Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée, sous le n° 19NC02803, le 10 septembre 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon du 4 avril 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 2 février 2018 par laquelle le chef d'établissement de la maison d'arrêt de Besançon a prolongé son isolement ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 7611 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la communication du sens des conclusions du rapporteur public du tribunal administratif de Strasbourg n'a pas répondu aux exigences de l'article R. 711-3 du code de justice administrative ;
- le jugement attaqué ne comporte pas les signatures exigées par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- les premiers juges ont méconnu les dispositions de l'article 726-1 du code de procédure pénale et ont visé à tort l'article D. 55 de ce code, pourtant inapplicable puisqu'il était en exécution d'un jugement prononcé en raison de la violation d'une assignation à résidence ;
- aucun élément actuel ne justifiait d'une prolongation de l'isolement du requérant ;
- la décision du 2 février 2018 est entachée d'erreur de droit au regard de l'article 726-1 du code de procédure pénale, selon lequel l'isolement est décidé par mesure de protection ou de sécurité ; cette décision est en réalité motivée par le non-respect de l'assignation à résidence et la surpopulation carcérale ;
- cette décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, l'administration n'ayant pas justifié que la prolongation de son isolement constituait l'unique moyen d'assurer la sécurité des personnes ou de l'établissement ;
- cette mesure constitue un détournement de pouvoir.
La requête a été communiquée au ministre de la justice qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 9 juillet 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Goujon-Fischer, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Peton, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., écroué à la maison d'arrêt de Besançon à compter du 14 décembre 2017, a fait l'objet, dès son arrivée, d'une mesure de placement provisoire à l'isolement. Par une décision du 18 décembre 2017, le directeur de la maison d'arrêt l'a placé à l'isolement pour la période du 18 décembre 2017 au 5 février 2018. Par une décision du 2 février 2018, il a prolongé cette mesure pour une durée de trois mois, courant du 5 février 2018 au 5 mai 2018. M. B... relève appel du jugement du 4 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette dernière décision.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne ".
3. La communication aux parties du sens des conclusions, prévue par ces dispositions, a pour objet de les mettre en mesure d'apprécier l'opportunité d'assister à l'audience publique, de préparer, le cas échéant, les observations orales qu'elles peuvent y présenter, après les conclusions du rapporteur public, à l'appui de leur argumentation écrite et d'envisager, si elles l'estiment utile, la production, après la séance publique, d'une note en délibéré. En conséquence, les parties ou leurs mandataires doivent être mis en mesure de connaître, dans un délai raisonnable avant l'audience, l'ensemble des éléments du dispositif de la décision que le rapporteur public compte proposer à la formation de jugement d'adopter, à l'exception de la réponse aux conclusions qui revêtent un caractère accessoire, notamment celles qui sont relatives à l'application de l'article L. 7611 du code de justice administrative. Cette exigence s'impose à peine d'irrégularité de la décision rendue sur les conclusions du rapporteur public.
4. Il ressort des pièces du dossier de première instance que le rapporteur public a, avant l'audience publique du tribunal administratif de Besançon du 4 avril 2019, précisé le sens de ses conclusions dans l'affaire concernant M. B..., en faisant porter, sur le site Sagace, la mention " Rejet au fond ". Contrairement à ce que soutient le requérant, qui ne saurait utilement se prévaloir de la circulaire du 9 janvier 2009, dépourvue de valeur réglementaire, cette mention répondait suffisamment aux exigences de l'article R. 711-3 du code de justice administrative.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative aux termes duquel : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Il résulte de l'examen de la minute du jugement attaqué que celui-ci comporte toutes les signatures requises par les dispositions qui précèdent. L'absence de signatures sur l'expédition du jugement notifié au requérant n'entache pas ce jugement d'irrégularité.
Sur la légalité de la décision du 2 février 2017 :
6. Aux termes de l'article 726-1 du code de procédure pénale, " Toute personne détenue, sauf si elle est mineure, peut être placée par l'autorité administrative, pour une durée maximale de trois mois, à l'isolement par mesure de protection ou de sécurité soit à sa demande, soit d'office. Cette mesure ne peut être renouvelée pour la même durée qu'après un débat contradictoire, au cours duquel la personne concernée, qui peut être assistée de son avocat, présente ses observations orales ou écrites. / L'isolement ne peut être prolongé au-delà d'un an qu'après avis de l'autorité judiciaire (...) ". Aux termes de l'article R. 57-7-73 du même code : " Tant pour la décision initiale que pour les décisions ultérieures de prolongation, il est tenu compte de la personnalité de la personne détenue, de sa dangerosité ou de sa vulnérabilité particulière, et de son état de santé (...) ".
7. Il ressort de la décision même du 2 février 2018, par laquelle le directeur de la maison d'arrêt de Besançon a prolongé le placement à l'isolement de M. B... que cette décision a été prise au regard, d'une part, des faits de non-respect d'une assignation à résidence prononcée par le ministre de l'intérieur dans le cadre de l'état d'urgence, ayant fondé la condamnation de l'intéressé à une peine de 18 mois d'emprisonnement, d'autre part, des éléments contenus dans la notice individuelle établie par le magistrat compétent et, enfin, de la circonstance que l'encellulement individuel de M. B... ne pouvait être garanti qu'au quartier d'isolement. La notice individuelle évoquée dans cette décision, établie le 31 octobre 2017 par la présidente du tribunal de grande instance d'Auxerre, préconisait de séparer l'intéressé des autres détenus en raison de l'instabilité de son caractère. M. B... a en outre fait l'objet, depuis son incarcération à la maison d'arrêt de Besançon, de trois comptes rendus d'incidents survenus les 30 décembre 2017, 1er janvier et 20 janvier 2018 pour des faits de violence et menace envers un personnel pénitentiaire et détention irrégulière d'une clé USB. En estimant que ces faits rendaient nécessaires, par mesure de protection ou de sécurité, la prolongation du placement à l'isolement de M. B..., le directeur de la maison d'arrêt de Besançon n'a entaché sa décision ni d'erreur de droit, ni d'erreur d'appréciation, ni de détournement de pouvoir. La prolongation de l'isolement de M. B..., pour une période de trois mois, courant du 5 février 2018 au 5 mai 2018, et consécutive à de précédentes périodes d'isolement ayant couru du 7 novembre 2017 au 5 février 2018, n'était, en tout état de cause, pas subordonnée à la condition qu'une telle mesure constitue l'unique moyen d'assurer la sécurité des personnes ou de l'établissement.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Sur les frais liés à l'instance :
9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
10. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. B... au titre des frais non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de la justice.
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N° 19NC02803