Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 16 mars et 27 septembre 2018, la commune de Boussières, représentée par MeE..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement no 1601890 du 18 janvier 2018 du tribunal administratif de Besançon ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme D...A...-F... ;
3°) de condamner Mme A...-F... à lui verser une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La commune de Boussières soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- le jugement est entaché d'erreur de droit ;
- le classement de la parcelle n° 427 en zone 1 AU n'est pas entaché d'erreur manifeste d'appréciation ou d'erreur de droit ;
- cette parcelle est indispensable pour atteindre l'objectif de densification poursuivi par la commune.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2018, MmeA..., représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la commune de Boussières à lui verser une somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme A...soutient qu'aucun des moyens soulevés par la commune n'est fondé.
Un mémoire, présenté par MmeA..., a été enregistré le 2 janvier 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rees, premier conseiller,
- les conclusions de M. Favret, rapporteur public,
- et les observations de Me B...pour Mme A...-F....
Considérant ce qui suit :
1. Le 1er avril 2016, Mme A...a déposé une déclaration préalable de travaux pour la construction d'une piscine sur la parcelle cadastrée section AE n° 427 sur le territoire de la commune de Boussières. Une décision tacite de non-opposition à travaux est née le 1er mai 2016. Le maire a retiré cette décision par un arrêté du 9 juillet 2016. Le recours gracieux formé par Mme A...contre cette décision a été expressément rejeté le 23 septembre 2016.
2. La commune de Boussières relève appel du jugement du 18 janvier 2018 par lequel le tribunal administratif de Besançon a annulé ces décisions.
Sur la régularité du jugement :
3. En premier lieu, le jugement attaqué, contrairement à ce que fait valoir la commune, rappelle de manière suffisamment complète et précise l'objectif de densification dans les orientations d'aménagement et de programmation du plan en ce qui concerne la zone 1 AU, dans laquelle est située la parcelle cadastrée section AE n° 427, en vue de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble de 14 logements. Le jugement indique également que le jardin d'agrément implanté sur la parcelle cadastrée section AE n° 427 est indissociable de la maison individuelle d'habitation de Mme A..., située sur la parcelle cadastrée AE n° 464 classée en zone U, ce qui permet de comprendre pourquoi le tribunal a estimé qu'il forme avec elle un ensemble cohérent et distinct du reste de la zone 1 AU. Enfin, en indiquant que la parcelle section AE n° 427 n'est pas indispensable pour atteindre l'objectif de densification poursuivi dans la zone 1 AU, le tribunal a énoncé de manière suffisamment complète et précise son appréciation à cet égard. Dès lors, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement est insuffisamment motivé.
4. En second lieu, l'erreur de droit éventuellement commise par le tribunal n'affecte que le bien-fondé du jugement et non sa régularité.
5. Il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement est entaché d'irrégularité.
Sur le bien-fondé du jugement :
6. Le maire de la commune de Boussières a décidé de retirer sa précédente décision de non-opposition au motif que la construction projetée ne s'inscrit pas dans le cadre d'une opération d'aménagement d'ensemble, alors que la parcelle d'assiette du projet est classée en zone 1 AU du plan local d'urbanisme où les constructions ne sont autorisées que dans le cadre d'une telle opération.
7. En vertu de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme une décision de non-opposition à une déclaration préalable ne peut être retirée, dans le délai de trois mois suivant son édiction, qu'à la condition qu'elle soit illégale. Aux termes de l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date d'approbation du plan local d'urbanisme révisé de la commune de Boussières, le 10 février 2014 : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs à caractère naturel de la commune destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies publiques et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement définissent les conditions d'aménagement et d'équipement de la zone. Les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et le règlement. (...) ".
8. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation, sur ces différents points, ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle est entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
9. D'une part, si la requérante fait valoir que la parcelle cadastrée section AE n° 427 est indispensable à la réalisation de l'opération d'aménagement d'ensemble de 14 logements dans la zone 1 AU, permettant d'atteindre l'objectif de densification qu'elle s'est fixé dans ce secteur, une telle opération ne peut, conformément aux dispositions de l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme précité, être envisagée que sur des parcelles appartenant à un secteur naturel destiné à être ouvert à l'urbanisation. Par conséquent, l'inclusion d'une parcelle dans une zone AU ne saurait être justifiée au seul motif qu'elle est indispensable à la réalisation de l'opération d'aménagement envisagée dans cette zone.
10. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la propriété de Mme A...comprend une maison d'habitation implantée sur la parcelle cadastrée section AE n° 464 et un jardin d'agrément arboré et fleuri, aménagé sur cette parcelle ainsi que sur la parcelle attenante, cadastrée section AE n° 427, bordé sur sa longueur par un mur de pierres mitoyen. La maison et son jardin forment ainsi un ensemble indissociable et cohérent qui, eu égard à son affectation, empêche de regarder la partie de ce jardin située sur la parcelle cadastrée section AE n° 427 comme appartenant à un secteur à caractère naturel de la commune. Dans ces conditions, cette dernière n'est pas fondée à soutenir que le classement de cette parcelle en zone 1 AU du plan local d'urbanisme n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article R. 123-6 du code de l'urbanisme.
11. Les dispositions de ce plan étant ainsi illégales en tant qu'elles concernent cette parcelle, le maire ne pouvait pas légalement se fonder sur ces dispositions pour retirer la décision tacite de non-opposition à travaux née le 1er mai 2016. La commune n'invoquant par ailleurs aucun autre motif d'illégalité de cette décision, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur le moyen tiré de l'erreur de droit entachant les décisions de retrait du 9 juillet 2016 et de rejet du recours gracieux du 23 septembre 2016.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Boussières n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Besançon a annulé les décisions attaquées. Dès lors, ses conclusions à fin d'annulation ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".
14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A...qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la commune de Boussières demande au titre des frais exposés par elle en appel et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Boussières une somme de 2 000 euros à verser à Mme A...au titre de ces mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la commune de Boussières est rejetée.
Article 2 : La commune de Boussières versera à Mme D...A...une somme de 2 000 (deux mille) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme D...A...est rejeté.
Article 4 :Le présent arrêt sera notifié à la commune de Boussières et à Mme D...A....
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N° 18NC00736