Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2015, la SAS " Société d'exploitation de la Menuiserie Charpente MARTIN FILS ", représentée par Me Woock-Spiess, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il porte rejet du surplus de sa demande ;
2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle demeure redevable ainsi que des pénalités dont ces rappels sont assortis ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 7 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a omis de répondre à des moyens ;
- les impositions ont été établies à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que le vérificateur a omis de vérifier si les droits de taxe sur la valeur ajoutée rappelés étaient bien exigibles ;
- l'administration a méconnu les règles d'exigibilité prévues à l'article 269 du code général des impôts ;
- l'administration a ajouté à la loi en exigeant que les attestations qu'elle devait produire soient impérativement établies conformément au modèle prévu à l'instruction
3 C-7-06 du 8 décembre 2006 ;
- doivent être déduites des bases de calcul des intérêts de retard les sommes de
3 291 euros, 5 316 euros et 1 744 euros, lesquelles correspondent aux crédits d'impôt sur les sociétés qu'elle a obtenus sur le fondement de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales qui prévoit le mécanisme dit de la cascade.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
Vu
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre,
- les conclusions de Mme Peton-Philippot ;
- et les observations de Me Woock-Spiess, avocat représentant la SAS " Société d'exploitation de la Menuiserie Charpente MARTIN FILS ".
1. Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, la société par actions simplifiées (SAS) " Société d'exploitation de la Menuiserie Charpente MARTIN FILS " s'est vu notifier, par proposition de rectification du 16 mai 2011, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er avril 2007 au 31 août 2010 ; que l'administration fiscale a en effet remis en cause, lors de la facturation de travaux de charpente, l'application du taux réduit de 5,5 % ; que la société a contesté ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée ainsi que les pénalités dont ils ont été assortis ; que, par jugement du 29 septembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée résultant de la remise en cause du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée appliqué aux travaux effectués au profit de M. et Mme A...et a rejeté le surplus de la demande ; que la SAS " Société d'exploitation de la Menuiserie Charpente MARTIN FILS " relève appel de ce jugement en tant qu'il porte rejet du surplus de sa demande ;
Sur les conclusions aux fins de décharge :
En ce qui concerne le bien-fondé de l'impôt :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 279-0 bis dans sa version alors applicable : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit sur les travaux d'amélioration, de transformation, d'aménagement et d'entretien portant sur des locaux à usage d'habitation, achevés depuis plus de deux ans, à l'exception de la part correspondant à la fourniture d'équipements ménagers ou mobiliers ou à l'acquisition de gros équipements fournis dans le cadre de travaux d'installation ou de remplacement du système de chauffage, des ascenseurs ou de l'installation sanitaire dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé du budget.(...) 3. Le taux réduit prévu au 1 est applicable aux travaux facturés au propriétaire ou, le cas échéant, au syndicat de copropriétaires, au locataire, à l'occupant des locaux ou à leur représentant à condition que le preneur atteste que ces travaux se rapportent à des locaux d'habitation achevés depuis plus de deux ans et ne répondent pas aux conditions mentionnées au 2. Le prestataire est tenu de conserver cette attestation à l'appui de sa comptabilité. Le preneur doit conserver copie de cette attestation, ainsi que les factures ou notes émises par les entreprises ayant réalisé des travaux jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant la réalisation de ces travaux. " ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a seulement remis en cause, à l'occasion de la vérification de comptabilité à l'origine des impositions en litige, le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée dont la société requérante a fait application à l'occasion de la facturation de certains travaux de charpente ; que si la société requérante soutient que la procédure d'imposition est irrégulière faute pour le vérificateur d'avoir vérifié si les droits de taxe sur la valeur ajoutée ainsi rappelés étaient exigibles au regard des règles prévues à l'article 269 du code général des impôts, aucune disposition législative ou réglementaire ne mettait cependant une telle obligation à la charge de l'administration ; que si la SAS " Société d'exploitation de la Menuiserie Charpente MARTIN FILS " prétend que la taxe afférente à tout ou partie de ces opérations n'était, en réalité, contrairement à ce qu'elle a déclaré, pas exigible faute d'un encaissement au sens de l'article 269 du code général des impôts, il lui appartient de l'établir, ce qu'elle ne fait pas ;
4. Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que la société requérante soutient, le vérificateur ne s'est pas fondé pour mettre les rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux à sa charge sur le fait que les attestations produites n'étaient pas établies conformément aux modèles prescrits impérativement par l'administration fiscale mais a relevé soit l'absence de telles attestations, soit que les attestations produites avaient été établies postérieurement aux dates des factures, soit encore qu'elles ne permettaient pas d'établir clairement l'identité des clients, le lieu de réalisation des travaux ou ne mentionnaient pas que les travaux réalisés étaient au nombre de ceux pour lesquels l'application du taux réduit était possible ; que faute d'une contestation utile de sa part sur ces différents motifs, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause l'application du taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée à l'occasion de la facturation des travaux en cause ;
En ce qui concerne les intérêts de retard :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : " Toute somme, dont l'établissement ou le recouvrement incombe à la direction générale des impôts, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard " ;
6. Considérant que si la société requérante a pu déduire, en vertu de l'article L. 77 du livre des procédures fiscales, de ses résultats à l'impôt sur les sociétés, le montant des rappels de taxe sur la valeur mis à sa charge, cette circonstance demeure toutefois sans incidence sur le montant des droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'elle n'a pas acquittés dans le délai légal qui lui était imparti et, par suite, sur la base de calcul des intérêts de retard dus sur le fondement de l'article 1727 du code général des impôts ; qu'elle n'est, par suite, pas fondée à demander que soient déduites de ces bases les sommes de 3 291 euros, 5 316 euros et 1 744 euros ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS " Société d'exploitation de la Menuiserie Charpente MARTIN FILS " n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg, qui n'a pas omis de répondre à un moyen opérant, a rejeté le surplus de sa demande ;
Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que la SAS " Société d'exploitation de la Menuiserie Charpente MARTIN FILS " demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SAS " Société d'exploitation de la Menuiserie Charpente MARTIN FILS " est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS " Société d'exploitation de la Menuiserie Charpente MARTIN FILS " et au ministre de l'économie et des finances.
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N° 15NC02360