Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 16 novembre 2016, M. BA, représenté par Me Guigui, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 octobre 2016 du tribunal administratif de Nice ;
2°) d'annuler l'arrêté du 29 avril 2016 du préfet des Alpes-Maritimes ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans le délai de 15 jours à compter de la notification du présent arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- ce refus d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié méconnaît le paragraphe 42 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié ;
- il méconnaît aussi la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur ;
- le refus contesté méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République sénégalaise relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal, signé le 23 septembre 2006 et l'avenant à cet accord signé le 25 février 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Carassic a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. BA, de nationalité sénégalaise, a demandé son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié au préfet des Alpes-Maritimes ; que, par l'arrêté en litige du 29 avril 2016, le préfet a refusé de lui délivrer ce titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que M. BA relève appel du jugement du 19 octobre 2016 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 avril 2016 ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue du point 31 de l'article 3 de l'avenant signé le 25 février 2008 : " Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : - soit la mention "salarié" s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail ; / - soit la mention "vie privée et familiale" s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels " ; que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose, en son premier alinéa, que : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ; que les stipulations du paragraphe 42 de l'accord du 23 septembre 2006, dans sa rédaction issue de l'avenant signé le 25 février 2008, renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière, rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application de l'article L. 313-14 de ce code ; que, par suite, M. BA n'est pas fondé à invoquer les dispositions de l'article 42 de l'accord franco-sénégalais ;
3. Considérant que M. BA est célibataire sans charge de famille ; qu'il déclare être entré en France en 2007 ; qu'il s'est maintenu en France malgré un précédent refus de titre de séjour daté du 14 novembre 2014 assorti d'une obligation de quitter le territoire français ; que, s'il fait valoir résider depuis 2007 en France, les pièces qu'il produit et notamment des bulletins de paie attestant un début d'embauche à compter de 2010, une attestation de souscription de compte bancaire et des ordonnances médicales, si elles peuvent prouver une présence ponctuelle en France, sont insuffisantes pour établir sa présence habituelle en France depuis 2007 ; que la circonstance qu'il a occupé depuis 2010 un emploi saisonnier de plongeur puis d'employé de cuisine dans des restaurants sur une durée cumulée de 17 mois ne peut être regardée comme un motif exceptionnel ni une considération humanitaire de nature à l'admettre exceptionnellement au séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que M. BA ne peut pas non plus utilement invoquer les orientations générales que le ministre de l'intérieur, dans sa circulaire du 28 novembre 2012, a adressées aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation et qui est dépourvue de valeur réglementaire ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'il appartient au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour par un étranger, de vérifier que la décision de refus qu'il envisage de prendre ne comporte pas de conséquences d'une gravité exceptionnelle sur la situation personnelle de l'intéressé et n'est pas ainsi entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
5. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 3, le requérant n'établit pas résider habituellement en France depuis 2007 ; qu'il est célibataire sans charge de famille ; qu'il ne fait valoir aucun lien familial ou personnel en France ; qu'il n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu selon ses dires jusqu'à l'âge de 35 ans ; qu'il n'est ainsi pas fondé à soutenir qu'il a établi en France le centre de ses intérêts privés et familiaux ; que le requérant ne peut faire valoir sa bonne intégration dans la société française alors qu'il ne conteste pas qu'il a été condamné les 13 juin 2013, 19 septembre 2013 et 14 mars 2014 par le tribunal correctionnel de Grasse à des peines de six mois d'emprisonnement avec sursis pour faux et usage de faux ; qu'ainsi, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le refus de titre de séjour en litige ne méconnaît ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas entaché son refus d'une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. BA ;
6. Considérant en troisième lieu que le requérant n'établit pas, en se bornant à soutenir qu'il sera confronté "en toute probabilité" à des problèmes d'insertion en cas de retour dans son pays d'origine que le préfet ne pouvait légalement assortir son refus de titre de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. BA n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. BA est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Cheik Yero BAet au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 31 août 2017, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- M. Portail, président assesseur,
- Mme Carassic, première conseillère.
Lu en audience publique, le 14 septembre 2017.
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N° 16MA04188