Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 16 novembre 2018, le département de la Haute-Saône, représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 1700370 du tribunal administratif de Besançon en date du 18 octobre 2018 ;
2°) de rejeter la demande de première instance de M. C....
Il soutient que :
- pour avoir appréhendé de manière inexacte les dispositions législatives et réglementaires applicables aux ouvriers des parcs et ateliers intégrés à la fonction publique territoriale, le tribunal a commis une erreur de droit ;
- en ne tenant pas compte de l'existence d'une limite maximale fixée à la rémunération des ouvriers des parcs et ateliers intégrés le tribunal a commis une erreur de droit ;
- en ne retenant pas que dans l'hypothèse où les modalités de détermination de ses échelon et grade d'intégration aboutissent à une rémunération identique voire plus élevée de l'ancien ouvrier des parcs et ateliers, cela ne saurait aboutir à excéder le niveau immédiatement supérieur qu'il percevait antérieurement, le tribunal a eu une lecture erronée des dispositions réglementaires ;
- pour avoir mal qualifié la situation contextuelle, le tribunal a commis des erreurs manifestes d'appréciation ;
- pour avoir omis de statuer sur l'ensemble des arguments qu'il a exposés dans ses écritures en défense, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ; l'intégration de M. C... lui est très bénéfique ayant engendré une augmentation substantielle de ses revenus ;
- l'arrêté du 18 octobre 2016 est justifié au regard de l'impossibilité de faire varier la rémunération des ouvriers des parcs et ateliers ayant opté pour leur intégration dans la fonction publique territoriale ni à la baisse, ni à la hausse, au-delà d'un indice immédiatement supérieur à celui dont ils bénéficiaient précédemment ;
- l'arrêté en litige est conforme aux dispositions réglementaires qui fixent une limite maximale à la rémunération de l'ouvrier des parcs et ateliers ayant opté pour son intégration dans la fonction publique territoriale ;
- l'arrêté du 18 octobre 2016, qui se borne à concrétiser, sur le plan pécuniaire, l'arrêté du 21 décembre 2015 portant intégration de M. C... dans la fonction publique territoriale, peut être regardé comme une mesure d'ordre intérieur ;
- la décision que le tribunal a décidé d'annuler a cessé de produire ses effets avant même que le jugement ne soit rendu du fait de la transposition de son régime dans l'IFSE ;
- la modulation du régime indemnitaire de M. C... est justifiée au regard du principe d'égalité de traitement ;
- la délibération du 19 décembre 2002 et les délibérations subséquentes concernant le régime indemnitaire des agents départementaux permettent de moduler notamment le taux de la prime de rendement et de service et de l'indemnité spécifique de service.
Malgré une mise en demeure et une ordonnance de clôture d'instruction, aucune défense n'a été produite.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 ;
- le décret n° 2014-456 du 6 mai 2014 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D..., présidente-assesseure,
- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., précédemment agent de l'Etat en qualité d'ouvrier des parcs et ateliers de l'Etat, a été mis à disposition du département de la Haute-Saône, puis a été intégré, le 1er janvier 2017, dans le cadre d'emplois des agents de maîtrise territoriaux, au grade d'agent de maîtrise territorial principal. Par l'arrêté attaqué du 30 décembre 2016, le président du conseil départemental de la Haute-Saône a fixé son indemnité annuelle d'exercice de missions des préfectures à 2 769,20 euros, avec un coefficient de 2,30, et son indemnité annuelle d'administration et de technicité à 2 366,28 euros, à compter de son intégration, avec un coefficient de 4,80. M. C... a saisi le tribunal administratif de Besançon d'une demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 décembre 2016. Le département de la Haute-Saône relève appel du jugement du 18 octobre 2018 qui annule cet arrêté en tant qu'il a fixé l'indemnité annuelle d'administration et de technicité versée à M. C... à 2 366,28 euros (coefficient de 4,80).
Sur la régularité du jugement :
2. Contrairement aux allégations du département de la Haute-Saône, le tribunal administratif de Besançon, s'il devait les examiner, n'était pas tenu de se prononcer explicitement sur l'ensemble des arguments exposés par les parties. Par suite, une telle circonstance est sans incidence sur la régularité de son jugement.
Sur le bien-fondé du jugement :
3. En premier lieu, le département de la Haute-Saône n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté du président du conseil départemental du 30 décembre 2016, qui a des incidences sur le niveau de rémunération de M. C..., constitue une mesure d'ordre intérieur. Il n'est pas plus fondé à soutenir que, cet arrêté ayant cessé de produire ses effets, il ne pouvait faire l'objet d'un recours devant le juge administratif.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires, dans sa rédaction alors applicable : " Les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l'indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire.". Aux termes du III de l'article 11 de la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 relative au transfert aux départements des parcs de l'équipement et à l'évolution de la situation des ouvriers des parcs et ateliers : " Les agents intégrés reçoivent une rémunération au moins égale à leur rémunération globale antérieure. La rémunération globale correspond à la rémunération brute de base augmentée des primes et indemnités à l'exclusion de celles versées pour services effectués lors de travaux supplémentaires. (...) ". Aux termes de l'article 2 du décret n° 2004-456 du 6 mai 2014, fixant les conditions d'intégration dans les cadres d'emplois de la fonction publique territoriale des ouvriers des parcs et ateliers des ponts et chaussées et des bases aériennes : " L'échelon du grade d'intégration est déterminé en prenant en compte le niveau salarial acquis pour ancienneté de service dans l'emploi d'origine, de manière à ce que le traitement afférent soit égal ou immédiatement supérieur à la rémunération de l'ouvrier à la date de son intégration dans la fonction publique territoriale, comprenant le salaire de base de la classification d'origine et la prime d'ancienneté, prévus respectivement aux articles 12 et 9 du décret du 21 mai 1965 susvisé ainsi que, le cas échéant, la prime d'expérience créée par le décret n° 2003-936 du 30 septembre 2003, relatif à la prime d'expérience allouée aux ouvriers permanents des parcs et ateliers des ponts et chaussées et des bases aériennes. / (...) / Lorsque l'application des dispositions précédentes conduit à classer l'ouvrier à un échelon du grade d'intégration doté d'un traitement inférieur au niveau salarial acquis pour ancienneté de service dans son emploi d'origine, tel que défini au deuxième alinéa, il bénéficie à titre personnel d'un traitement indiciaire correspondant à ce niveau salarial. Le traitement ainsi conservé ne peut excéder la limite du traitement indiciaire afférent au dernier échelon du grade le plus élevé du cadre d'emplois d'intégration.".
5. Il résulte de ces dispositions que ni l'article 2 du décret n° 2004-456 du 6 mai 2014, qui ne concerne que le " traitement afférent " à l'échelon du grade d'intégration ou le " traitement indiciaire ", à l'exclusion des primes et indemnités, ni le III de l'article 11 de la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009, qui se borne à instituer un niveau minimal de rémunération, ne s'opposent à ce que la rémunération globale des ouvriers des parcs et ateliers intégrés dans la fonction publique territoriale, constituée du traitement augmenté des primes et indemnités, soit supérieure à leur rémunération antérieure. Par suite, le président du conseil départemental de la Haute Saône ne pouvait légalement se fonder sur ces dispositions pour appliquer à l'indemnité spécifique de service et à la prime de service et de rendement de M. C... des taux inférieurs à ceux correspondant à son grade et à son échelon.
6. En troisième lieu, si la délibération du 19 décembre 2002 et les délibérations subséquentes adoptées par le conseil départemental de la Haute-Saône et concernant le régime indemnitaire des agents du département permettent notamment de moduler le taux de la prime de rendement et de service et de l'indemnité spécifique de service, cette possibilité de modulation n'autorisait pas le président du conseil départemental à verser un niveau de prime inférieur à celui auquel M. C... pouvait prétendre compte tenu de son grade et de son échelon.
7. En quatrième lieu, la circonstance que M. C..., dont la rémunération aurait augmenté de manière substantielle, a profité financièrement de son intégration dans la fonction publique territoriale est sans incidence sur les droits qu'il tient des dispositions applicables et ne saurait, par suite, être utilement invoquée pour justifier l'arrêté en litige. Ce moyen doit par suite être écarté comme inopérant.
8. En cinquième et dernier lieu, il est constant que M. C..., en sa qualité d'ancien ouvrier des parcs et ateliers de l'Etat, intégré à sa demande dans le cadre d'emploi des techniciens territoriaux, relève du régime juridique spécifique institué par la loi n° 2009-1291 du 26 octobre 2009 et par le décret n° 2004-456 du 6 mai 2014. Il se trouve ainsi dans une situation objectivement différente de celle des techniciens territoriaux recrutés par la voie normale. Par suite, le département de la Haute-Saône n'est pas fondé à soutenir que le versement à l'intéressé, au titre de la prime de service et de rendement et de l'indemnité spécifique de service, des sommes auxquelles lui donnent droit son grade et son échelon serait constitutif, vis-à-vis des seconds, d'une méconnaissance du principe de l'égalité de traitement.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le département de la Haute-Saône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé l'arrêté du président du conseil départemental de la Haute-Saône du 30 décembre 2016.
DECIDE :
Article 1er : La requête du département de la Haute-Saône est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au département de la Haute-Saône et à M. A... C....
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N° 18NC03090