Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 avril 2015 M. C... et Mme B...épouseC..., représentés par Me E...demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy du 27 novembre 2014 ;
2°) d'enjoindre au préfet de Meurthe-et-Moselle de leur délivrer un titre de séjour avec autorisation de travail, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer leur situation administrative et de leur délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à MeE..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Ils soutiennent que :
- les décisions ne sont pas suffisamment motivées ;
- les obligations de quitter le territoire sont fondées sur des décisions de refus de titre de séjour illégales qui portent une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de la vie privée et familiale et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences des décisions sur leur situation personnelle ;
- les décisions fixant le pays de destination sont contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et à l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2015, le préfet de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.
Il s'en rapporte à ses écritures de première instance.
M. et Mme C...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 26 mars 2015.
Vu :
- les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Guidi.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne les obligations de quitter le territoire français :
1. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 , applicable à la date de la décision attaquée, dont les dispositions sont reprises à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; qu'aux termes de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation " ;
2. Considérant que M. et MmeC..., de nationalité turque, soutiennent que les obligations de quitter le territoire prises à leur encontre par le préfet de Meurthe-et-Moselle le 1er août 2014 ainsi que les décisions de refus de titre de séjour qui en constituent le fondement sont insuffisamment motivées ; qu'il ressort des pièces du dossier que les décisions de refus de séjour mentionnent, avec une précision suffisante et dépourvue de caractère stéréotypé, les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elles précisent notamment le parcours des intéressés depuis leur entrée en France, leur situation familiale et la scolarisation des enfants ; que la circonstance qu'elles n'indiquent pas que des membres de la famille sont présents sur le territoire, ce qui n'est au demeurant pas établi, ne suffit pas à regarder les décisions de refus de titre comme insuffisamment motivées ; que les décisions mentionnent également l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de ces décisions de refus de titre de séjour et des obligations de quitter le territoire qui les assortissent manque en fait, tant au regard de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 que de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes des dispositions du 7° de l 'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir (...) " ;
4. Considérant que M. et Mme C...excipent de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour dont ils ont fait l'objet le 1er août 2014 à l'appui de leurs conclusions tendant à l'annulation des obligations de quitter le territoire assortissant ces décisions ; qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...est entré en France en 2007 pour y présenter une demande d'asile dont il a été débouté le 13 mai 2008 ; que son épouse est entrée en France en mai 2011 pour y présenter une demande d'asile dont elle a été déboutée le 5 juillet 2012 ; que si M. C...soutient être resté en France depuis 2007, il ne l'établit pas ; que les requérants, qui sont accueillis au sein d'un hébergement d'urgence, ne sauraient justifier de leur insertion dans la société française par la seule scolarisation de leurs trois enfants et la production d'attestations de compatriotes ; qu'à supposer avérée la présence de frères et soeurs du couple sur le territoire, les requérants n'établissent pas entretenir des liens particuliers avec eux ; que dans ces conditions, eu égard à la durée et aux conditions de séjour des intéressés sur le territoire, M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que les décisions de refus de séjour contestées porteraient une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale, ni que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation au vu de leur situation en estimant que les requérants ne justifiaient pas de motifs exceptionnels ni de considérations humanitaires ; que M. et Mme C...ne peuvent à cet égard se prévaloir utilement de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dont les orientations générales ne constituent pas des lignes directrices ;
En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :
5. Considérant, en premier lieu, que les décisions fixant le pays de renvoi de M. et Mme C... comportent l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; que par suite le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté :
6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...)Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; que, si les requérants soutiennent qu'ils encourent du fait de leur engagement politique des risques de traitements inhumains et dégradants en cas de retour en Turquie, la seule production d'attestations peu étayées de compatriotes ne permet pas d'établir la réalité de cet engagement, ni le caractère personnel des risques encourus ; que, par conséquent, le préfet de Meurthe-et-Moselle n'a méconnu ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. et Mme C...ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
9. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'État, qui n'est pas la partie perdante, verse à Me E...la somme de 1 500 euros sollicitée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C... et de Mme B...épouse C...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C..., à Husne B...épouse C...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de Meurthe-et-Moselle.
''
''
''
''
3
N° 15NC00755