Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2016, M.A..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il porte rejet du surplus de sa demande ;
2°) d'annuler cet arrêté ;
3°) d'enjoindre au préfet, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de procéder dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir à un nouvel examen de sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- le préfet s'est cru tenu de l'obliger à quitter le territoire français par la décision par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant sa demande de réexamen ;
- il sera exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Albanie ;
- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant l'Albanie a été prise en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 décembre 2016, le préfet de l'Aube conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.
M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle de Nancy du 19 septembre 2016.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Etienvre.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
1. Considérant, en premier lieu, que l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; qu'aux termes enfin du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'obligation de quitter le territoire français est motivée (...) " ;
2. Considérant que si l'obligation de motiver les mesures d'éloignement d'un étranger, qui résulte des dispositions rappelées ci-dessus, implique que ces décisions comportent l'énoncé des éléments de droit et de fait qui fondent la mise en oeuvre de la procédure d'éloignement, l'autorité administrative n'est, en revanche, pas tenue de préciser en quoi la situation particulière de l'intéressé ne fait pas obstacle à la mise en oeuvre de cette procédure ;
3. Considérant que l'arrêté comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé pour obliger M.A..., ressortissant albanais, à quitter le territoire français ; que M. A...n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que cet arrêté souffre d'une insuffisance de motivation faute pour le préfet, d'une part, d'avoir fait état de la présence en France de son épouse et de leurs deux enfants et, d'autre part, d'avoir précisé les conditions d'octroi d'un titre de séjour ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M.A... ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas de ces pièces que le préfet s'est cru tenu d'obliger M. A...à quitter le territoire français ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que le moyen tiré de ce que M. A...encourt des risques en cas de retour en Albanie est inopérant à l'appui de conclusions aux fins d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français qui ne fixe pas en elle-même le pays de renvoi ;
7. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
8. Considérant que si le requérant fait valoir que le couple qu'il forme avec son épouse a deux enfants nés les12 mars 2014 et 27 décembre 2015 et s'est bien intégré dans la société française, il ressort cependant des pièces du dossier que le préfet n'a pas, eu égard notamment aux conditions dans lesquelles M. A...a séjourné en France depuis son entrée en janvier 2013, porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé, dont l'épouse se trouve également en situation irrégulière, au respect de sa vie privée et familiale ;
9. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas davantage de ces pièces que le préfet ait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de M. A...qui pourra retourner en Albanie avec son épouse et leurs deux enfants ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l' homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;
11. Considérant que M.A..., dont la demande d'asile a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile et dont la demande de réexamen a également été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, ne justifie pas de la réalité des risques suscitant les craintes qu'il déclare éprouver en cas de retour en Albanie ;
12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté le surplus de sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions contestées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction présentées par M. A...ne peuvent être accueillies ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à son conseil de la somme que A...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.
Une copie du présent arrêt sera adressée au préfet de l'Aube.
2
N° 16NC01557