autorisation de travail :
2. Aux termes de l'article R. 5221-1 du code du travail : " Pour exercer une activité professionnelle en France, les personnes suivantes doivent détenir une autorisation de travail et le certificat médical mentionné au 4° de l'article R. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui leur est remis à l'issue de la visite médicale à laquelle elles se soumettent au plus tard trois mois après la délivrance de l'autorisation de travail : 1° Etranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse ; (...). ". Aux termes de l'article R. 5221-12 du même code : " La liste des documents à présenter à l'appui d'une demande d'autorisation de travail est fixée par un arrêté conjoint des ministres chargés de l'immigration et du travail. ". Enfin, aux termes de l'article R. 5221-20 dudit code : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; (...) / 6° Le salaire proposé à l'étranger qui, même en cas d'emploi à temps partiel, est au moins équivalent à la rémunération minimale mensuelle mentionnée à l'article L. 3232-1 (... ) " ;
3. En premier lieu, le salaire mensuel brut proposé à Mme D...B...à la suite de l'avenant à son contrat de travail du 7 juillet 2016 est d'un montant de 1 157, 40 euros. Il est ainsi inférieur au montant mensuel du salaire minimum de croissance. Il suit de là que le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas commis d'erreur de fait.
4. En second lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'emploi d'équipier polyvalent en restauration occupé par l'appelante présente des spécificités telles que le marché de l'emploi ne serait pas en mesure de répondre aux besoins de son employeur qui se plaint, non pas de ne pas pouvoir recruter de salariés mais de la circonstance que ceux-ci refusent de conclure des contrats à durée indéterminée. Ainsi, et nonobstant les qualités professionnelles de Mme D...B..., le préfet a légalement pu lui opposer la situation de l'emploi dans la région pour lui refuser l'autorisation sollicitée.
En ce qui concerne l'arrêté du 18 janvier 2017 et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité des conclusions tendant à son annulation :
S'agissant de la décision portant refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire :
5. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme D...B...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision du 9 décembre 2016 à l'encontre de la décision portant refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire.
6. En deuxième lieu, cette décision comporte dans ses visas et motifs toutes les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière de l'appelante au regard des stipulations et dispositions législatives et réglementaires applicables. Elle est, par suite, suffisamment motivée au regard des exigences fixées par l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
7. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L.311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République.". L'article R.313-21 du même code dispose : " Pour l'application du 7º de l'article L.313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. ". Par ailleurs, il appartient au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour par un étranger en vue de régulariser sa situation, de vérifier que la décision de refus qu'il envisage de prendre ne comporte pas de conséquences d'une gravité exceptionnelle sur la situation personnelle de l'intéressé et n'est pas ainsi entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
8. D'une part, si Mme D...B..., qui réside en France depuis le mois de juin 2011 et a obtenu deux cartes de séjour temporaire valables du 2 mai 2014 au 3 septembre 2016, exerce une activité professionnelle au sein de la SARL un Monde Ailleurs depuis le 26 juin 2014, son activité professionnelle est limitée à un temps partiel, l'intéressée percevant, comme il a été dit, une rémunération inférieure au salaire minimum de croissance. Par ailleurs, l'appelante ne peut utilement se prévaloir du contrat à durée déterminée qu'elle a signée postérieurement à l'édiction de la décision en litige. D'autre part, si Mme D...B..., qui est entrée sur le sol national déjà âgée de 22 ans, a conclu le 26 juillet 2012 un pacte civil de solidarité avec une ressortissante française, ce pacte a été dissous le 22 octobre 2015. Dans ces conditions, le préfet des Bouches-du-Rhône, en prenant ce refus, n'a pas, eu égard à la durée et aux conditions du séjour de l'intéressée qui est célibataire et sans enfant et nonobstant les liens amicaux qu'elle a tissés, porté une atteinte au respect de sa vie privée et familiale disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, et n'a, par suite, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché son refus d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que Mme D...B...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire à l'encontre de cette mesure.
10. En second lieu, en l'absence d'argumentation spécifique dirigée contre l'obligation de quitter le territoire français, il y a lieu d'écarter les moyens de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de Mme D...B...par les mêmes motifs que ceux exposés au point 8.
S'agissant de la décision fixant le pays de destination :
11. Il découle de ce qui précède que l'appelante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire à l'encontre de cette mesure ni de celle portant obligation de quitter le territoire français à l'encontre de cette décision.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...D...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.
Délibéré après l'audience du 23 octobre 2018, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- Mme Simon, président-assesseur,
- MmeC..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 13 novembre 2018.
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N° 17MA03958