Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 octobre 2019, M. C... B..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement 26 septembre 209 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à son avocat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B... soutient que :
En ce qui concerne le refus de séjour :
- la décision n'est pas valablement motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen approfondi de sa situation personnelle ;
- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- la décision n'est pas suffisamment motivée ;
- elle est illégale du fait de l'illégalité du refus de séjour ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- la décision n'est pas motivée ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 décembre 2020, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Stenger, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant marocain né le 1er janvier 1948, est entré en France pour la dernière fois le 1er février 2018 muni de son passeport et d'un visa de court séjour valable du 13 septembre 2017 au 11 mars 2018. Le 17 janvier 2018, il a sollicité son admission au séjour en raison de sa vie privée et familiale en France. Par un arrêté du 14 février 2019, le préfet de la Moselle a refusé de faire droit à sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 26 septembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté contesté :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, l'arrêté contesté, qui énonce de manière précise et circonstanciée les motifs de droit et de fait sur lesquels s'est fondé le préfet pour refuser d'admettre au séjour M. B... est régulièrement motivé. Par suite, le moyen tiré du vice de forme doit être écarté comme manquant en fait.
3. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier ni des termes de l'arrêté contesté que le préfet n'aurait pas procédé à un examen approfondi de la situation personnelle de M. B.... Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen sérieux de la situation personnelle de l'intéressé doit également être écarté comme manquant en fait.
4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Il ressort des pièces du dossier que, comme l'ont relevé les premiers juges, à la date de la décision attaquée, le requérant ne résidait en France que depuis un an. M. B... se prévaut, d'une part, de la présence régulière en France de cinq de ses six enfants majeurs, dont deux ont la nationalité française, deux sont titulaires d'une carte de séjour " étudiant " et l'un est titulaire d'une carte de résident en qualité de conjoint d'une ressortissante française et d'autre part, d'être logé par sa fille et son beau-fils, lesquels subviennent à ses besoins. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé ne justifie pas avoir transféré en France le centre de ses intérêts moraux et familiaux alors qu'il a vécu 70 ans dans son pays d'origine, le Maroc, où il n'établit pas ne plus disposer d'attaches familiales, et où vit encore notamment un de ses enfants ainsi que son épouse, qui ne bénéficiait à la date de la décision contestée que d'un visa de court séjour valable du 10 octobre 2018 au 9 octobre 2019 pour faire des allers retours sur le territoire français. La circonstance invoquée en appel que Mme B... réside sur le territoire français et qu'elle a déposé une demande de titre de séjour est inopérante. En outre, si le requérant allègue des problèmes de santé en raison d'un état de dépendance, nécessitant la présence d'une tierce personne, il n'en justifie pas en se bornant à verser aux débats une convocation médicale pour une opération de la cataracte en octobre 2019, un document conseil après un traumatisme crânien ou en alléguant que son fils doit effectuer régulièrement des voyages au Maroc pour l'accompagner à des consultations médicales. Ainsi, eu égard aux conditions de séjour de l'intéressé en France, la décision de refus de titre de séjour n'a pas porté une atteinte disproportionnée à son droit de mener une vie privée et familiale normale. Il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Pour les mêmes raisons, le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la mesure sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé.
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : [...] 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; [...] La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III... ".
7. L'arrêté attaqué, qui refuse la délivrance d'un titre de séjour à M. B..., entre dans le champ d'application du 3° précité du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, qu'il vise. Il résulte des dispositions précitées que l'obligation de quitter le territoire français opposée à un étranger n'a pas dans ce cas à faire l'objet d'une motivation distincte de la décision de refus de titre de séjour. Or, comme cela a été indiqué au point 2, la décision de refus de titre de séjour est régulièrement motivée. Par suite, en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
8. En deuxième lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de séjour.
9. En troisième lieu, pour les mêmes raisons que celles indiquées au point 5 du présent arrêt, le préfet de la Moselle n'a pas, en prenant la mesure d'éloignement contestée, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni n'a entachée sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. Par suite, ces moyens doivent être écartés.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
10. En premier lieu, la décision contestée énonce, de manière suffisamment précise, les considérations de droit et de fait sur lesquelles s'est fondé le préfet pour fixer le Maroc comme étant le pays à destination duquel le requérant pourra être reconduit d'office. Le moyen tiré du défaut de motivation de cette décision manque ainsi en fait et doit être écarté.
11. En dernier lieu, pour les mêmes raisons que celles indiquées au point 5, le préfet n'a pas, en prenant la décision contestée, méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni n'a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation. Ces moyens doivent donc être écartés.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté attaqué, n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. L'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de M. B... une somme en application de ces dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
N° 19NC03066 2