Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 6 février 2020, M. B... F..., représenté par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1705195 du tribunal administratif de Strasbourg du 3 juillet 2019 ;
2°) d'annuler la décision de la directrice de l'institut de formation d'aides-soignants du centre hospitalier régional de Metz-Thionville du 26 juin 2017, ensemble la décision du 25 août 2017 portant rejet de son recours gracieux ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional de Metz-Thionville la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les décisions des 26 juin et 25 août 2017 ont été signées par une autorité incompétente ;
- la décision du 26 juin 2017 ne mentionne aucunement le nom des personnes ayant siégé au sein du conseil technique qui s'est réuni le 6 juin 2017 ;
- elle est entachée d'un vice de procédure, dès lors que, en l'absence de mention de l'identité des personnes ayant siégé au sein de ce conseil technique, il n'est pas possible de s'assurer que la composition d'une telle instance était régulière, ni que le quorum était atteint ;
- les décisions des 26 juin et 25 août 2017 sont également entachées d'un vice de procédure en raison du refus du directeur de l'institut de formation d'aides-soignants de lui communiquer le procès-verbal de la réunion extraordinaire du comité technique du 6 juin 2017 ;
- la décision du 26 juin 2017 est entachée d'une erreur d'appréciation de ses compétences et de son comportement ;
- elle constitue une sanction disproportionnée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2020, le centre hospitalier régional de Metz-Thionville, représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du requérant d'une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par M. F..., qui sont identiques à ceux exposés en première instance, ne sont pas fondés.
M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 décembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- l'arrêté du 22 octobre 2005 relatif à la formation conduisant au diplôme d'Etat d'aide-soignant ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- et les conclusions de Mme Seibt, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Inscrit à l'institut de formation d'aides-soignants du centre hospitalier régional de Metz-Thionville au titre l'année 2016-2017, M. B... F... a été admis à suivre la formation conduisant à l'obtention du diplôme d'Etat d'aide-soignant. Par un courrier du 31 mai 2017, le requérant a été convoqué à une réunion extraordinaire du conseil technique de l'institut en vue de l'examen de son dossier. A la suite de l'avis en ce sens du conseil technique du 22 juin 2017, la directrice de l'institut de formation d'aides-soignants du centre hospitalier régional de Metz-Thionville, par une décision du 26 juin 2017, a prononcé l'exclusion définitive de l'intéressé de sa formation pour " inaptitudes pratiques au cours de la scolarité " en application des dispositions de l'article 37 de l'arrêté du 22 octobre 2015, relatif à la formation conduisant au diplôme d'Etat d'aide-soignant. Son recours gracieux, formé contre cette décision le 4 août 2017, ayant été rejeté le 25 août suivant, M. F... a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à l'annulation des décisions des 26 juin et 4 août 2017. Il relève appel du jugement n° 1705195 du 3 juillet 2019 qui rejette sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, aux termes de l'article 37 de l'arrêté du 22 octobre 2005, relatif à la formation conduisant au diplôme d'Etat d'aide-soignant : " Le directeur de l'institut de formation peut prononcer, après avis du conseil technique, l'exclusion d'un élève pour inaptitudes théoriques ou pratiques au cours de la scolarité. Le directeur doit saisir les membres du conseil technique au moins quinze jours avant la réunion de celui-ci en communiquant à chaque membre un rapport motivé et le dossier scolaire de l'élève. / Les cas d'élèves en difficulté sont soumis au conseil technique par le directeur. Le conseil peut proposer un soutien particulier susceptible de lever les difficultés sans allongement de la formation. / (...) ". Aux termes de l'article L. 4383-3 du code de la santé publique : " La création des instituts ou écoles de formation des professionnels mentionnés aux titres Ier à VII du présent livre, des aides-soignants, des auxiliaires de puériculture, des ambulanciers et des cadres de santé fait l'objet d'une autorisation délivrée par le président du conseil régional, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé. / (...) / Le président du conseil régional agrée, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, les directeurs des instituts ou écoles de formation mentionnés au premier alinéa. / (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que la décision du 26 juin 2017 a été signée par Mme G... D..., directrice des soins et coordinatrice générale des écoles et instituts du centre hospitalier régional de Metz-Thionville et du centre hospitalier de Briey. Par un arrêté du 10 mars 2016, le président du conseil régional de la région Alsace Champagne-Ardenne Lorraine a agréé l'intéressée en qualité de directrice de l'institut de formation d'aides-soignants du centre hospitalier régional de Metz-Thionville avec effet au 15 mars 2016 pour une durée de cinq ans. Par suite, en application du premier alinéa de l'article 37 de l'arrêté du 22 octobre 2005, Mme D..., qui n'avait pas besoin, en outre, d'une délégation de signature à cet effet, était compétente pour prononcer la mesure d'exclusion en litige. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de la décision doit être écarté comme manquant en fait.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 35 de l'arrêté du 22 octobre 2005 : " Dans chaque institut de formation d'aides-soignants, le directeur est assisté d'un conseil technique, qui est consulté sur toute question relative à la formation des élèves. Ce conseil est constitué par arrêté du directeur général de l'agence régionale de santé. / Le conseil technique est présidé par le directeur général de l'agence régionale de santé ou son représentant. Il comprend, outre le directeur de l'institut : a) Un représentant de l'organisme gestionnaire ; b) Un infirmier, formateur permanent de l'institut de formation, élu chaque année par ses pairs ; c) Un aide-soignant d'un établissement accueillant des élèves en stage, désigné pour trois ans par le directeur de l'institut de formation ; d) Le conseiller technique régional en soins infirmiers ou le conseiller pédagogique dans les régions où il existe ; e) Deux représentants des élèves élus chaque année par leurs pairs ; f) Le cas échéant, le coordonnateur général des soins de l'établissement dont dépend l'institut ou son représentant. / (...) / Le conseil technique ne peut siéger que si les deux tiers de ses membres sont présents. Si le quorum requis n'est pas atteint, la réunion est reportée. Les membres du conseil sont à nouveau convoqués pour une réunion qui se tient dans un délai maximal de huit jours. Le conseil peut alors valablement délibérer, quel que soit le nombre des présents. / Le directeur fait assurer le secrétariat des réunions. Le compte rendu, après validation par le président du conseil technique, est adressé à l'ensemble de ses membres. ".
5. D'une part, il ressort des pièces du dossier, spécialement de la feuille d'émargement de la séance extraordinaire du conseil technique du 22 juin 2017, dont M. F... ne discute pas les mentions, que sept des neuf membres de cette instance désignés par un arrêté du directeur général de l'agence régional de santé Grand Est du 1er juin 2017, en l'occurrence la présidente du conseil technique, la directrice de l'institut de formation d'aides-soignants, une représentante de l'organisme gestionnaire, un infirmier formateur permanent de l'institut de formation, une aide-soignante et deux représentantes des élèves, étaient présents, soit plus des deux tiers. Dès lors, M. F..., n'est pas fondé à soutenir que la composition du conseil technique était irrégulière, ni que le quorum exigé n'était pas atteint.
6. D'autre part, aucune disposition légale ou réglementaire ni aucun principe n'impose que les élèves susceptibles de faire l'objet d'une mesure d'exclusion définitive pour inaptitudes pratiques au cours de la scolarité reçoivent communication du compte rendu de la séance du comité technique qui s'est prononcé à titre consultatif sur leur situation. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier et n'est, d'ailleurs, même pas expressément soutenu que le comité aurait émis son avis sans débat ni examen de la situation de l'intéressé. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté dans ses deux branches.
7. En troisième lieu, la circonstance que la décision du 26 juin 2017 ne mentionne pas le nom des personnes ayant siégé au sein du conseil technique du 6 juin 2017 est sans incidence sur sa légalité. Par suite, le moyen doit être écarté comme inopérant.
8. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que, pour prononcer l'exclusion définitive de M. F... de sa formation d'aide-soignant pour inaptitudes pratiques au cours de la scolarité, la directrice de l'institut de formation d'aides-soignants s'est fondée sur la circonstance que l'intéressé a rencontré, tout au long de sa scolarité, d'importantes difficultés dans l'accomplissement de ses tâches. Ces difficultés ont plus particulièrement été mises en évidence lors d'une mise en situation professionnelle, le 2 novembre 2016, et lors de l'accomplissement de ses stages en gériatrie-psychiatrie du 10 octobre au 4 novembre 2016, en santé mentale-psychiatrie du 30 janvier au 24 février 2017 et en réadaptation cardiaque-cardiologie du 8 mai au 2 juin 2017. Caractérisées principalement par une absence de posture professionnelle, des problèmes d'organisation au niveau des soins, des lacunes en matière d'hygiène, un manque de relationnel et d'empathie envers les patients, un non-respect de leur pudeur et de leur sécurité, voire une mise en danger de ceux-ci, elles ont donné lieu à l'établissement de plusieurs rapports circonstanciés et à la cessation anticipée du stage en réadaptation cardiaque-cardiologie. La directrice de l'institut de formation d'aides-soignants s'est également fondée sur les problèmes de comportement récurrents du requérant, tant à l'égard des patients, qu'à l'égard de ses collègues et de sa hiérarchie, qui lui ont valu, en particulier, un avertissement oral de la part de la directrice adjointe le 6 avril 2017. Sont notamment mis en exergue une communication inappropriée et à la limite parfois de l'arrogance, une attitude désinvolte et nonchalante, un manque d'investissement et d'authenticité, une propension à tout relativiser et à ne pas prendre la mesure de l'ampleur des lacunes.
9. En se bornant à faire valoir qu'il s'est inscrit à l'institut de formation d'aides-soignants du centre hospitalier régional de Metz-Thionville dans le cadre d'une réorientation professionnelle, après avoir travaillé dans le secteur du bâtiment, et qu'il est normal de faire des erreurs lorsqu'on débute, M. F... ne conteste pas sérieusement la matérialité des faits qui lui sont reprochés. Contrairement à ses allégations, il ne ressort pas des pièces du dossier, spécialement du document intitulé " liste des événements individuels ", que ses problèmes de comportement seraient imputables à une timidité excessive ou seraient le fruit d'une " impression subjective " de la part de ses encadrants, ne reposant sur aucun élément factuel précis et traduisant une volonté de lui faire " un procès d'intention ". Si le requérant se prévaut encore de sa formation aux gestes et soins d'urgence de niveau 2, des bons résultats obtenus lors de certains stages et de la validation de la plupart des huit compétences attendues d'un aide-soignant, il n'est pas contesté que l'intéressé, à l'issue de sa scolarité, n'a pas été en mesure de valider les compétences n° 2, n° 5 et n° 8, relatives respectivement à l'appréciation de l'état clinique d'une personne, à l'établissement d'une communication adaptée et à l'organisation de son travail avec une équipe pluridisciplinaire, et que, s'agissant des cinq autres compétences requises, il n'a obtenu que des évaluations moyennes. Par suite, alors que l'administration fait valoir, sans être contredite, que l'intéressé a bénéficié, dans le cadre de sa scolarité, de huit suivis pédagogiques personnalisés et que, eu égard à son incapacité à se remettre en cause et à tenir compte des remarques qui lui sont adressées, un éventuel redoublement ne lui serait d'aucun profit, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que la directrice de l'institut de formation d'aides-soignants a prononcé son exclusion définitive pour inaptitudes pratiques au cours de la scolarité.
10. En sixième lieu, la décision par laquelle le directeur d'un institut de formation paramédical met fin à la scolarité d'un étudiant en raison de ses insuffisances théoriques ou pratiques ne constitue pas une sanction. Par suite, il y a lieu d'écarter comme inopérant le moyen tiré de ce que la mesure d'exclusion prise à l'encontre de M. F... présenterait le caractère d'une " sanction disproportionnée ".
11. En septième et dernier lieu, l'exercice du recours gracieux n'ayant d'autre objet que d'inviter l'auteur de la décision à reconsidérer sa position, un recours contentieux consécutif au rejet d'un recours gracieux doit nécessairement être regardé comme étant dirigé, non pas tant contre le rejet du recours gracieux, dont les vices propres ne peuvent être utilement contestés, que contre la décision initialement prise par l'autorité administrative. Par suite, il y a lieu d'écarter comme inopérants les moyens tirés respectivement de ce que la décision du 25 août 2017, qui rejette le recours gracieux formé par M. F... le 4 août 2004, aurait été signée par une autorité incompétente et serait entachée d'un vice de procédure en raison du refus de la directrice de l'institut de formation d'aides-soignants de lui communiquer le procès-verbal de la réunion extraordinaire du conseil technique du 6 juin 2017.
12. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, que M. F... n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions des 26 juin et 25 août 2017. Par suite, il n'est pas davantage fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Sur les frais de justice :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du centre hospitalier régional de Metz-Thionville, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par M. F... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu non plus, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le défendeur en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier régional de
Metz-Thionville en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me A... pour M. B... F... en application des dispositions de l'article 6 du décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 et au centre hospitalier régional de Metz-Thionville.
N° 20NC00321 2