M. A... D... a également demandé au tribunal administratif de Besançon d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2019 par lequel le préfet de la Haute-Saône a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi, d'enjoindre à la préfète de la Haute-Saône de lui délivrer un certificat de résidence d'Algérien dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement ainsi qu'un récépissé de demande de titre de séjour avec droit au travail dans un délai de huit jours à compter de cette même notification et, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation personnelle et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de cette notification sous astreinte de 50 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Par un jugement n° 1902000 du 20 février 2020, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée sous le n° 20NC01016 le 30 avril 2020, M. D... représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Besançon n° 1902000 du 20 février 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2019 par lequel le préfet de la Haute-Saône a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Saône, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence d'Algérien de 10 ans dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente de la remise effective de ce titre, un récépissé de demande de titre de séjour avec droit au travail, dans un délai de 8 jours suivant la notification de cet arrêt, à titre subsidiaire, de lui délivrer un certificat de résidence d'Algérien portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente de la remise effective de ce titre, un récépissé de demande de titre de séjour avec droit au travail, dans un délai de 8 jours suivant la notification de l'arrêt et, à titre infiniment subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail dans un délai de 8 jours suivant la notification de la décision à intervenir, à renouveler en l'attente du réexamen du droit au séjour et sous astreinte de 50 euros par jour de retard à l'expiration de ce délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que c'est à tort que le préfet a conclu à l'absence de communauté de vie avec son épouse.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2020, le préfet de la Haute-Saône conclut à titre principal au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit seulement enjoint de réexaminer la situation du requérant et à ce que les frais d'instance alloués au requérant soient limités à 300 euros.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
II. Par une requête enregistrée sous le n° 20NC01017 le 30 avril 2020, M. D... représenté par Me B... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Besançon n° 1902016 du 25 novembre 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 14 novembre 2019 par lequel le préfet de la Haute-Saône l'a assigné à résidence ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- il n'existait pas de perspectives raisonnables d'éloignement ; en effet, l'exécution de la mesure d'éloignement n'était pas possible tant qu'il n'avait pas été statué sur le recours formé contre celle-ci, sauf à enfreindre l'article L. 513-1, I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'assignation à résidence est fondée sur un refus de séjour illégal puisque, pour opposer ce refus de séjour, le préfet a conclu à tort à l'absence de communauté de vie avec son épouse.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juin 2020, le préfet de la Haute-Saône conclut à titre principal au rejet de la requête et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit seulement enjoint de réexaminer la situation du requérant et à ce que les frais d'instance alloués au requérant soient limités à 450 euros.
Il fait valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décisions en date du 14 mai 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Goujon-Fischer premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant algérien, est entré en France le 2 janvier 2017, sous couvert d'un visa C valable du 20 décembre 2016 au 17 juin 2017, à la suite de son mariage avec une ressortissante française, le 29 août 2016 en Algérie, et de la retranscription de l'acte de mariage sur les registres de l'état civil français le 28 octobre 2016. Le 18 juin 2017, le préfet de la Haute-Saône lui a délivré un certificat de résidence d'Algérien d'un an portant la mention " vie privée et familiale " en qualité de conjoint de français, valable jusqu'au 17 juin 2018. Le 27 avril 2018, M. D... a sollicité le renouvellement de ce certificat de résidence sur le fondement des articles 6 et 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 12 juillet 2019, le préfet de la Haute-Saône a refusé de faire droit à sa demande de renouvellement, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un arrêté du 14 novembre 2019, le préfet de la Haute-Saône a également décidé d'assigner M. D... à résidence pour une durée de quarante-cinq jours. Par deux requêtes, qu'il y a lieu de joindre, M. D... relève appel du jugement du magistrat désigné par le tribunal administratif de Besançon du 25 novembre 2019 et du jugement du tribunal administratif de Besançon du 20 février 2020, par lesquels ont été rejetées ses demandes tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de la Haute-Saône des 12 juillet et 14 novembre 2019.
Sur la légalité des arrêtés des 12 juillet et 14 novembre 2019 :
En ce qui concerne l'arrêté du 12 juillet 2019 :
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux ". Aux termes de l'article 7 bis de cet accord : " (...) Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. D... s'est vu accorder un certificat de résidence d'Algérien d'un an portant la mention " vie privée et familiale " valable du 18 juin 2017 au 17 juin 2018 au regard de son mariage avec Mme C..., ressortissante française, célébré le 29 août 2016 en Algérie et transcrit sur les registres de l'état civil français le 28 octobre 2016. Selon le rapport établi le 16 mai 2019 par le service départemental de renseignement territorial de la Haute-Saône, à la suite d'une visite domiciliaire inopinée effectuée à la demande du préfet le 17 avril 2019 au domicile de Mme C... avenue du lac à Vesoul, celle-ci se trouvait alors seule présente à son domicile, M. D... étant, selon ses dires, parti à Montbéliard le 15 janvier 2019 pour y chercher du travail. Il ressort également de ce rapport que Mme C... n'a pu fournir à cette occasion ni de numéro de téléphone, ni d'adresse électronique, ni d'adresse postale au nom de M. D..., ni présenter d'affaires personnelles ou de documents administratifs appartenant à ce dernier, ni d'expliquer cette absence d'effets personnels. Reçu en entretien par le service départemental de renseignement territorial plusieurs jours après cette visite domiciliaire, l'intéressée a, d'une part, déclaré qu'elle vivait à nouveau en couple à son domicile avec M. D... depuis le 21 avril 2019, ce dernier étant en recherche d'emploi sur le secteur de Vesoul et, d'autre part, expliqué son impossibilité de présenter des effets personnels de son mari lors de la visite domiciliaire du 17 avril précédent par le fait qu'ils auraient brûlé dans l'incendie qui avait ravagé leur précédent appartement situé à Vesoul le 24 janvier 2019. Reçu lui-même en entretien, M. D... a confirmé dans les mêmes termes les allégations de son épouse.
4. Pour justifier de l'existence d'une communauté de vie malgré l'absence de cohabitation permanente résultant de son activité professionnelle à Montbéliard, le requérant a présenté une attestation établie par Mme C... le 17 septembre 2019 reconnaissant la séparation du couple entre le 15 janvier et le 21 avril 2019 et déclarant que M. D... avait dû élargir son secteur de recherche d'emploi au-delà de Vesoul, un bail, des factures d'électricité établies aux deux noms en janvier et septembre 2017 à la première adresse supposée du couple cours Montaigne à Vesoul, une convocation de l'Office français de l'immigration et de l'intégration de juillet 2017 et des attestations de travail destinées à Pôle Emploi portant cette même adresse, des bulletins de salaire de 2018 à février 2019 portant la mention des adresses successives de Mme C... cours Montaigne, avenue des Repes et avenue du Lac à Vesoul, un relevé de la caisse d'allocations familiales de juillet 2019 mentionnant la reprise de vie commune du couple depuis le 21 avril 2019, des attestations de Total Spring de mai et septembre 2019 communes, un abonnement nominatif sur le trajet " Montbéliard ville/Vesoul ", ainsi que diverses attestations établies par des proches. Toutefois, si les divers documents présentés sont de nature à établir l'existence d'une domiciliation administrative commune à M. D... et à son épouse à certaines dates, il ne permettent pas d'établir, notamment au regard de l'incohérence entre les dates de certains de ces documents et l'allégation selon laquelle le couple aurait été séparé du 15 janvier au 21 avril 2019, l'existence d'une cohabitation effective, ni, en l'absence même d'une cohabitation permanente, l'existence d'une communauté de vie entre les époux. Les documents et attestations de proches établis postérieurement à l'enquête des services de police d'avril 2019, qui a mis en lumière la rupture des contacts entre M. D... et Mme C..., sont dépourvus de valeur probante, tant en raison de leur caractère sommaire que du fait que plusieurs d'entre eux n'ont été établis que sur la foi des déclarations de M. D... et de son épouse. Le préfet souligne encore que la lettre portant notification, le 15 juillet 2019, de son arrêté, envoyée au domicile supposé commun de M. D... et de Mme C... avenue du lac, est revenue avec la mention selon laquelle l'intéressé était inconnu à cette adresse. Par suite, en estimant que la communauté de vie entre M. D... et son épouse avait cessé, le préfet de la Haute-Saône n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'accord franco-algérien.
En ce qui concerne l'arrêté du 14 novembre 2019 :
5. En premier lieu, M. D... n'ayant pas démontré l'illégalité de la décision du préfet de la Haute-Saône lui ayant refusé le renouvellement de son certificat de résidence d'Algérien, il n'est pas fondé à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision l'ayant assigné à résidence.
6. En second lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français ou ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays, l'autorité administrative peut, jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation, l'autoriser à se maintenir provisoirement sur le territoire français en l'assignant à résidence, dans les cas suivants : / 1° Si l'étranger fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai ou si le délai de départ volontaire qui lui a été accordé est expiré ".
7. M. D..., qui s'était vu notifier une obligation de quitter le territoire français assortie d'un délai de départ volontaire de trente jours, pouvait légalement faire l'objet d'une assignation à résidence sur le fondement des dispositions citées ci-dessus dès lors que ce délai de départ était expiré à la date à laquelle le préfet de la Haute-Saône a décidé de cette assignation à résidence. La circonstance que la mesure d'éloignement ne pouvait faire l'objet d'une exécution d'office avant que le tribunal administratif de Strasbourg, saisi, ait statué sur le recours formé contre elle par M. D... est en elle-même sans incidence sur la légalité de la mesure d'assignation à résidence, laquelle peut, précisément, être prolongée jusqu'à ce qu'existe une perspective raisonnable d'exécution de son obligation.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses demandes.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
9. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, il y a lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. D....
Sur les frais liés à l'instance :
10. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
11. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans les présentes instances, la partie perdante, le versement des sommes que M. D... demande au bénéfice de son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DÉCIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. D... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Saône.
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N° 20NC01016, 20NC01017