Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 janvier 2019, sous le n° 19NC00083, Mme D..., représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 14 septembre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 juillet 2018 pris à son encontre par le préfet de la Moselle ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir.
Elle soutient que :
- elle n'a pas renoncé à sa demande d'admission au séjour pour raisons de santé ;
- l'arrêté attaqué n'est pas motivé ;
- il méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire enregistré le 19 mai 2020, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.
Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 18 décembre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
-la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
-le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
-le code des relations entre le public et l'administration
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience
Le rapport de Mme E..., présidente-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D..., ressortissante russe, est entrée irrégulièrement en France en décembre 2014. Elle a déposé une demande tendant au bénéfice du statut de réfugiée qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) du 15 septembre 2015, refus confirmé par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 10 janvier 2017. Par un arrêté du 6 juillet 2018, le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite à l'expiration de ce délai. Mme D... relève appel du jugement du 14 septembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. En premier lieu, il ressort des mentions de l'arrêté contesté que le préfet de la Moselle a d'abord constaté le rejet, devenu définitif, de la demande d'asile présentée par Mme D... et l'irrecevabilité de sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour pour lui permettre de bénéficier de soins appropriés à son état de santé. Puis, il a observé qu'elle n'avait invoqué aucun évènement personnalisé déterminant, récent ou inopiné qui serait de nature à démontrer qu'une mesure d'éloignement serait contraire aux stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il a ainsi déterminé, au vu des éléments dont il avait connaissance, qu'aucune circonstance ne faisait obstacle à une mesure d'éloignement. Cet arrêté, pris notamment au visa des dispositions du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et dont la rédaction n'est pas stéréotypée, comporte donc l'ensemble des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet arrêté doit être écarté.
3. En deuxième lieu, Mme D... fait valoir qu'elle avait déposé une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 2 août 2017, le préfet lui a demandé de compléter son dossier par la production des pièces nécessaires en l'informant qu'à défaut, elle serait réputée avoir renoncé à sa demande. Par un courrier du 22 juin 2018, le préfet l'a informée qu'en l'absence de production du document sollicité, il considérait qu'elle avait renoncé à sa demande de titre de séjour qui avait été classée sans suite. La requérante ne démontre pas avoir fait parvenir à l'administration les documents réclamés avant son courrier du 9 juillet 2018, postérieur à l'édiction de la décision contestée du 6 juillet 2018. Ainsi, à la date à laquelle il a pris l'arrêté litigieux, le préfet de la Moselle ne pouvait pas être regardé comme saisi d'une demande de titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen doit être écarté.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ". Il ressort des pièces du dossier que, si l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 26 novembre 2018 indique que Mme D... serait exposée à des conséquences d'une exceptionnelle gravité en cas de défaut de prise en charge de ses pathologies, il mentionne que l'intéressée pourra voyager sans risque vers son pays d'origine où elle pourra bénéficier d'un traitement approprié. Le certificat médical transmis par l'intéressée ne mentionne pas qu'elle ne pourrait pas avoir accès à un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. En quatrième lieu, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aurait été méconnu dès lors, d'une part, que Mme D..., qui n'a pas saisi le préfet d'une demande de titre de séjour présentée sur ce fondement, ne se prévaut d'aucune circonstance susceptible de constituer des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'autre part, que dans l'arrêté litigieux le préfet s'est borné à constater qu'aucun élément d'information de nature à justifier la délivrance d'un titre sur ce fondement ne lui avait été communiqué.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Mme D... soutient que sa fille, chez laquelle elle est hébergée, est titulaire d'un titre de séjour et dispose des ressources nécessaires. Toutefois, la requérante ne fait état d'aucun élément permettant d'apprécier la nécessité pour elle de demeurer auprès de sa fille, laquelle a constitué sa propre cellule familiale en France. Elle ne justifie pas davantage de son intégration dans la société française. Enfin, en se bornant à faire valoir qu'elle est divorcée et qu'elle n'a plus de domicile en Russie, la requérante n'établit pas qu'elle serait isolée en cas de retour dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 62 ans. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de libertés fondamentales doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est fondée à demander ni l'annulation du jugement du 14 septembre 2018 ni celle de l'arrêté du 6 juillet 2018 par lequel le préfet de la Moselle lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent de même qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... née D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... née D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
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N° 19NC00083