Procédure devant la cour :
Par un recours, enregistré le 22 décembre 2015, le ministre des finances et des comptes publics demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il a prononcé cette décharge ;
2°) de rejeter la demande de décharge présentée par Mme A...devant le tribunal administratif de Strasbourg.
Il soutient que c'est à tort que le tribunal a considéré que Mme A...pouvait obtenir la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge en se prévalant, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 33 de l'instruction n° 3-A-31217 du 20 octobre 1999 dès lors que ses remplacements n'ayant pas revêtu un caractère occasionnel, elle n'entrait pas dans les prévisions de cette doctrine.
Par mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2016, MmeA..., représentée par Me B..., conclut au rejet du recours et à ce que soit mis à la charge de lÉtat le versement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que le moyen soulevé par le ministre n'est pas fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre ;
- les conclusions de Mme Peton-Philippot, rapporteur public ;
- et les observations de MeB..., représentant MmeA....
1. Considérant qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration fiscale a soumis à la taxe sur la valeur ajoutée, les sommes versées à Mme C...A..., chirurgien-dentiste, par deux confrères dans le cadre de conventions dites de remplacement ; que Mme A...a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis ainsi à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008 ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ; que, par jugement du 5 novembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a considéré que la mise à disposition par Mme A...de ses locaux et de son matériel donnait lieu à des prestations de service taxables ; qu'il a en revanche estimé que Mme A...pouvait se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, du paragraphe 33 de l'instruction n° 3 A-31217 du 20 octobre 1999 et a prononcé la décharge sollicitée par la redevable ; que le ministre des finances et des comptes publics relève appel de ce jugement en tant qu'il a prononcé cette décharge ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration (...) " ;
3. Considérant que selon le paragraphe 33 de la documentation administrative de base n° 3-A-3121 dans sa version à jour le 20 octobre 1999 : " Les membres des professions médicales ou paramédicales qui demandent à un confrère de les remplacer, à titre occasionnel, sont autorisés à ne pas soumettre à la TVA les sommes perçues à ce titre qui sont, le plus souvent, qualifiées d'honoraires rétrocédés./Cette mesure s'applique quels que soient les motifs pour lesquels le titulaire du cabinet fait appel à un remplaçant (maladie, congé, formation post-universitaire, exercice d'un mandat électif auprès d'une organisation professionnelle, etc.), dès lors que ce remplacement revêt un caractère occasionnel./ La situation est différente lorsque deux ou plusieurs praticiens ont conclu un contrat de collaboration et exercent conjointement la même activité dans les mêmes locaux. Dans ce cas, les redevances versées au propriétaire du cabinet en rémunération de la mise à disposition de ses installations doivent être soumises à la TVA " ;
4. Considérant qu'il appartient au juge de l'impôt, dans le cadre d'un recours fiscal, d'apprécier, au vu du dossier qui lui est soumis par l'administration et le contribuable si ce dernier est en droit de se prévaloir des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en raison d'une grossesse gémellaire et de la naissance de jumeaux, MmeA..., qui s'en est ensuite occupée en même temps que ses trois autres premiers enfants, a entendu bénéficier d'un congé maternité puis d'un congé parental ; qu'elle a ainsi organisé son remplacement en mettant à la disposition de deux confrères, non salariés, ses locaux professionnels et le matériel de son cabinet ; qu'alors même qu'ils ont couvert la quasi-totalité de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, ces remplacements, liés à la survenance d'un événement précis qui ne s'est pas répété de manière régulière, ont revêtu un caractère occasionnel au sens du paragraphe 33 de la documentation administrative n° 3-A-31217 ; que le ministre des finances et des comptes publics n'est par suite pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que Mme A...pouvait se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de cette doctrine ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre des finances et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont Mme A...était redevable au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008 ainsi que des pénalités dont ils ont été assortis ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par Mme A...et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le recours du ministre des finances et des comptes publics est rejeté.
Article 2 : L'État versera à Mme A...une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au ministre de l'économie et des finances.
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N° 15NC02525