Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 8 août 2017, M. E..., représenté par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 28 juillet 2017 ;
2°) d'annuler les arrêtés de la préfète de l'Aube du 25 juillet 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Aube d'examiner sa demande d'admission au séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. E...soutient que :
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est insuffisamment motivée ;
- la préfète n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'a pu faire valoir son droit d'être entendu ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la préfète a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle et familiale.
Sur la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
- la préfète a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle et familiale.
Sur la décision portant assignation à résidence :
- l'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français emporte l'illégalité de la décision l'assignant à résidence.
La requête a été communiquée au préfet de l'Aube, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Par ordonnance du 20 avril 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 22 mai 2018.
La demande d'aide juridictionnelle présentée par M. E...le 4 août 2017 a été rejetée pour caducité par une décision en date du 19 décembre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Laubriat, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par deux arrêtés du 25 juillet 2017, la préfète de l'Aube a, d'une part, obligé M. E..., ressortissant algérien, à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il était susceptible d'être éloigné d'office, d'autre part l'a assigné à résidence dans le département de l'Aube pour une durée de 45 jours. M. E...fait appel du jugement du 28 juillet 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux arrêtés.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par le premier juge, d'écarter les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de l'arrêté du 25 juillet 2017, de l'absence d'examen personnel de la situation de M. E...et du vice de procédure qui ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
4. M. E...fait valoir qu'il vit en France depuis six ans, qu'il a rencontré une compatriote titulaire d'un certificat de résidence en France, enfin que de cette union est née une fille. Toutefois si M. E...soutient être entré pour la première fois en France en 2011, il ne l'établit pas au vu des pièces du dossier. Il ressort, en revanche, des différentes pièces du dossier qu'après avoir vécu en France entre 2013 et 2015, il est reparti en Algérie à une date indéterminée avant de revenir en France le 20 novembre 2015. A la date d'édiction de l'arrêté lui faisant obligation de quitter le territoire français, M. E...ne justifiait donc que d'un peu moins de deux ans de présence continue sur le territoire français. S'il est constant que M. E...a reconnu Mme B... E..., née le 3 août 2015, comme étant sa fille, il ne ressort d'aucune des pièces que M. E...participerait à l'entretien et à l'éducation de cette dernière. Il n'établit pas non plus vivre avec sa concubine, MmeC..., depuis 2013 comme il le prétend. Dans ces conditions, compte tenu de la durée et des conditions de séjour en France de M.E..., le moyen tiré de ce que l'arrêté de la préfète de l'Aube du 25 juillet 2017 lui faisant obligation de quitter le territoire français porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels il a été pris et méconnaîtrait par suite les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
5. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que la préfète de l'Aube aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de M. E...sera écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point précédent.
Sur la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
6. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) / b) Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée en France, sans avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 ".
7. M. E...soutient présenter des garanties de représentation suffisantes. Il indique également avoir entrepris des démarches pour se marier avec MmeC.... Toutefois, d'une part, il est constant que M. E...s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de trois mois du visa " Schengen " que lui avaient délivré les autorités espagnoles. Par suite, par application des dispositions précitées du b) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est réputé exister un risque que M. E...se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été signifiée. La circonstance qu'il justifie d'un lieu de résidence effectif et permanent est à cet égard sans incidence. D'autre part, M.E..., en se bornant à produire la page de garde d'un dossier de mariage, vierge de toute annotation, n'établit pas avoir entrepris des démarches pour épouser sa concubine. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la préfète de l'Aube aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision refusant à M. E...l'octroi d'un délai de départ volontaire sur la vie personnelle et familiale de ce dernier.
Sur la décision portant assignation à résidence :
8. M. E...n'établissant pas l'illégalité de l'arrêté de la préfète de l'Aube du 25 juillet 2017 lui faisant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, soulevé à l'appui des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté portant assignation à résidence pris le même jour, ne peut dès lors qu'être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles qu'il a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.
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N° 17NC02028