Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée sous le n° 19NC03308 le 15 novembre 2019, M. B..., représenté par Me A... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 5 juin 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit statué sur la demande, dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 500 euros application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
S'agissant du refus de séjour :
- l'arrêté litigieux méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour ;
- elle méconnaît l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- cette décision est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
Un mémoire présenté par le préfet du Bas-Rhin a été enregistré le 16 octobre 2020, postérieurement à la clôture de l'instruction.
II. Par une requête enregistrée sous le n° 19NC03309 le 15 novembre 2019, Mme B..., représentée par Me A... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 5 juin 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2018 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce qu'il soit statué sur la demande, dans un délai de quinze jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 500 euros application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
S'agissant du refus de séjour :
- l'arrêté litigieux méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- il méconnaît en outre l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- cette décision est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour ;
S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :
- cette décision est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.
Un mémoire présenté par le préfet du Bas-Rhin a été enregistré le 16 octobre 2020, postérieurement à la clôture de l'instruction.
M. et Mme B... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision en date du 19 septembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Goujon-Fischer premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme B..., ressortissants arméniens, sont entrés en France, selon leurs déclarations, le 27 juillet 2015, en vue d'y solliciter l'asile. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 29 février 2016, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 29 septembre 2016. A la suite du rejet, par le préfet du Bas-Rhin, de la demande de titre de séjour déposée par Mme B... pour motifs de santé, M. et Mme B... ont sollicité, le 6 juin 2018, leur admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par deux arrêtés du 19 octobre 2018, le préfet du Bas-Rhin a refusé de faire droit à cette demande, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par deux requêtes, enregistrées sous les n° 19NC03308 et 19NC03309, qu'il y a lieu de joindre, M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 5 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à 1'annulation de ces arrêtés.
Sur la légalité des arrêtés du 19 octobre 2018 :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace à l'ordre public et à condition qu'il ne vive pas en état de polygamie, la carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2, à l'étranger accueilli par les organismes mentionnés au premier alinéa de l'article L. 265-1 du code de l'action sociale et des familles qui justifie de trois années d'activité ininterrompue au sein de ce dernier, du caractère réel et sérieux de cette activité et de ses perspectives d'intégration, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat ". L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Si M. et Mme B... soutiennent être entrés en France en 2015, alors âgés, respectivement, de 21 et 20 ans, ils ne justifient pas plus en appel qu'en première instance de la présence en France du père de Mme B..., ni, en tout état de cause, de la nécessité de leur présence auprès de celui-ci, alors qu'ils n'établissent pas être dépourvus d'attaches familiales dans leur pays d'origine. S'ils se prévalent de l'état de santé de leur fille, née en 2017, en produisant plusieurs certificats médicaux, dont il ressort que celle-ci souffre d'un asthme de l'enfant nécessitant des soins constants ainsi qu'un logement adapté, il ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier qu'une prise en charge adaptée de cette pathologie ne serait pas possible dans le pays d'origine des requérants. Ainsi, eu égard aux circonstances de l'espèce, notamment à la durée et aux conditions du séjour des requérants en France, et nonobstant les efforts d'intégration ou la promesse d'embauche dont il se prévalent, les arrêtés contestés n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels ils ont été pris. Par suite, ces arrêtés n'ont méconnu ni le 7° l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Eu égard à ce qui vient d'être dit, les circonstances alléguées par les requérants ne suffisent pas non plus à caractériser une erreur manifeste dans l'appréciation par le préfet de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que si la fille de M. et Mme B... souffre d'un asthme nécessitant des soins et un environnement adapté, il ne ressort pas des pièces du dossier que ceux-ci ne pourraient pas lui être apportés dans le pays d'origine des requérants. Le préfet du Bas-Rhin n'a dès lors pas méconnu l'intérêt supérieur de l'enfant protégé par l'article 3-1 précité.
5. M. et Mme B... n'ayant pas démontré l'illégalité des décisions par lesquelles le préfet du Bas-Rhin leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, ils ne sont pas fondés à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'appui de leurs conclusions dirigées contre les décisions les obligeant à quitter le territoire français, ni à exciper de l'illégalité de ces dernières décisions à l'encontre de celles fixant le pays de renvoi.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
7. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. et Mme B....
Sur les frais liés à l'instance :
8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
9. Ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que M. et Mme B... demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à Mme C..., épouse B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
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N° 19NC03308, 19NC03309