Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 19 novembre 2019, M. C..., représenté par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) principalement, d'annuler cet arrêté et subsidiairement, de surseoir à statuer jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur sa nationalité française ;
3°) d'enjoindre au préfet de Doubs de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt, dans l'attente de la décision relative à sa nationalité française, subsidiairement de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention vie privée et familiale, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation sous la même condition de délai ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'il n'était pas de nationalité française alors que la filiation à l'égard de son père de nationalité française est établie par un acte de naissance des autorités centrafricaines lequel est présumé régulier sauf preuve contraire en vertu de l'article 47 du code civil ; en tout état de cause il s'agit là d'une question préjudicielle de nationalité impliquant nécessairement qu'il soit sursis à statuer jusqu'à la décision de l'autorité judiciaire sur sa nationalité ;
- la décision de refus de titre de séjour viole l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que le 7° de l'article L. 313-11 du même code ;
- l'obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales compte tenu des risques encourus en cas de retour en Centrafrique.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2020, le préfet du Doubs conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.
M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Nancy du 17 octobre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code civil ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C..., ressortissant centrafricain né en 1987 à Bangui, est entré en France le 16 septembre 2015, sous couvert d'un visa Schengen de type C à entrées multiples délivré par les autorités françaises, valable du 3 septembre 2015 au 7 octobre 2015. Le 22 septembre 2015, il a présenté une demande d'asile, qui a été successivement rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 19 avril 2016, et par la Cour nationale du droit d'asile, le 1er octobre 2018. L'intéressé, se prévalant de sa nationalité centrafricaine, a alors saisi le préfet du Doubs d'une demande de régularisation de son séjour par lettre du 24 octobre 2018. Par un arrêté du 19 février 2019, le préfet du Doubs a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 2 juillet 2019, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur l'exception de nationalité française :
2. A l'appui de son recours tendant à l'annulation des décisions prises à son encontre par le préfet du Doubs par l'arrêté attaqué du 19 février 2019, le requérant soutient être de nationalité française pour avoir été reconnu par le mari français de sa mère le 10 février 2004 par un acte transcrit dans les registres de l'état civil centrafricain.
3. Aux termes de l'article L. 111-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sont considérées comme étrangers au sens du présent code les personnes qui n'ont pas la nationalité française, soit qu'elles aient une nationalité étrangère, soit qu'elles n'aient pas de nationalité ". Aux termes de l'article 18 du code civil : " Est français l'enfant dont l'un des parents au moins est français ". Aux termes de l'article 29 du code civil : " La juridiction civile de droit commun est seule compétente pour connaître des contestations sur la nationalité française ou étrangère des personnes physiques. Les questions de nationalité sont préjudicielles devant toute autre juridiction de l'ordre administratif ou judiciaire ". Il résulte, enfin, de l'article 30 du code civil que la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause, sauf s'il est titulaire d'un certificat de nationalité française.
4. Il ressort des pièces du dossier que la demande de certificat de nationalité française de M. C... a été rejetée par la directrice des services du greffe du tribunal d'instance de Besançon le 8 février 2019 en l'absence de vérification de la régularité de l'acte d'état civil établissant la filiation de l'intéressé et en l'absence de la possession d'état. Si M. C... soutient qu'il entend contester cette décision et a introduit une nouvelle demande d'acte d'état civil en Centrafrique, il ne justifie pas avoir introduit les recours prévus par la loi, soit un recours gracieux devant le garde des sceaux ministre de la justice, soit un recours contentieux devant le tribunal judiciaire. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le préfet du Doubs, au vu du refus de certificat de nationalité française, a estimé que l'intéressé n'était pas français. Il résulte également de ces circonstances que la question de la nationalité française du requérant ne présente pas pour la cour un caractère sérieux justifiant le renvoi d'une question préjudicielle à l'autorité judiciaire.
Sur la légalité du refus de titre de séjour :
5. D'abord, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. M. C... fait valoir qu'il réside sur le territoire français depuis 2015 avec sa mère et son père, qui lui apportent un soutien moral, qu'il est démuni d'attaches familiales et personnelles avec son pays d'origine compte tenu du fait qu'il est sans nouvelles de ses cinq enfants mineurs et qu'il s'est intégré à la société française. Il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant est célibataire et sans charge de famille en France. Il n'est pas contesté qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine, dans lequel se trouvent encore ses cinq enfants et où il a passé la majeure partie de sa vie. Dans ces conditions, la décision refusant à M. C... la délivrance d'un titre de séjour n'a pas porté au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la violation des dispositions du 7° de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Dans les circonstances particulières de l'espèce, le préfet du Doubs n'a pas davantage entaché la décision attaquée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.
7. Aux termes des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ". Compte tenu de ce qui a été dit au point 6, et de ce que le requérant se borne à soutenir, sans l'établir, qu'il encourt des risques en cas de retour dans son pays d'origine, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas un titre de séjour pour motifs humanitaires ou exceptionnels. Le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, par suite, être écarté.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :
8. Il résulte de ce qui précède que le refus de titre de séjour opposé à M. C... n'est pas illégal. Par suite, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour.
Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :
9. D'abord, il résulte de ce qui précède que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire n'est pas illégale. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire.
10. Ensuite, aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
11. M. C... ne justifie pas des risques pour sa vie qu'il allègue en cas de retour en Centrafrique en invoquant le même récit qui a déjà été écarté par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides puis la Cour nationale du droit d'asile. Par suite, le moyen invoqué de ce chef sera également écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 2 juillet 2020 le tribunal administratif de Besançon a rejeté sa demande. Par suite, sa requête d'appel doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi ci-dessus visée du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera adressée au préfet de Doubs.
N° 19NC03335 2